La table finale idéale
Rêvons un peu, en sélectionnant nous-même un casting parfait pour constituer le « November Nine »…
David Benyamine (178e avec 353,000)
A tout seigneur, tout honneur : le meilleur joueur français du monde réalise son deuxième « deep-run » consécutif dans le Main Event. DB possède un des plus petits tapis : à ce stade, la table finale semble loin, très loin, et il lui faudra déjà beaucoup de réussite pour faire mieux qu’en 2009 (106e place). Mais de quoi j’aurais l’air si je ne mettais pas le meilleur français du monde au casting de la table finale idéale ?
Un second français
Ils sont sept tricolores autour de Benyamine, et je ne serai pas difficile : n’importe lequel me conviendra. Certes, il y a des joueurs de qui je me sens un peu plus proche, comme Pierre Canali, avec qui j’ai commenté quelques étapes de l’EPT, ou Gabriel Nassif, avec qui je partage une villa à Vegas depuis le début des WSOP. Il y a aussi Jean-Paul Pasqualini, vainqueur du Partouche Poker Tour et vrai bon joueur, Nicolas Babel, le meilleur pote de Manuel Bevand, et un joueur Winamax (tout de même !), Olivier Daeninckx, de la talentueuse équipe B du site, les Local Heroes. Je ne connais pas Michael Maître et Damien Luis, mais cela ne poserait aucun problème en cas d’accession en finale : on ignorait tout d’Antoine Saout il y a un an, et cela n’a pas empêché la communauté française de vibrer à l’unisson. C’est l’un des gros avantages de décaler la table finale du Main Event en novembre : cela nous laisse trois mois pour faire connaissance avec les joueurs, les observer jouer les tournois européens durant l’interlude, etc. Je ne serais pas non plus mécontent d’une finale de Joël Benzinou, joueur belge très apprécié par les joueurs français.
Johnny Chan (9e avec 2,564,000)
Le dernier champion du monde en course. Double champion du monde, en fait (1987 et 1988, deux titres à la suite !). Beaucoup le disent fini depuis quelques années : Chan est discret en tournoi, et mystérieux en cash-game. Même ses adversaires réguliers ont du mal à déterminer si c’est le meilleur joueur du monde, ou un pigeon complet. Cela dépend de son humeur, j’imagine. Chan s’est construit un gros tapis d’entrée de jeu lors du Day 1, et n’a quasiment jamais quitté les premières places du classement. Sa présence en finale assurerait un intérêt considérable de la part du grand public – n’oublions pas que son apparition dans le film Les Joueurs l’a rendu populaire auprès de toute une catégorie de gens ne connaissant rien au poker, ou presque. Bref, Chan est « good for poker », comme on dit.
Un scandinave
Theo Jorgensen, Johnny Lodden, William Thorson, Jesper Hougaard, plus quelques inconnus : nous n’avons que l’embarras du choix devant le nombre de talentueux joueurs nordiques encore en course. J’ai un faible particulier pour William Thorson, avec qui j’ai réellement pu faire connaissance lors de deux nuits mémorables à Dortmund. J’aime aussi beaucoup Theo Jorgensen, qui se bonifie avec l’âge. C’est un joueur d’expérience qui commence petit à petit à faire figure de doyen. Ce n’est qu’il y a quelques mois qu’il a vécu le point culminant de sa carrière – jusqu’à présent – avec sa victoire au WPT de Paris.
Gualter Salles (105e avec 939,000)
L’ancien pilote de course brésilien est l’histoire la plus barge du Main Event jusqu’à présent. Tout au début du Day 5 (hier), Salles s’est retrouvé impliqué dans un gros pot. Sur la rivière, son adversaire lui demande combien il lui reste. Salles compte et arrive à un total de 106,000. « OK, je mise 106,000 », lui dit son adversaire. Salles paie, mais ne peut montrer la meilleure main. Le croupier recompte son tapis, et l’on découvre que Salles avait en fait 107,000 ! Il lui reste donc un ridicule jeton de 1,000. Même pas le dixième d’une grosse blinde ! Avance rapide jusqu’à la fin de la journée : Salles est toujours en course, avec un tapis de 900,000, juste en dessous de la moyenne ! L’histoire vous rappelle quelque chose ? La même mésaventure était arrivée à Jack Strauss en 1982. Croyant être sorti après un coup tapis, Strauss a découvert un jeton solitaire oublié sous une serviette en papier. Le tournoi s’était terminé par sa victoire.
Alexander Kostritsyn (8e avec 2,564,000)
Le jeune russe est l’un des plus formidables talents a avoir émergé sur le circuit ces dernières années. J’en avais fait l’un de mes favoris lors des WSOP 2009. Ludovic Lacay ne tarit pas d’éloges à son sujet (peut-être plus autant, ceci dit, depuis que Kostritsyn l’a battu en quarts de finale du tournoi de heads-up le mois dernier) Son plus gros succès en tournoi ? L’Aussie Millions de Melbourne, remporté en 2008.
Un random donk américain
Chaque année, la table finale du Main Event comporte un ou plusieurs joueurs non-professionnels et pas forcément très futés dont on ne sait pas trop comment ils sont arrivés là. Rappelez-vous Darvin Moon et Steven Beigleter l’année dernière… Une finale équilibrée se doit de mélanger bons et mauvais joueurs, c’est bon pour le spectacle, et le grand public s’identifie plus facilement à des amateurs affrontant les pros (le schéma « David contre Goliath »)
Phil Galfond (85e avec 1,025 m.) et Michael Mizrachi (30e avec 1,793 m.)
Pour compléter ce casting rêvé, deux pros connus et reconnus. Galfond est l’un des meilleurs joueurs online du monde en cash-game, jouant et battant régulièrement les plus hautes limites… Très rare en tournoi (malgré un bracelet en PLO en 2008). Un professionnel accompli malgré son jeune âge, à la discipline irréprochable : voilà quelqu’un qui ne finira jamais « broke ». Ce qui n’est pas le cas de Michael Mizrachi, dont la carrière a subi des hauts et des bas, surtout des bas ces derniers temps, avec une faillite causée par une fréquentation un peu trop assidue des tables de craps de Vegas, et des petits problèmes avec le Fisc. Au début des WSOP 2001, Mizrachi a saisi la seconde chance qui lui était offerte par les Dieux du Poker en remportant le Player’s Championship. Lui et ses trois frères Robert, Donny et Eric ont tous terminé dans les places payées du Main Event.
Benjo