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Table finale du Main Event des WSOP 2013

Nine kids with a dream
Table finale du Main Event des World Series of Poker

Êtes-vous aussi impatients que nous ? Trois longs mois d’attente vont s’achever dans quelques jours, avec la conclusion à Las Vegas du plus gros tournoi de poker de la saison.

Nous y sommes enfin… La table finale des World Series of Poker ! Le Big One. La plus ancienne et la plus prestigieuse des compétitions de poker. Le tournoi auquel pensent tous les joueurs de poker, qu’ils soient débutant ou professionnels aguerris. Le tournoi qui change des vies, le tournoi qui réalise des rêves.

Et ce rêve, ils sont encore neuf joueurs à pouvoir l’atteindre les 4 et 5 novembre prochain.

Nous les avions laissés là le 16 juillet dernier, après l’élimination de l’immense Carlos Mortensen en dixième place. Et il s’en est passé des choses, durant ce délai de plus de trois mois imposé par les organisateurs de l’épreuve et la chaîne Américaine diffusant l’évènement. La vie de ces neuf joueurs a changé du jour au lendemain. Propulsés sur l’avant-scène de la planète poker, ces neuf joueurs, pour la plupart anonymes quelques jours auparavant, ont du faire à des responsabilités inédites, à une notoriété inattendue, à une pression d’un ordre nouveau. Ils ont voyagé, profité de leur statut et de leurs dollars tout frais pour prendre du bon temps, ils ont rencontré des tas de gens, ont fait la fête, ont sauté d’avion en avion, de capitale en capitale. Ils se préparés, ont travaillé d’arrache-pied en vue de l’échéance. Ils ont rêvé chaque nuit du grand jour. Celui où ils deviendraient le Champion du Monde. Champion du monde ! Mais de Champion du Monde, il n’y en aura qu’un seul au bout du compte.

Nous ne sommes plus qu’à huit jours de l’échéance. Afin de pouvoir apprécier au maximum ce grand moment, nous allons profiter de la semaine qui nous sépare de la partie pour vous présenter en détail les neuf finalistes. Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Comment sont-ils arrivés en finale ? Comment se sont-ils préparés pour la partie de poker la plus importante de leur vie ? Quelles sont leurs chances ? Tout au long de la semaine, nous vous dévoilerons TOUS les secrets des neuf joueurs de poker les plus scrutés de la planète. En commençant par le siège 9, l’amateur Jay Farber, jusqu’au siège 1, le pro du Team Winamax Sylvain Loosli, prêt comme jamais pour devenir le premier Français à remporter le titre suprême…

Programme des festivités

Lundi 4 novembre à 17h (2h du matin en France dans la nuit de lundi à mardi) : Coup d’envoi de la finale. La partie s’arrêtera une fois qu’il ne restera plus que trois joueurs.
Mardi 5 novembre (heure non déterminée) : Conclusion de la finale et sacre du Champion du Monde 2013.

La finale sera retransmise sur Internet en quasi-direct, avec tout juste 15 minutes de décalage qui permettront aux producteurs de montrer à l’écran les cartes cachées des joueurs. Avec d’ailleurs une petite innovation originale : ces cartes ne seront révélées qu’à la fin de chaque main ! Un concept à mon goût génial qui permettra à tous les spectateurs de jouer au jeu des devinettes sans avoir à attendre pour obtenir la réponse !

Un peu de lecture nostalgique

« 6000 kids with a dream » - Introduction au Main Event 2013
Day 3 : première rencontre avec Sylvain Loosli
Day 4 : la bulle
Galerie : les 27 Français payés dans le Main Event 2013
Le dénouement de l’été : Carlos Mortensen est éliminé en dixième place
Vidéo : réaction à chaud de Sylvain Loosli
Portrait à chaud de Sylvain

Vidéo : les phases préliminaires du Main Event sur Youtube

2009 : Antoine Saout passe tout près de l’exploit

Benjo

Découvrez les “November Nine” edition 2013

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Il reste moins de 50 minutes à jouer au niveau de blindes 200,000/400,000, ante 50,000. Ensuite, on passera à 250,000/500,000. On peut donc s’attendre à une première heure agitée.

Histoire de finir en beauté, c’est à l’envers que nous allons chaque jour vous présenter en détail les neuf finalistes, en commençant par le siège 9, Jay Farber.

Siège 1 : Sylvain Loosli (France / Joueur Winamax) 19,6 m.
Siège 2 : Michiel Brummelhuis (Pays-Bas) 11,275 m.
Siège 3 : Mark Newhouse (USA) 7,35 m.
Siège 4 : Ryan Riess (USA) 25,875 m.
Siège 5 : Amir Levahot (Israël) 29,7 m.
Siège 6 : Marc McLaughlin (Canada) 26,525 m.
Siège 7 : JC Tran (USA) 38 m.
Siège 8 : David Benefield (USA) 6,375 m.
Siège 9 : Jay Farber (USA) 25,975 m.

Les prix

Vainqueur : 8,359,531 $
Runner-up : 5,173,170 $
3e / 3,727,023 $
4e / 2,791,983 $
5e / 2,106,526 $
6e / 1,600,792 $
7e / 1,225,224 $
8e / 944,593 $
9e / 733,224 $

Benjo

Siège 9 : Jay Farber

Tapis : 25,975,000 (quatrième position, 65BB)
Origine : Est né à Doyletown (Pennsylvanie, États-Unis) mais a principalement vécu à Santa Barbara (Californie). Installé à Las Vegas depuis ses 23 ans.
Âge : 28 ans
Profession : Manager VIP pour des établissements de nuit de Las Vegas. Diplômé de l’université de Santa Barbara (Californie).
Statut : Unique amateur pur de la finale, mais a joué en cash-game de manière semi-professionnelle avant de trouver un job à Vegas.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 7,222$ grappillés au cours de trois petits tournois à faible prix d’entrée.

Twitter : @Jay_Farber_LV

Profil

Le plus gros tournoi de poker du monde aussi l’un des plus compétitifs, c’est logique : que ce soit lors des débuts, durant les années 70, où ces dix dernières années depuis l’improbable victoire d’un comptable nommé Chris Moneymaker, il a toujours été très difficile pour les joueurs amateurs de se faire une place en finale des Championnats du Monde. Cette année, Jay Farber est le seul parmi les neuf finalistes qui ne tirait pas des gains substantiels du poker avant cet été… En un mot : un amateur !

Et un amateur qui ne manque pas de relief, pour le coup, sorte de fêtard professionnel dont le métier est d’organiser des sauteries dans les lieux nocturnes de Las Vegas. Là-bas, on appelle ça un “VIP Host”, ou “promoteur”, et la ville n’en manque pas, vu le nombre de boîtes de nuit et lieux de débauche que compte le Strip et ses alentours. Un gars dont le rôle est de vous trouver la meilleure table, les meilleures soirées, les meilleures filles et les meilleures drogues (bon, c’est moi qui extrapole). Bref, un VIP Host s’assure que les fêtards passent la meilleure soirée possible tout en dépensant le maximum d’argent : Farber ramène de gros clients dans les boîtes, des “baleines” enclines à cramer des sommes allant parfois jusqu’à six chiffres, et ces boîtes lui versent de grosses commissions en retour. Pas étonnant donc que les gradins de la table télévisée étaient remplies de strip-teaseuses du club olé-olé le plus réputé de Las Vegas, le Spearmint Rhino, durant les phases finales du Main Event : Farber travaille étroitement avec l’établissement. Et pas étonnant non plus que l’amateur compte nombre de professionnels du poker (Shaun Deeb, Ben Lamb, etc) parmi ses amis : ces loustics-là figurent parmi les client les plus fidèles de ce genre d’endroits !

En lisant les articles consacrés à Farber, on devine entre les lignes un profil de joueur “en galère”, mais pas rassasié : l’Américain a découvert le jeu vers quinze ans, jouant entre amis dans les proverbiaux “home games” de son quartier, vivotant ensuite en jouant semi-professionnellement en cash-game autour de chez lui, ce qui ne devait pas suffire à assurer son train de vie car il travaillait aussi dans des bars à Santa Barbara, assurant la sécurité ou le comptoir selon les nuits. Puis, débarqué dans cet avatar moderne du Rêve Américain qu’est Las Vegas, Farber a repris sa routine de poker dans une ville qui ne manque pas de tables. Mais il faut bien manger : “Je n’avais pas de travail en arrivant ici, et beaucoup de mes amis étaient promoteurs ou hôtes VIP, alors je leur ai demandé s’il n’y avait pas quelque chose pour moi”, explique t-il.

Farber a disputé le Main Event trois ou quatre fois (il avoue ne plus se souvenir très bien), mais c’est seulement cette année qu’il parvient enfin à y réaliser une perf - et quelle perf ! Avant cela, son palmarès en tournoi ne comprenait que trois modestes résultats dans des tournois au prix d’entrée faible.

Parcours dans le Main Event

Jay Farber est très actif sur Twitter, ce qui nous facilite la tâche pour retracer son parcours dans le Main Event. La clé de la réussite pour un amateur face aux pros ? Toucher de grosses mains, semble t-il, et ne pas se les faire craquer. Jay se met d’abord en selle en doublant rapidement son tapis lors du Day 1 avec les As, puis gratte des jetons avec un brelan floppé et une couleur max. C’est lors du Day 3 qu’il intègre pour la première fois le Top 30, remportant un pot énorme avec deux Rois contre deux Dames pour grimper à 410,000. Pour franchir la barre du million de jetons, il fait brelan contre brelan, et conclut la main en carré d’as ! Son rush se poursuit dans les stades plus avancées du tournoi : un full floppé et une confrontation gagnée avec Roi-Dame contre As-Dix à tapis avant le flop lui permettent d’emballer trois millions de jetons pour le Day 6.

C’est à l’occasion de la première main de cette journée qu’il va disputer la main clé de son tournoi et être catapulté parmi les hommes de tête, doublant sur Noah Schwartz avec deux As contre deux Rois dans un pot de deux fois la moyenne ! Son manque d’expérience est relevé dans la journée lorsqu’il prend un tour de pénalité pour avoir exposé ses cartes alors qu’un joueur n’avait pas encore donné sa décision dans la main. Grâce à un dernier brelan floppé, il se positionne en huitième place avant d’aborder la dernière journée. Jay connaît un début de Day 7 compliqué, perdant les deux tiers de son tapis puis va connaître un dernier rush incroyable, remportant un coin flip, trouvant une quinte contre Mark Newhouse, prenant des jetons à Marc-Etienne McLaughlin avec deux Rois contre deux Dames, puis remportant un ultime gros ot face à JC Tran avec une top paire mieux kickée que celle de son compatriote. L’amateur entamera la finale en quatrième place au classement.

Évolution du tapis de Jay durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 104,400
Day 3 : 298,900
Day 4 : 604,000
Day 5 : 1,345,000
Day 6 : 3,030,000
Day 7 : 8,975,000
Day 8 : 25,975,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Depuis son exploit, Jay Farber a passé le plus clair de son temps à… le fêter ! Le résident de Las Vegas a commencé par récupérer une partie de ses gains auprès du casino Rio sous la forme de 100,000 dollars, ceci afin de célébrer dignement son accomplissement dans sa boîte de nuit de prédilection avec laquelle il collaborait fréquemment dans le cadre de son job de VIP Manager, le Hakkasan. Depuis sa performance sur le Main Event, Farber mélange travail et loisirs en continuant de bosser de temps en temps avec les boîtes de Vegas, mais c’est surtout bouteille à la main que l’on peut l’y croiser.

Sa seule bouffée d’oxygène loin de Vegas et du poker, Farber se l’est accordée en partant cinq jours à Maui, une île d’Hawaii, avec sa petite amie. Il a ensuite multiplié les fêtes durant deux mois : avec le joueur Sam Stein au Hyde de Vegas, dans la maison de l’acteur/héritier multi-millionnaire Dan Bilzerian à Los Angeles, avec Phil Ivey au Light, et le reste du temps au Hakkasan avec sa bande d’amis afin « de célébrer [son] anniversaire durant un mois ». C’est le 11 août qu’il touche pour la première fois des cartes à nouveau… lors d’une partie de poker Chinois contre Jean-Robert Bellande ! Dépensier, Jay s’offre même le luxe de s’acheter une Mercedes V8 Biturbo. Prix : environ 160,000 dollars. « Je ne dis pas que je prends les bonnes décisions » sourit Jay, « juste les plus drôles. »

Le 16 septembre, il décide enfin de se remettre au travail : « c’est le moment de mieux traiter mon corps et de me préparer pour les WSOP. » Durant la semaine qui suit, il se rendra tout de même à trois reprises au Hakkasan mais passera également du temps auprès de Ben Lamb, joueur de l’année des WSOP 2011, et Jesse Sylvia (2nd du Main Event 2012) afin de préparer sa finale. Une préparation comprenant un visionnage extensif des phases préliminaires des WSOP diffusées sur ESPN, et des simulations de la finale. Après avoir signé avec le site 888poker (tout comme JC Tran et Michiel Brummelhuis), Farber dispute son premier tournoi de poker sur la scène internationale post-Vegas à Enghien-les-Bains à l’occasion des WSOP-Europe, où il ne laissera pas une bonne impression aux observateurs. Jugé « arrogant » et « insolent » par la presse spécialisée, il insultera à plusieurs reprises son voisin de table Eric Sfez, le traitant de « monkey » (comprendre : un naze) dès qu’il remportait un coup. Farber a disputé quatre épreuves dans le Val d’Oise et est le seul November Nine à avoir atteint l’argent sur le Main Event des WSOP-E (34ème place).

Dès son retour à Vegas pour la dernière ligne droite avant la finale, Farber s’est sans surprise attelé à… faire la fête encore allant vider quelques magnums chez son Hakkasan chéri, avant d’y retourner dès le lendemain pour une énième soirée supplémentaire. Sera t-il capable d’arriver en table finale sans gueule de bois ? Question subsidiaire : va t-il réussir à ne pas dilapider ses gains en trois mois ?

L’avis de Ludovic Lacay

« Farber est coaché par le pro Ben Lamb. D’après nos infos, Lamb a du mal à travailler avec lui. Mais c’est peut-être de l’intox volontaire ! On s’est posé la question : « Si tu étais à la place de Ben Lamb et que tu devais coacher un amateur, qu’est-ce que tu lui dirais ? » Evidemment, tu ne vas pas révolutionner son jeu, tu ne vas pas lui apprendre à jouer post-flop. Tu vas lui dire de jouer serré, d’attendre un petit peu avant de prendre du plaisir et d’ouvrir son jeu, des trucs du style « Fais attention, si tu relances, tu vas te faire 3-bet, si tu n’as pas une bonne main, tu 4-bet.» On peut s’attendre à ce que ses adversaires, qui ont tous beaucoup plus d’expérience, tentent de l’amener au flop, c’est là qu’il va être le plus faible. Et s’il devient short-stack, on peut s’attendre aussi à beaucoup d’erreurs de sa part. Du coup, Farber risque malgré lui d’être celui qui dictera le tempo de la finale : comme tout le monde voudra tenter sa chance contre lui, c’est des coups qu’il jouera que naîtront beaucoup de spots de squeeze avant le flop. »

L’avis de Benjo

Alors là, je suis un peu embêté. D’un côté, Farber possède suffisamment de côtés détestables pour que je sois tenté de lui coller d’office l’étiquette de “grand méchant” de cette finale. Déjà, son image de fêtard “à l’Américaine” qui me brosse dans le mauvais sens du poil. Que l’on ne se méprenne pas, j’adore faire la teuf comme tout un chacun, mais les super-mega-clubs de Las Vegas vulgaires et hors de prix où la musique jouée est indigne d’une soirée en camping, très peu pour moi ! Et je ne vous donnerai pas mon avis sur les strip-clubs, je passerais pour un pisse-froid. Mais je ne veux pas non plus jeter ce gros balourd tatoué et musclé de Farber avec l’eau du bain : déjà, son profil d’amateur parmi les pros est un gros plus pour sa côte de sympathie. J’aime les belles histoires de David terrassant Goliath à la table de poker ! Et puis, au niveau du spectacle, Farber sera clairement le joueur dont viendra l’action, l’incertitude, le suspens, comme l’a expliqué Ludo ! Il est donc dans notre intérêt à tous de le voir durer dans cette finale si l’on souhaite un spectacle divertissant. Et puis, comme Farber est le joueur avec le moins d’expérience, il est celui qui sera le plus à même de nous surprendre, en bien. Forcément : ses huit adversaires sont des pros ou semi-pros, on s’attend donc à ce qu’il jouent bien. Farber, lui, n’aura pas cette pression de la performance, et possède une marge de progression beaucoup plus importante que ses confrères finalistes. Il sera donc intéressant de voir quel style de jeu il va adopter. En conclusion : je suis prêt à absoudre Farber de ses défauts s’il range au placard l’attitude arrogante que l’on a récemment pu observer à Enghien lors des WSOP-Europe. Cela serait quand même ballot qu’un mec ayant des biceps plus gros que la tête attrape le melon !

Sources
-Las Vegas Sun - “Local nightlife industry veteran Jay Farber energizes WSOP November Nine
-ESPN.com - “Farber ready for the party of a lifetime”
-PokerPages.com - Jay Farber, Poker Biography
-Palmarès sur PokerPages.com
-WSOP.com - “Getting to know the November Nine : Jay Farber
-Bluff Magazine - “Redefining Run Good with November Niner Jay Farber
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo & Harper

Siège 8 : David Benefield

Tapis : 6,375,000 (short-stack, 16BB)
Origine : Fort Worth (Texas, Etats-Unis)
Âge : 27 ans
Profession : Joueur de poker dilettante, coach poker, entrepreneur et étudiant. Enseigne au sein de la réputée poker school Card Runners. A annoncé en 2009 sa décision de ne plus se consacrer à plein-temps au poker. A profité de son temps libre pour étudier, entre autres, le Chinois et les Sciences Politiques à l’université de Columbia (New York). Il lui reste un an pour obtenir son diplôme. Benefield a aussi investi dans KingsGateEnergy, une boîte spécialisée dans les énergies renouvelables.
Statut : A l’origine pro en cash-games high-stakes online, mais plutôt tourné vers les MTT live depuis qu’il ne se considère plus comme pro à plein-temps.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 633,243$

Twitter : @DWBenefield

Profil

A première vue, David Benefield peut sembler ne présenter que peu d’aspérités avec son parcours ultra-classique, vu et revu chez tant d’autres autour des tables finales de nombre de gros tournois de ces cinq dernières années : un étudiant brillant, sportif de haut niveau, qui découvre le poker avec ses potes à la fin des années lycée, s’y découvre un talent certain en ligne, et abandonne la fac après six mois et une blessure afin de s’y consacrer entièrement, laissant tout le reste derrière. Rien de nouveau sous le soleil du Texas ! Sauf qu’en regardant les choses de plus près, on se rend compte que les choses ne sont pas si simples qu’elles en ont l’air : ce jeune homme de 27 ans n’a en fait jamais réellement eu l’envie d’être un pro à plein temps, malgré un talent largement reconnu par ses pairs depuis longtemps. Déjà en 2009, alors qu’on lui prêtait des gains faramineux sur les grosses tables de cash-game d’Internet (plusieurs millions de dollars sous le pseudonyme de “Raptor”), Benefield annonçait publiquement son intention de faire autre chose. Pas d’arrêter complètement, non, simplement de ne pas laisser son esprit être complètement envahi par les cartes, les jetons, et les frustrations inhérentes à la compétition quotidienne. Des paroles entendues à maintes reprises chez d’autres, mais qui ne sont que rarement suivies d’effets, tant l’inertie est un trait de caractère prononcé chez les jeunes pros du poker. Mais pas chez Benefield : le Texan a bel et bien repris ses études, bûchant d’abord la philosophie et l’économie, puis les Sciences Politiques et le Chinois (langue et culture) à la prestigieuse université de Columbia, à New York, avant de s’installer un temps à Beijing pour un programme d’apprentissage intensif. Résultat : d’après un joueur installé à Macau, Benefield parlerait désormais presque couramment le Mandarin ! Ce qui n’est guère surprenant si l’on sait que quelques années auparavant il avait réussi à maîtriser le… Grec ancien. Le Texan a aussi entrepris d’investir une partie de ses revenus dans l’économie, pariant sur une start-up spécialisée dans les énergies renouvelables. Bref, nous avons affaire à un bosseur, un brillant touche à tout incapable de se satisfaire d’une seule marotte. Une tête bien faite et bien pleine, qui n’a pas délaisse le sport non plus, restant en forme en apprenant la boxe et en faisant régulièrement de l’exercice, s’essayant même au rôle de meneur d’hommes en coachant une jeune équipe de base-ball locale plusieurs mois durant.

Un mot sur les résultats live de Benefield avant cet été, ils ne sont pas complètement anecdotiques. L’Américain a principalement brillé aux World Series of Poker (qu’il dispute depuis 2007) avec plusieurs demi-finales dans plein de variantes (Hold’em, Pot-Limit Omaha, Mixed Games, Six-Max…), une 73e place au Main Event en 2008, et trois finales où il n’a pas fait mieux qu’accrocher les places d’honneur : 6e dans un 5,000$ en 2010, 8e dans un Mixed PLO/NLHE en 2012, et 8e dans le High-Roller à 50,000€ des WSOP Europe organisés à Cannes en 2012.

Parcours dans le Main Event

David Benefield s’est positionné dans les hauteurs du classement dès la deuxième journée du tournoi, et a poursuivi sa lancée lors du Day 3 avant de faire un bond en fin de Day 4 grâce à une paire d’As bien rentabilisée contre deux Dames. Assis dans le Top 20, Benefield parvient à progresser un peu plus durant le cinquième jour, éliminant plusieurs joueurs dont l’ancienne gloire des cash-games Internet, le Suédois Frederick ‘H@££INGGOL’ Halling.

La suite sera plus compliquée pour le joueur Américain, qui se retrouve lanterne rouge en fin de Day 6 avec seulement 15 grosses blindes à sa disposition. Benefield a pourtant empoché quelques pots clés lors de cette journée, notamment avec deux Rois contre As-Dames pour 90 blindes. Mais Raptor en a également perdu, comme celui où il 4-bet à tapis Bruno Kawauti avec As-Valet : le Brésilien n’attendait que ça avec ses deux As.

Condamné à bouger rapidement en début de Day 7, David prend tous les risques, et cela lui réussit. Après avoir volé plusieurs fois les blindes durant les premières orbites en engageant son tapis sans se faire payer, il double avec les As. Non pas sans trembler, car James Alexander, qui a payé le petit tapis de l’Américain avec As-2 de carreau, en trouve deux autres sur le flop, mais aucun autre ensuite. Complètement relancé, Raptor remporte dans la foulée une bataille de blindes cruciale : il pousse ses jetons avec As-3 sur la grosse blinde de Maxx Coleman qui paye avec Dame-Valet assortis et est éliminé aux portes des demi-finales. Revenu dans le ventre mou du classement, David prend alors sa revanche sur Bruno Kawauti, en gagnant un coup de pile ou face avec paire de 3 contre le As-Dame du Brésilien.

Installé en table télévisée principale avec notamment Sylvain Loosli comme adversaire, David joue un jeu très solide (témoin ce coup où il touche une quinte sur un tableau où figure une doublette : il arrive à abandonner sa main sur la rivière après une relance de Sylvain, qui avait lui un full) ce qui lui permet de se hisser en finale du tournoi, avec cependant le plus petit tapis de l’effectif.

Évolution du tapis de David durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 88,025
Day 3 : 261,100
Day 4 : 249,000
Day 5 : 1,675,000
Day 6 : 3,675,000
Day 7 : 1,840,000
Finale : 6,375,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Les trois derniers mois de David Benefield pourraient presque se résumer en deux mots : poker et plage. Quarante-huit heures après avoir atteint la finale du plus beau tournoi au monde, l’étudiant retraité du poker professionnel retrouve son foyer, sa petite amie et son chien à New York. Puis il prépare ses cartons afin de déménager à West Village (toujours dans la Grosse Pomme). Le naturel de David reprend vite le dessus : en vacances début août du côté de Vancouver avec ses potes du milieu (Jason Koon, Ben Tollerene et consorts) où il profite du soleil de la côte ouest Canadienne, David a une furieuse envie de retoucher aux cartes et modifie son vol retour sur un coup de tête afin d’aller jouer quelques tournois en Floride. Il participe notamment au tournoi principal au prix d’entrée de 5,300 dollars du festival Seminole Hard Rock qui regorge de monde (2384 inscriptions) et réalise une petite performance en se classant 173e pour 11,635 dollars de gains.

Il s’envole ensuite pour Barcelone afin de disputer la première étape de la nouvelle saison EPT. Et l’Espagne lui réussit bien : entre deux séances de bronzette à la plage, David effectue trois places payées en terre catalane, et ce dans les trois plus gros tournois du festival - le Main Event à 5,300 euros, le High Roller à 10,300 euros et le Super High Roller à 50,000 euros. Après une courte escale en Allemagne, David repart à Vancouver, pour jouer cette fois les WCOOP - le festival star de tournois en ligne de PokerStars.com (le site étant toujours inaccessible sur le sol américain). Début octobre, il retourne en Europe, à Londres, jouer la seconde étape du circuit EPT. Il y réalise une nouvelle place payée - sa sixième en six tournois ! - en terminant 7e du Super High Roller à 50,000£. Dans un rythme frénétique, David enchaine ensuite avec Paris, ou plutôt Enghien-les-Bains, pour les WSOP Europe. Mais la France ne sourit pas à notre étudiant en Sciences Po qui quitte bredouille la station thermale.

David choisit alors Mexico comme point de chute. Son objectif ? Faire le vide une bonne semaine, puis mettre son plan a exécution, en remportant la finale du Main Event ! Nous n’avons pas d’informations sur la préparation théorique de Benefield en vue de la table finale. Sans doute qu’il a pris le temps de discuter de la partie de poker la plus importante de sa vie avec ses amis professionnels, mais on pourra argumenter qu’un coach aussi réputé que David Benefield n’a peut-être pas besoin d’un autre coach que lui-même pour préparer ce grand rendez-vous…

L’avis de Ludovic Lacay

« ‹ Raptor ›, c’est l’ancien colocataire de Tom « durrrr » Dwan et un énorme joueur de cash-games qui a voulu ensuite se diversifier et essayer les tournois. A la base, il n’a donc pas un style de jeu typique des joueurs de MTT, c’est quelqu’un qui était très bon dans un autre domaine, mais il a du et il a su s’adapter. Il peut donc commettre de petites erreurs… Ou tout du moins, il peut faire des choses qu’un observateur comme moi pourra considérer comme étant des erreurs, mais après, peut-être que je ne comprends pas tout parce qu’il est un cran au dessus [rires] ! Mais oui, il peut faire des choses étranges, surprenantes avec un stack petit ou moyen, entre 10 et 25 grosses blindes. Il entame la finale avec 16 blindes, donc théoriquement c’est lui qui sera le plus enclin à prendre des risques dès le début : il sera sans doute le premier à partir à tapis. Évidemment, le clan Français souhaitera chaudement qu’il perde ce coup à tapis : on préfère un Raptor éliminé qu’un Raptor qui remonte son tapis en ayant la position sur Sylvain ! »

L’avis de Benjo

Le bon élève de la table finale. Difficile de trouver quelque chose à redire sur ce mec manifestement très intelligent, curieux de la vie, sain et propre sur lui (peut-être un peu trop ?), et évidemment très talentueux au poker. Mais il n’en reste pas moins que la chose la plus importante à avoir en tête à son sujet à l’aube de cette finale, c’est que David Benefield est désespérément short-stack avec seulement seize grosses blindes en sa possession pour la débuter. Bien sur, nous avons affaire à un grand joueur, connu des initiés, un mec respecté par ses pairs, un mec suffisamment bon pour être tout à fait crédible dans son rôle de coach pour le site CardRunners, un mec qui roule sa bosse depuis assez longtemps pour avoir eu le temps de se lasser du poker et d’explorer d’autre univers, un mec qui a été en son temps très compétitif dans le milieu opaque des gros cash-games Internet… Mais ses adversaires sont loin d’être des jambons non plus ! Et ils possèdent autrement plus de jetons. Avec son faible capital, la probabilité est plutôt grande que Benefield soit le premier éliminé de cette table finale. Ce qui serait d’ailleurs une bonne nouvelle pour tous les autres, qui, vu son niveau, ont tout sauf envie de le voir faire un come-back.

Sources
-Blog personnel sur CardRunners.com
-Palmarès sur Hendon Mob
-Poker Pages - David Benefield, Poker Biography
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo & Kinshu

Siège 7 : JC Tran

Tapis : 38,000,000 (chip-leader, 95 blindes)
Origine : Né Justin Cuong Van Tran au Vietnam, mais à vécu (presque) toute sa vie aux Etats-Unis, où sa famille a débarqué lorsqu’il avait 2 ans. Basé de longue date à Sacramento (Californie).
Âge : 36 ans
Profession : Joueur de poker. Diplômé (business et management) à l’université de Californie, mais a rapidement bifurqué vers les cartes et jetons.
Statut : Professionnel live ultra-expérimenté, mais a aussi remporté des titres en ligne.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 8,308,259$

Twitter : @jctran23

Profil

8,3 millions de dollars : c’est grosso modo la somme monumentale qu’empochera mardi 5 novembre l’ultime survivant du Main Event des World Series of Poker. Et c’est aussi le total des gains accumulés par JC Tran sur le circuit du poker live au cours des onze dernières années. La statistique pourrait suffire à elle seule pour vous présenter le personnage : nous avons là affaire à un joueur de poker professionnel accompli, qui a réussi à faire ses preuves sur la durée, traversé les modes et courants pour se faire une place enviable dans un milieu qui fabrique plus de victimes que de survivants.

Regardons le palmarès de JC d’un peu plus près, il a été entamé il y a maintenant onze ans : neuf tables finales aux World Series of Poker, dont deux victoires et les bracelets qui vont avec, en No-Limit Hold’em en 2008, puis en Pot-Limit Omaha en 2009. Cinq finales au World Poker Tour, dont une victoire en 2007 à Reno (Nevada), son premier vrai triomphe quatre ans après son apparition sur le circuit et une longue liste de sacres manqués de peu. Joueur formé à l’école du live, Tran a néanmoins récolté des succès en ligne, en témoigne sa victoire en 2006 au Main Event des WCOOP de PokerStars.com, le plus gros tournoi de l’année sur Internet. Quant au Main Event, celui des World Series of Poker, Tran s’y montre d’une régularité hors norme, avec six entrées dans l’argent ces dix dernières années, culminant bien entendu avec sa première accession en finale cette année, au poste de chip-leader incontesté. Ajoutons à cette liste déjà longue une quantité affolante de victoires et finales dans des tournois de second rang, depuis ses premières épreuves à 300 dollars l’entrée dans les cercles de Californie à ses débuts, jusqu’aux super high-rollers à 100,000 balles organisés en Australie ou à Macau. Bref, JC Tran est une machine à gagner, dont la présence en table finale du plus beau tournoi du monde sonne comme une évidence et une confirmation.

Plus jeune rejeton d’une famille de huit enfants ayant fait le grand voyage depuis le Vietnam jusqu’en Californie lorsqu’il avait deux ans, Tran met sa passion pour le poker au crédit de l’un de ses frères, à qui il avait demandé de lui apprendre les règles du jeu une fois atteint l’âge de 21 ans. Assis à une table de Limit à 1$/3$ au Capitol Casino de Sacramento, Tran termina dans le vert sa toute première partie de poker. Le virus était incubé : bientôt, ses études de commerce ne seraient plus qu’un lointain souvenir. “J’ai beaucoup gagné étant jeune, mais je ne connaissais pas la valeur d’un dollar”, dira t-il plus tard en évoquant cette période où l’argent lui filait entre les doigts. Une période qui semble désormais bien loin : après avoir travaillé son jeu comme un forcené dans les petits cash-games et tournois de Californie durant ses années de formation, après avoir connu trois années phénoménales entre 2005 et 2007 où rien ne semblait l’arrêter lors des plus gros tournois Américains, Tran a lâché du lest ces dernières temps avec la naissance de son premier fils, désormais âgé de trois ans. Laissant de côté ces saisons de stakhanoviste qui le voyaient voyager neuf mois par an de tournoi en tournoi et d’aéroport en aéroport, Tran passe désormais la majeure partie de son temps à la maison auprès des siens. Un choix qui pose évidemment de nouveaux problèmes lorsque l’on a choisi la profession qui est la sienne : avant de parvenir en finale du Main Event en juillet dernier, Tran n’avait pas ajouté de résultat véritablement satisfaisant à son palmarès depuis quatre ans, financièrement parlant, et sa bankroll commençait à en ressentir les effets. Une victoire le 5 novembre arriverait donc à point nommé pour véritablement entériner sa décision de consacrer moins de temps aux tables, à l’âge de 36 ans…

Parcours dans le Main Event

JC Tran est LE miraculé de cette finale : rendez-vous compte qu’en milieu de Day 3, l’Américain a perdu un gros pot pour tomber à moins de 7 grosses blindes ! 12,500 aux blindes 1,000/2,000 : autrement dit la quasi-certitude d’une élimination imminente ! Mais Tran s’est tiré du Purgatoire grâce à énorme rush qui l’a replacé dans le peloton, et a ensuite bénéficié d’une importante réussite sur les coups à tapis lui permettant de mettre en place son jeu agressif et d’aborder sereinement les demi-finales du tournoi. L’Américain remporte alors une succession de coups à tapis, dont un déterminant avec une paire de Dix contre As-Roi. Son décollage à la barre fatidique du million de jetons est obtenu avec une top paire tenant bon face à un tirage quinte et couleur. PokerNews a suivi JC Tran durant tout le tournoi, et a mis en avant son jeu agressif, l’Américain remportant de nombreux pots n’allant pas à l’abattage.

C’est en milieu de Day 5 qu’il prend place en table télévisée (une place qu’il ne quittera plus) et remporte un coin flip crucial avec une paire de Dames contre As-Roi. L’Américain dispute en sixième journée une main controversée où il investit un quart de son tapis avant le flop en payant un 4-bet avec une paire de Huit afin de toucher un brelan qui lui permet de doubler sur un adversaire possédant les As. Tran varie ensuite son jeu en slowplayant un brelan floppé pour extraire quelques jetons à un joueur ayant trouvé une top paire sur le turn. Son début de Day 7 est idéal : JC prend de nombreux petits pots et élimine un shortstack en réalisant un gros call avec une deuxième paire tombée contre une hauteur As. Après avoir bien rentabilisé une quinte contre Amir Lehavot, JC Tran est le bourreau du « bubble boy » de la finale : Carlos Mortensen, qu’il élimine avec une quinte contre deuxième paire et tirage couleur.

Évolution du tapis de JC durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 33,100
Day 3 : 119,300
Day 4 : 217,000
Day 5 : 1,141,000
Day 6 : 3,280,000
Day 7 : 11,970,000
Finale : 38,000,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

En publiant sur son compte Twitter la chanson de Wyclef Jean Gone Till November (“Parti jusqu’en novembre”), JC Tran avait donné le ton : il allait se montrer discret jusqu’à la date fatidique du 4 novembre. C’est à la maison, à Sacramento, auprès de sa femme et de son fils de deux ans qu’il a passé le plus clair de son temps, en profitant pour regarder du football à la télé (le faux, celui des Américains !), aller voir des matchs de football (le notre, le vrai !), passer de longs après-midi à pêcher, tâter un peu de la console de jeux, visiter Disneyland et jouer au basket avec le fiston. Au passage, un bonheur n’arrive jamais seul : sa famille va encore s’agrandir avec une seconde naissance est prévue aux environs de la finale ! Bien qu’ayant très peu joué au poker ces trois derniers mois, JC est le November Nine ayant réalisé la plus belle perf’ poker durant la trêve, se classant à la deuxième place du High-Roller de l’étape WPT Seminole Hard Rock (Floride) pour 526,890 dollars de gains. Arrivé à Enghien-les-Bains à la veille du Main Event des WSOP-Europe, il a souffert du décalage horaire et s’est incliné en début de Day 2. Scénario identique sur le High-Roller à 25,600€ l’entrée. Côté sponsor, JC Tran s’est attiré les faveurs de 888 Poker, site majoritairement présent en Europe (mais plus en France) et cherchant à poser le pied aux Etats-Unis maintenant que la législation commence petit à petit à y devenir plus accueillante pour les jeux en ligne. En cas de victoire, Tran n’a pas prévu d’achats bling-bling, préférant investir dans le futur universitaire de ses enfants, et mettre de côté pour sa retraite. “J’ai tout ce dont j’ai besoin”, dit-il.

L’avis de Ludovic Lacay

« J’ai joué plein de fois avec JC Tran. On peut dire qu’il est une version un peu plus live de Marc-Etienne McLaughlin. Il a la même approche : il investit énormément avant le flop, un peu trop à mon goût - c’est donc avant le flop qu’il commet ses rares erreurs. Par exemple cette main durant les phases finales où il 3-bet au bouton avec paire de 8 et paie ensuite un 4-bet beaucoup trop cher - 25% de son stack - pour aller voir le flop. Il a floppé le brelan et a doublé son tapis contre les As, heureusement pour lui ! Je pense que c’est un joueur qui a modifié son style lorsqu’il s’est rendu compte qu’il payait beaucoup trop souvent, alors il s’est mis à 3-bet à la place, avec beaucoup de mains différentes : As-8, paire de 8… Mais sans avoir forcément compris comment s’adapter une fois que ses adversaires ont repéré cette tendance. Aussi, je pense que ce n’est pas le genre de joueur à se baser sur les tells. Il n’y fait pas trop attention. En revanche, JC Tran est très, très fort après le flop. Il a TOUT l’arsenal d’un très bon joueur de cash-game. Il sait toujours quand il possède la main gagnante. Il sait toujours quand il a perdu. Il sait comment gagner des jetons même avec une petite main gagnante, et quand il n’a pas la main gagnante, il sait aussi quand c’est le moment pour créer le bluff qui lui permet de remporter le pot quand même. Il sait aussi faire des hero calls. Il sait tendre des pièges. Il joue bien avec le levier de vitesse, en alternant le slowplay et le fast play. Un vrai malin, il sait tout faire ! Sylvain va donc jouer uniquement en position contre lui, de toute façon il est assis trois crans à sa droite, et deux crans à droite si Benefield est éliminé le premier, donc Sylvain aura la position la plupart du temps. »

L’avis de Benjo

Un pro. Un vrai pro, tels que tous les autres devraient être. D’ailleurs, les autres pros, ils le savent bien : demandez aux joueurs les plus titrés du circuit de dresser chacun une liste de leurs joueurs favoris, JC Tran apparaîtra probablement dans la majorité d’entre elles. Humble, respectueux de ses adversaires, avec une attitude irréprochable à la table et en dehors, avec une efficacité prouvée au cours des années, les titres, et les gains qui vont avec. Et ce style de jeu, mazette ! Comme le dit Ludo, JC Tran sait tout faire, sait adopter toutes les attitudes, toutes les vitesses, passer du mode serrure à l’attaque maniaque, accélérer puis ralentir selon la température de la table, contrairement à tant d’autres joueurs ne sachant jouer que d’une seule manière. Pour le bluffer, il faudra se lever de bonne heure. Et pour espérer le surprendre en bluff, même topo.

Avec un tel pedigree et une telle avance numérique, JC Tran est bien entendu LE favori pour le titre. A 36 ans, il a déjà tout vu, il sait comment gagner une table finale sous les yeux des fans et caméras de télévision, il sait résister à la pression, et inutile d’espérer le voir commettre une erreur fatale, d’autant qu’il ne sous-estimera pas ses huit adversaires, il a bien trop d’expérience pour cela.

En vous présentant Jay Farber, nous évoquions la difficulté qu’ont toujours eu les amateurs à briller dans le Main Event des World Series of Poker. Hé bien, paradoxalement, on peut dire la même chose à propos des têtes de série ! C’est un simple constat mathématique : désormais que le plus gros tournoi du monde rassemble chaque année 6,000 ou 7,000 joueurs, les Negreanu, Hellmuth, Mizrachi, ElkY et autres super-stars des tournois voient leur edge (=avantage) forcément diminué face à la population massive du tournoi. Qu’on ne se méprenne pas : chaque année, la table finale du plus gros tournoi de l’année est composée en écrasante majorité de bons joueurs. Mais il s’agit généralement de bons joueurs de l’ombre, des grinders venus d’Internet, des aficionados du cash-game, des jeunes joueurs venant tout juste de percer, et non pas des “super-stars” du poker établies depuis longtemps. Elle est loin, l’époque ou Doyle Brunson pouvait tranquillement atteindre la finale du Main Event chaque année en n’ayant à battre qu’une cinquantaine de joueurs !

Ainsi, JC Tran tentera réussir là où Phil Ivey et Michael Mizrachi ont échoué ces dernières années : redonner le titre de Champion du Monde a un joueur établi plutôt qu’à un jeune pousse inconnu auparavant.

Sources
-SF Gate - “JC Tran discusses World Series of Poker final table
-ESPN.com - “Family comes first for J.C. Tran"
-Fiche Wikipedia
-Palmarès sur Hendon Mob
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo & Harper

Siège 6 : Marc-Etienne McLaughlin

Tapis : 26,525,000 (troisième position, 66BB)
Origine : Montréal (Québec, Canada) A des ancêtres Irlandais, d’où son surnom “Go Irish Go”.
Âge : 25 ans
Profession : Entrepreneur à multiples casquettes : l’immobilier d’une part, et l’import/export de produits Québécois vers la Chine. Joue aussi en Bourse. Lancera le 31 octobre Québec Mall, site de vente en ligne qui s’adressera lui aussi au marché Asiatique. Possède aussi la fibre artistique : il profite de son temps libre pour concevoir… des tatouages !
Statut : Amateur expérimenté.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 667,168$

Twitter : @Go_Irish_Go

Profil

Cela fait déjà quelques années que la bruyante et joviale province du Québec fait de l’ombre au reste du Canada dans la planète poker, s’adjugeant à elle seule la majorité des grosses performances réalisées par les joueurs venus du pays du sirop d’érable. En témoignent la percée de pros comme Samuel Chartier, Pascal Lefrancois, Jonathan Roy, Jason Lavallee et bien entnedu Jonathan Duhamel, vainqueur de l’édition 2010 du Main Event. Marc-Etienne McLaughlin est le dernier rejeton de cette joyeuse bande à faire les gros titres, en atteignant la table finale du Big One après l’avoir manquée de peu à deux reprises (30e en 2009, 86e en 2011 - le mec semble être plus à l’aise durant les années impaires !). Mais attention, comme le précise lui-même l’intéressé malgré de beaux résultats en live depuis 2009 et une solide implantation au sein de la communauté poker Québécoise (sa petite amie Laurence Grondin est elle aussi une joueuse pro réputée), Marc-Etienne n’est pas un professionnel du poker. Son gagne-pain, se sont les affaires : la Bourse, l’immobilier, et plusieurs affaires d’import/export avec la Chine, pays auquel il vend des produits garantis d’origine 100% locale : sirop d’érable, vodka, . “Le poker est pour moi un hobby. Un hobby qui me rapporte, mais un hobby tout de même”, explique t-il à ESPN.

McLaughlin aurait très bien pu ne jamais tomber amoureux du Texas Hold’em. C’est par hasard qu’il est tombé dans la marmite des cartes et jetons. Comme tout bon caribou qui se respecte, le Québécois est un fan absolu de hockey sur glace, mais la grève décrétée durant la saison 2004/2005 par les clubs de la NHL (National Hockey League, la ligue pro Nord-Américaine) a forcé la chaîne télé ESPN a bouleverser ses programmes, remplaçant crosses et palets par des rediffusions des World Series of Poker. Selon McLaughlin, cette disette sportive a favorisé un boom du poker au Canada.

Passant désormais une bonne partie de son temps libre à jouer, à la fois en ligne et en live, McLaughlin abandonnera ses études de commerce alors qu’il n’était pourtant pas loin du diplôme. Mais, surprise, ce n’est pas le poker qui a motivé cette décision capitale : “J’étais sur plein de projets à la fois, avec des opportunités de business qui se présentaient. J’ai décidé de prendre le risque, et de me lancer direct. Dans la vie comme au poker, j’aime prendre des risques, ça fait partie de ma personnalité”, explique t-il à ESPN.

Ainsi, depuis maintenant quatre ans, l’homme d’affaire McLaughlin traite le poker comme des vacances, un passe-temps fun et lucratif, quelques semaines de respiration par an dans son emploi du temps chargé : cela explique surement son palmarès live, quasiment exclusivement composé de places payées aux World Series of Poker, festival d’été par excellence.

Parcours dans le Main Event

Comme on ne cesse de le marteler, un tournoi ne s’est jamais gagné lors de la première journée. Alors comme beaucoup d’autres, Marc-Etienne McLaughlin a avancé sans faire de bruit dans ce Main Event, montant progressivement son tapis, sans jamais se mettre en péril jusqu’à la bulle, période cruciale que le Canadien a pu aborder avec près de deux fois le tapis moyen.

C’est une fois dans l’argent que le tournoi de Marc-Etienne a cessé d’être un long fleuve tranquille : un coin flip énorme perdu pour un pot de 150 blindes l’a tout d’abord replacé dans le ventre mou du classement. Débuta ensuite un tour de montagnes russes, avec un tapis ne faisant qu’osciller. A 180,000 au plus bas, Marc-Etienne termine finalement ce Day 4 mouvementé à 1,2 million ! Ainsi débutait une longue ascension vers la table finale.

Car durant le Day 5, le Canadien endosse le costume de fossoyeur, évinçant notamment l’agressif Patrick Renkers, en payant avec deux As le 6-bet à tapis du Néerlandais qui avait deux Dames, remportant ainsi un gigantesque pot de 215 blindes. Il s’empare du chiplead par la même occasion mais se positionne finalement en deuxième place dans le classement de fin de journée avec près de 7 millions de jetons. Durant le Day 6, Marc-Etienne continue son travail de sape, éliminant le Danois Simon Ravnsbaek, ou encore Robert Damelian dont la tentative de 4-bet all-in light avec As-8 s’est transformée en sortie de route, le Canadien payant avec une bien meilleure main - As-Dame. Très loose préflop, Marc-Etienne donne le tournis à ses adversaires, comme ce coup où avec 7 et 5, il fait une quinte sur le tableau 8-4-2-6-Roi et soutire 2,5 millions à Jonathan Jaffe.

Rebelote lors du Day 7 : Marc-Etienne enrhume le cerveau de plusieurs joueurs, à l’instar de Chris Lindh qu’il fait chuter en plusieurs temps - un full bien rentabilisé avec Dame-Valet, un As-4 qui trouve un tableau 5-4-4-7-9 et lui permet de gratter 6 millions supplémentaires, et l’estocade finale, un call avec As-9 suite au resteal à tapis pour 3,5 millions de l’Américain qui ne peut montrer mieux que 9 et 10 assortis. Marc-Etienne arrive à 15 joueurs restants avec plus de 20 millions devant lui et une confiance à toute épreuve. Un joli tas de pions qu’il fait fructifier un peu plus encore à grands coups de salves jusqu’à accéder en toute quiétude à la finale avec 26,5 millions.

Évolution du tapis de Marc-Etienne durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 45,300
Day 3 : 154,600
Day 4 : 560,000
Day 5 : 1,223,000
Day 6 : 6,695,000
Day 7 : 5,415,000
Finale : 26,525,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

N’étant pas juste un joueur de poker, Marc-Etienne a profité des trois mois précédant la table finale pour bosser sur ses trois start-ups. Mais avant cela, le Canadien a commencé par prendre un peu de bon temps, revenant à Montréal pour jouer au football, mater du tennis et faire la fête avec ses nombreux amis, dont le champion du monde 2010 Jonathan Duhamel. Puis il a repris ses deux projets d’entrepreneuriat : immobilier et import/export vers la Chine, tout en préparant le lancement du troisième : Quebec Mall, dont l’objectif sera de vendre des produits d’origine québécoise au marché Asiatique. Côté poker, Marc-Étienne a joué de nombreux sit-and-go en ligne afin de se préparer à la finale, mais n’a pas reçu de coaching de la part de Duhamel, qui lui a juste donné un conseil simple : “Profites-en”. C’est à l’occasion des WSOP-Europe à Enghien-les-Bains que Marc-Etienne a joué le plus en live, parvenant à atteindre l’argent sur le 5,000€ No-Limit Hold’em Mixed Max (16ème pour 14,905€). Cela s’est moins bien passé sur le High-Roller, où il a atteint la onzième place alors que dix joueurs étaient payés ! « Je garde ma chance pour Novembre », a-t-il souri après son élimination. En bon homme d’affaires, McLaughlin prévoit de réinvestir ses gains dans ses multiples entreprises, sans se priver néanmoins de participer à quelques très gros tournois de temps en temps.

L’avis de Ludovic Lacay

<< Marc-Etienne sait tout faire, c’est à mon avis LE bon joueur complet de la table finale avec Sylvain. En fait je l’aime bien parce qu’on a un style de jeu similaire : il relance beaucoup avant le flop et paie beaucoup les sur-relances afin de venir mettre énormément de pression sur ses adversaires après le flop. Des deux théories principales du poker en tournoi, il a choisi celle qui préconise d’accumuler un maximum de de chances, de “tentatives”, et ce afin de gagner. Si tu attends les mains, tu attends la chance… Alors que si tu vas voir un maximum de flops, tu la provoques ! C’est ce que préconisait déjà Doyle Brunson il y a 40 ans dans Super System 2, et c’est efficace quand la stratégie est maîtrisée. En gros, Marc-Etienne investit constamment de l’argent à micro-pertes afin d’aller voir les flops, et il essaie de rentabiliser un maximum dès qu’il touche. Contre lui, il faut donc sur-relancer des vraies mains pour lui extraire de l’argent avant le flop. Marc-Etienne va clairement jouer pour gagner… Je pense qu’il va donc commencer par jouer large, un peu à la manière de JC Tran. Il devrait avoir 3-bet un peu plus souvent que la moyenne. N’oublions pas cependant qu’un autre Québécois a remporté le Main Event en 2010, et qu’il sera présent dans les gradins en compagnie de plein de compatriotes : peut-être que ça va lui mettre plus de pression qu’aux autres ? >>

L’avis de Benjo

Un sens de l’humour d’une autre planète, un enthousiasme communicatif, le sens de la fête et de l’accueil, un argot d’une imagination sans limites : les Québécois sont fous, et c’est pour ça qu’on les aime ! Depuis mes débuts sur le circuit international, j’ai toujours eu un faible pour nos lointains cousins Francophones, et la présence d’un de leurs représentants en finale du Main Event garantit à elle seule une ambiance déglinguée dans les gradins. Ceux qui ont déjà assisté à la victoire d’un joueur Québécois aux WSOP ne me contrediront pas, et pour les autres : prévoyez les boules Quiès, le compteur de décibels va s’affoler. Ultra-compétitif, Marc-Etienne McLaughlin n’aura que la victoire en tête sur le podium télévisé, mais il n’en oublie pas pour autant le caractère festif de l’évènement : c’est ainsi qu’il a lancé un concours de costumes pour tous les amis qui viendront le soutenir à Vegas. Le meilleur déguisement remportera un prix !

Sans compter qu’au delà de sa cote de sympathie résolument au beau fixe, McLaughlin est aussi un très bon joueur de poker, propice à créer l’action. Il devrait nous offrir un beau spectacle, et, avec son gros tapis et son style moderne et imprévisible, poser de jolis casse-têtes à ses adversaires…

Sources
-Palmarès Hendon Mob
-ESPN - “Lockout lead McLaughlin to felt”
-WSOP.com - “Getting to know the November Nine : Marc-Etienne McLaughlin
-PokerStrategy - “Parlons de création d’entreprise et de poker avec Marc McLaughlin
-PokerNews - “November Niner Marc McLaughlin on Preparation, Costumes, and More
-Momentum Sourcing : la boîte d’import/export de McLaughlin
-Quebec Mall : le site de vente en ligne de McLaughlin
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo, Harper & Kinshu

Siège 5 : Amir Lehavot

Tapis : 29,700,000 (deuxième position, 74BB)
Origine : Tel Aviv (Israël) qu’il a quittée pour les Etats-Unis à l’âge de 16 ans. Réside désormais à Weston (Floride), et possède la double nationalité.
Âge : 38 ans (cela correspond à l’âge moyen des 6,354 participants au Main Event 2013, mais Amir n’en reste pas moins le joueur le plus âgé parmi les neuf finalistes !)
Profession : Joueur de poker. Diplômé en Ingénerie Electronique à l’université du Texas. A travaillé pour plusieurs boîtes high-tech comme Hewlett-Packard avant de se tourner à plein temps vers le poker, qu’il a découvert en 2004. A fondé son propre site de coaching poker, PokerWit. Etait un joueur d’échecs accompli durant l’adolescence.
Statut : Professionnel depuis 2007.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 1,541,643$

Twitter : @PokerWit

Profil

A l’âge relativement jeune de 38 ans, Amir Lehavot est pourtant le doyen de la table finale du Main Event 2013… Alors que ce chiffre correspond aussi à la moyenne d’âge des 6,352 participants au tournoi ! Cela en dit long sur la place prépondérante qu’ont pris les vingtenaires sur le circuit professionnel ces dix dernières années.

Alors oui, Lehavot sera un “ancien” parmi les petits jeunes peuplant en majorité cette finale, mais il n’en est pas pour autant un dinosaure au poker, ayant véritablement commencer à aimer le jeu en même que beaucoup d’Américains, en 2003, lorsqu’un comptable amateur du Tenessee nommé Chris Moneymaker a fasciné des millions de foyers en devenant le premier joueur Internet à remporter les Championnats du Monde, devant les caméras d’ESPN. A cette époque, Lehavot était au milieu d’une belle carrière d’ingénieur dans la Silicon Valley, travaillant pour des boîtes aussi prestigieuses que Hewlett-Packard. Avec son infinité de concepts mathématiques, le poker a naturellement plu à l’esprit analytique de Lehavot.

Avance-rapide jusqu’en 2007 : Lehavot est au bord du burn out professionnel. A 32 ans, il s’autorise une année sabbatique, et prend ses premières vraies vacances loin du bureau. Une année durant laquelle il va souffler, et prendre de plus en plus de plaisir à jouer au poker en ligne. Passant du temps sur les forums, en particulier le célèbre 2+2, Lehavot progresser, lit des tonnes de livres, et fonde même sa propre communauté, Pokerwit. Douze mois passent et il se rend compte qu’il n’est pas tout à fait prêt à reprendre le boulot. Là, commencent à tomber les premiers vrais gros chèques : Lehavot remporte le fameux Sunday Million de PokerStars, et très vite, on commence à le retrouver régulièrement en finale des plus gros tournois Internet (sous le pseudonyme de ‘AmirSF’). Sa deuxième année sabbatique se termine, et la décision de reconduire ses vacances est encore plus facile que la dernière fois. Lehavot se rend à Vegas pour disputer ses troisièmes WSOP avec le soutien financier d’autres joueurs : il rentre dans l’argent au Main Event, et décide enfin qu’il a trouvé pour de bon un nouveau métier. Il n’aura pas à regretter sa décision : en 2010, il rentre à nouveau dans les places payées sur le Main, puis apparaît en table finale d’un World Poker Tour l’année suivante, qui sera celle de la consécration avec l’obtention d’un bracelet dans la très difficile épreuve de Pot-Limit Omaha à 10,000 dollars l’entrée, pour un prix rondelet de 573,346$. Mais 2011 fut aussi l’année où les autorités Américaines ont décidé de porter un coup d’arrêt aux activités des sites de jeu en ligne étrangers opérant sur le sol Yankee et, comme des milliers d’autres joueurs pros, Lehavot fut contraint et forcé de réorganiser son emploi du temps. Mais cette révolution dans ses habitudes fut accompagné d’un bouleversement personnel d’une nature plus joyeuse : la naissance de son premier fils. Un heureux évènement qui, dira t-il plus tard, l’a mis dans le meilleur état d’esprit possible pour aborder le Main Event 2013.

Parcours dans le Main Event

Le mystérieux Amir Lehavot s’est faufilé comme une anguille en finale du plus beau tournoi du monde. Peu suivi par les médias durant les phases préliminaires, le joueur israélien a toutefois régulièrement alimenté son fil Twitter durant l’épreuve. Après un départ laborieux, Amir a lancé véritablement son tournoi en remportant un gros pot où il s’est retrouvé à tapis avec As-Valet de coeur face à Dame-Valet sur un flop Dame-Valet-7 avec deux cœurs. Avec 100,000 de tapis, Amir finit le Day 2 en roue libre en doublant lors du dernier niveau. Son Day 3 est dans la même veine et Amir ensache 679,000 au terme d’une journée durant laquelle sa progression a été très linéaire.

Avec deux fois et demi le tapis moyen à la bulle, autant vous dire que le doyen de la finale a atteint les places payées sans stresser. Et une fois entré dans l’argent, Amir continue de dérouler, son tapis ne cessant de grossir, encore et toujours. Celui lui permet de terminer le Day 4 avec 1,8 millions de jetons. Son irrésistible ascension se poursuit puisqu’au début du Day 5, il élimine un adversaire sur un flip, paire de Dix contre As-Dame, en se payant le luxe de toucher un carré ! A 3 millions au plus haut, le joueur israélien rallie le Day 6 avec un poil moins - 2,65 millions, grosso modo le tapis moyen à ce niveau du tournoi.

A 45 joueurs restants, Amir s’envole dans le classement en empochant plusieurs gros pots - un 4-bet à tapis préflop ne trouvant pas payeur, un coup où il paye avec une paire de Rois le check-raise à tapis pour 1,4 million de Christopher Kinan sur le flop Dame-9-8 et l’emporte face au 10-7 de l’Américain, ou encore une paire d’As lui rapportant un demi-million de jetons.

Mais son tapis de 7,4 millions à l’entame du Day 7 va fondre comme neige au soleil : Amir commet quelques erreurs, comme ce coup où il 3-bet à 600,000 puis paye avec Valet-Dix de carreau le 4-bet à tapis pour 1,85 millions de David Benefied en possession d’As-Roi de coeur. Au bord du gouffre avec moins de 10 blindes à 20 joueurs restants, Amir effectue alors un come-back retentissant, en doublant avec As-Valet contre les Rois de Matthew Reed, puis en enchainant les mains de premier choix. En deux heures de jeu, l’Israélien multiplie son tapis par dix (de 1,7 à 17 millions) et revient très fort dans la course à la table finale !

En demi-finales, il continue sa marche en avant et relègue Sergio Castelluccio en 14e position, en payant avec les Rois le tapis à 4,4 millions de l’Italien qui n’améliore pas avec As-5. En tête du classement, à la lutte avec Marc-Etienne McLaughlin et JC Tran, il perd bien quelques coups mais ne lâche finalement pas grand-chose en regagnant aussitôt ses pertes. Alors Amir patiente et atteint tranquillement la table finale qu’il débutera avec le second plus gros tapis - 29,7 millions.

Évolution du tapis d’Amir durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 39,550
Day 3 : 201,200
Day 4 : 679,000
Day 5 : 1,783,000
Day 6 : 2,655,000
Day 7 : 7,385,000
Finale : 29,700,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Amir Lehavot est sans aucun doute le November Nine ayant été le plus discret durant l’interlude. Contrairement à la plupart de ses futurs adversaires, on ne l’a pas vu à Barcelone, à Londres ou encore à Enghien-les-Bains pour disputer les grosses compétitions de la rentrée. Amir est d’ailleurs le seul November Nine à avoir fait l’impasse sur la version européenne des WSOP. Le doyen de la finale est cependant sorti de sa grotte fin août pour disputer un énorme tournoi à 5,300$ chez lui en Floride, au casino Seminole Hard Rock. Il faut dire que la cagnotte garantie était de 10 millions. Bonne idée en tout cas : le joueur américain a brillé en se hissant en demi-finales, se classant 16e et remportant 69,810 balles. Amir réapparait un mois plus tard, annonçant sur Internet son intention de vendre des parts de son action en finale : 30% des 80% qu’il lui reste (une partie de son action appartient déjà à ses parents et à l’un de ses amis). Mais avec des conditions très avantageuses pour lui (29,248$ sont demandés pour obtenir 1% de ses gains, l’Américain doit donc finir au minimum 3e pour que cela commence à être rentable pour l’acheteur), la mayonnaise n’a pas vraiment pris, et début octobre, il annonçait n’avoir vendu que 1% des 30% proposés (le pro Faraz Jaka ayant un été l’un des rares intéressés par l’offre)… Depuis, plus de nouvelles du professionnel de 38 ans qui doit sans nul doute réviser ses gammes en vue de la table finale.

L’avis de Ludovic Lacay

<< Un bon joueur, dangereux, qui connaît par coeur l’ICM*. Il a gagné des millions en ligne sur des tournois. Ce n’est pas parce qu’il a 47 ans que c’est le moins expérimenté [NDLR : Ludo exagère, Amir a en fait 38 ans, mais il n’y a bien qu’au poker qu’on peut entendre une phrase aussi antinomique !]. C’est un joueur serré qui ne fera pas d’erreurs. Il ne faut d’ailleurs pas essayer de trop l’exploiter car il n’est pas con. Néanmoins, c’est un spécialiste des structures à trente blindes de moyenne, il va donc surement avoir un gros déficit de qualité son jeu après le flop. J’imagine donc qu’il va jouer serré, bien évaluer la valeur de ses mains afin d’avoir des décisions faciles après le flop et va de temps en temps sur-relancer en bluff. Il ne devrait pas 3-bet plus de 7-8% des mains. >>

* ICM, pour “Independant Chip Modeling" : un modèle mathématique qui, en se basant sur l’échelle des prix d’un tournoi, vient se superposer aux probabilités, et permet entre autres de déterminer qu’il est parfois correct de jeter ses cartes dans certaines situations alors qu’on avait la cote pour payer. Plus d’infos par ici.

L’avis de Benjo

Spécialiste des épreuves multi-tables, que ce soit en ligne ou en live, Amir Lehavot est l’archétype du bon joueur conservateur, posé, sérieux, gérant ses tournois comme le proverbial “bon père de famille”, ne goûtant guère le style super-agressif en vogue depuis quelques années. Il aurait d’ailleurs tort de vouloir faire autrement, car ce style a très bien fonctionné pour lui au cours de sa carrière. En finale du plus gros tournoi de sa vie, Lehavot devrait logiquement redoubler d’attention, et scruter de près l’échelle des prix avant de faire le moindre move. On peut donc supposer qu’il n’offrira pas la prestation la plus flamboyant des neuf finalistes, mais contrairement à son sosie Homer Simpson, il ne devrait pas faire de trucs stupides non plus.

Sources
-ESPN - “Lehavot taking it one year at a time”
-PokerNews - “2013 WSOP November Nine : Amir Lehavot
-WSOP.Com - “Getting to know the November Nine : Amir Lehavot
-Card Player Lifestyle - “2013 November Nine Interview with Amir Lehavot
-Palmarès sur Hendon Mob
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo, Harper & Kinshu

November 9
Les premières images du documentaire

Après la conclusion du Main Event sortira un documentaire consacré à la préparation de Sylvain Loosli et à sa finale. Pour se mettre dans l’ambiance, découvrez quelques extraits…


Siège 4 : Ryan Riess

Tapis : 25,875,000 (cinquième position, 65BB)
Origine : East Lansing (Michigan, Etats-Unis). Vit désormais en Floride.
Âge : 23 ans
Profession : Joueur de poker. A étudié l’hôtellerie à l’université d’état du Michigan, avec comme spécialité le management en casino ! A aussi été caissier dans un supermarché, avant de devenir croupier puis, très récemment, de passer pro après l’obtention de son diplôme.
Statut : Professionnel depuis décembre 2012
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 309,478$

Twitter : @RyanRiess1

Profil

A 23 ans, Ryan Riess est le benjamin de la finale 2013 des Championnats du Monde, et un visage inconnu pour la grande majorité des fans et observateurs. Ces deux paramètres suffisent à faire de lui LE grand favori pour le titre… Du moins pour ceux qui croient à la loi des séries ! Regardons plutôt le pedigree des cinq derniers vainqueurs du Main Event : Peter Eastgate ? 22 ans et inconnu en 2008, l’année de son sacre. Joe Cada ? Il avait 21 ans et sortait de nulle part. Jonathan Duhamel ? 23 ans, et un palmarès presque vierge à l’époque. Pius Heinz ? Personne ne le connaissant avant qu’il ne capture le titre à 22 ans. Et Greg Merson ? Bien malins ceux qui auraient prédire son triomphe à 24 ans sur la foi de quelques places d’honneur accumulées les cinq années précédentes. Bref, si vous êtes du genre à croire que l’histoire se répète, c’est sur Ryan Riess qu’il faut parier.

Le natif du Michigan a appris à jouer au poker dès l’âge de 14 ans, sa fascination pour le jeu ayant pris forme après un séjour familial à Las Vegas. Sa sœur Emilie en témoigne : le petit Ryan a plus ou moins passé ses années lycées à jouer entre amis dans la cave familiale, avant de découvrir les cercles de jeu du coin. Une passion si forte que lorsque est venu le moment de faire le choix crucial de son orientation à l’université, Ryan s’est inscrit dans la branche “Hôtellerie”, avec une spécialité on ne peut plus précise : le management en casino !

Et même si Riess a obtenu son diplôme, ses études, durant lesquelles il se faisait de l’argent de poche en travaillant comme croupier, ne furent pas de tout repos. Une interview récente à CardPlayer laisse entrevoir un personnage enclin aux excès de toutes sortes : “J’étais plus ou moins tout le temps broke à l’université parce que je faisais la tête tous les soirs, et je ne me souciais pas de l’argent”, ajoutant, avec le sens de la formule : “Je crame mon fric comme s’il poussait sur l’arbre de mon jardin.” Durant sa première année de fac, Riess a été jusqu’à se servir de la carte bleue de sa mère lorsqu’elle avait le dos tourné, retirant 200 balles cinq fois de suite pour aller s’assoir aux tables de cash-game à 1$/2$ du casino du coin ! Une somme intégralement perdue, ce qui n’allait pourtant pas calmer ce jeune homme un brin degen : “Après ça, mes parents m’ont interdit de jouer. […] J’ai quand même continué, mais sans vraiment leur avouer puisque je ne jouais plus avec leur argent.”

Avance rapide jusque octobre 2012 : toujours à la fac, toujours sans le sou, toujours prêt à prendre des risques inconsidérés, Ryan Riess tente le tout pour le tout, et pose ses derniers dollars sur le comptoir du casino Hammond (Illinois) pour s’inscrire au tournoi principal d’une étape du WSOP Circuit (une déclinaison des Championnats du Monde jouée un peu partout sur le sol Américain, avec des tournois plus abordables où des bagues sont décernées en lieu et place des bracelets). La veille, Riess avait travaillé jusque onze heures du soir, et un ami l’a convaincu de faire les quatre heures de trajet nocturne jusqu’au Hammond. Incroyablement, ce coup de tête porte ses fruits : Riess atteint la deuxième place (sur 1,523 inscrits) de cette épreuve à 1,675 dollars l’entrée, et remporte plus de 230,000 dollars alors qu’il n’avait que cinquante balles en poche une semaine plus tôt. Si les choses s’étaient passées autrement, vous ne seriez surement pas en train cette biographie, et Riess ne serait pas en train de se préparer pour tenter d’empocher plus de 8 millions de dollars…

Cette première vraie performance entérinera la décision de Riess de devenir professionnel. Il obtiendra tout de même son diplôme deux mois plus tard, conformément aux vœux de ses parents, mais passera l’année 2013 sur les routes Américaines, accumulant les bons résultats sur les étapes WSOP Circuit à Chicago, Las Vegas, Los Angeles la Nouvelle Orléans et dans le Colorado. Et après avoir vécu une ultime cagoule douloureuse aux tables de black-jack et roulette en février (montant de la douloureuse : 50,000 dollars sur une période d’un mois), Riess décidera enfin de ranger au placard cette couteuse addiction. L’été arrivé, il débarque à Las Vegas avec une bankroll qui fait (de nouveau) grise mine, mais parvient à atteindre trois fois l’argent dans les tournois préliminaires, dont une onzième place dans une épreuve à 1,000$, qui lui permettra de financer son inscription pour le Main Event.

Parcours dans le Main Event

Ryan Riess a eu un parcours semé d’embuches sur ce Main Event, le premier de sa jeune carrière, et a dû faire l’étalage de sa palette de joueur complet pour atteindre la finale, multipliant les rencontres difficiles et se retrouvant régulièrement en position de shortstack. L’Américain a twitté bon nombre de ses coups jusqu’au Day 5, puis a ensuite laissé le soin aux sites spécialisées de prendre le relais. Ryan lance son tournoi par un « check-bomb river » (comprendre : check-raise à tapis sur la rivière) avec un carré qui s’est fait payer par une quinte. Son Day 2 est sans grand intérêt, puisqu’il ne « gratte » que 3,000 jetons sur l’ensemble de la journée. C’est le lendemain qu’il met la machine en marche, réalisant un gros (et bon) fold avec deux As, réussissant un hero call avec une deuxième paire, puis doublant avec deux As contre Neuf-Sept à tapis avant le flop.

Ryan aurait pu voir son tournoi s’arrêter en fin de Day 3 quand il a trouvé une paire de Rois avant le flop. Après un 6-bet à tapis de son adversaire, l’Américain décide néanmoins de passer : c’est la bonne décision, son adversaire montre deux As ! Scénario inverse une heure plus tard, Ryan a deux As et son opposant deux Rois… Mais ce dernier ne parvient pas à passer : Ryan double son tapis ! En début de Day 4, Ryan double son tapis avec une paire de Dames tenant bon face à un tirage quinte sur un flop J-9-3, puis il passe la barre du million de jetons en jouant avec audace un coup avec une paire de Huit en main contre Roi-Sept sur un flop 7-3-3.

Ryan va à nouveau passer une paire de Rois, cette fois sur un flop 10-9-7. Son adversaire lui montre un brelan de Neuf. Une fois tombé à 100 joueurs, Ryan change de vitesse et est plus calme dans son jeu. Les retransmissions d’ESPN le montrent éliminer un joueur avec Roi-Dame contre Roi-Valet, perdre le minimum de jetons avec les Valets contre les Rois de Jackie Glazier, mais également faire tapis pour quinze blindes en bataille de blindes avec Sept-Quatre. Ryan est payé par As-Dame, perd la confrontation et tombe dès lors shortstack. L’Américain fait alors le dos rond et se montre très discret durant la fin du Day 6 et l’entame du Day 7, où il figurait parmi les joueurs les plus short. Son beau tapis en finale, Ryan le doit à quatre confrontations à tapis gagnées successivement durant les dernières heures de jeu de l’été : Roi-Dame contre paire de Neuf, As-Dame contre As-Dix, deux As contre As-Dame puis paire de Neuf contre Roi-Valet afin de se mettre définitivement à l’abri. D’après ses dires, Ryan Riess n’a été à tapis payé qu’à quatre reprises seulement durant l’ensemble du tournoi.

Évolution du tapis de Ryan durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 72,250
Day 3 : 75,400
Day 4 : 167,000
Day 5 : 1,078,000
Day 6 : 5,570,000
Day 7 : 3,830,000
Finale : 25,875,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Ryan Riess l’a lui-même avoué : il n’a pas passé énormément de temps à se préparer pour la finale durant ces trois derniers mois, en tout cas pas autant que certains de ses adversaires. Certes, le jeune Américain a pris les conseils de quelques joueurs avec qui il s’est lié d’amitié au cours de ses voyages sur le circuit cette année (Daniel Illingworth, Loni Harwood, Jonathan Taylor…), mais le tourbillon provoqué par son accession en table finale a été beaucoup trop prenant pour qu’il puisse s’arrêter cinq minutes pour faire quelque chose d’aussi rébarbatif que d’élaborer un plan ou étudier en détail ses huit adversaires.

Mettez vous à sa place : du jour au lendemain, le survolté Riess est passé de la galère et l’anonymat à la célébrité et la richesse, avec un prix minimum garanti de 733,000 dollars, plus d’argent qu’il n’en avait jamais eu et la promesse de onze fois plus en cas de victoire. Vu son tempérament explosif, il était évident qu’il n’allait pas patiemment attendre trois mois avant de célébrer son exploit. Aussitôt le costume de November Nine, le voilà qui réserve une table au Pure, la boîte de nuit du Caesar’s Palace, et invite tous ses amis à le rejoindre. Sur le chemin du retour à la maison, Riess est tellement excité qu’il se prend un PV pour excès de vitesse. Dès lors, il ne s’arrêtera plus, enchainant frénétiquement les fêtes et les destinations : deux festivals de musique électroniques, des vacances à Puerto Rico, une boulimie de rencontres de base-ball et de football, un concert de Jay-Z, etc…

Riess ne laissera pas le poker de côté, cependant, disputant le Hollywood Poker Open joué, comme son nom ne l’indique pas, en Floride, puis l’étape WPT de Los Angeles puis celle d’Atlantic City, où il entrera dans les places payées. Comme la majorité de ses collègues November Nine, Riess traversera l’Altantique pour disputer l’édition Européenne des WSOP à Enghien les Bains, sans parvenir à y faire un résultat.

Le tempérament flamboyant de Riess s’est étalé aux yeux de tous sur les réseaux sociaux : Ryan Riess est de loin le plus actif des November Nine sur Twitter. Le jeunot était très, très, très content de son exploit et de sa vie changée du jour au lendemain, et il tenait à ce que tout le monde le sache, décrivant jour après jour son nouveau quotidien et enchaînant à tour de bras les phrases chocs de 140 caractères ou moins. Florilège de ces trois derniers mois : “Nom de Dieu, je viens de me rendre compte que dans 39 jours, je vais gagner le Main Event. Let’s go.” “Les rêves se réalisent.” “Est-ce que ce serait arrogant de porter en finale un T-shirt tout blanc avec écrit ‘Joli logo, bro’ ?”

En cas de victoire, une victoire qui serait pour lui la seule place qui vaille le coup (“Je ne serais pas content de termine deuxième”, dit-il), Ryan Riess promet de rester prudent, et de se cantonner par la suite de tournois à 10,000 dollars l’entrée maximum.

L’avis de Ludovic Lacay

C’est un peu l’inconnue de la finale. Il a 23 ans, et est Américain donc en théorie il n’a pas joué en ligne depuis plus de deux ans. Il joue des tournois du circuit américain - WPT, WSOP… C’est un joueur qui a vraiment confiance en lui. Ca transparait dans les interviews et sur son fil Twitter. Et puis ça va de pair avec la montée en puissance sur son année puisque quand tu enchaines les places payées et que tu fais finale du Main Event, t’es en confiance en principe ! J’ai regardé neuf heures de sa finale au WSOP Circuit : sur toutes les mains qu’il a montrées, il y avait beaucoup de premiums. Toutes les mains qu’il a montrées au Main Event lors du dernier jour, c’était aussi des premiums. Évidemment, ça ne veut pas pour autant dire qu’il joue serré, mais on ne peut clairement pas partir du postulat qu’il va jouer loose durant la finale. Je n’ai repéré aucun tell chez lui. Il joue bien, posé, très concentré et observe tout ce qu’il se passe à la table.

L’avis de Benjo

Il me fait l’effet d’une boule de nerfs, ce Ryan Riess ! Un boulimique qui ne tient pas en place, dans ses mots comme dans ses actes, poussant le bouchon en permanence jusqu’à provoquer l’agacement. Évidemment, il est impossible de gagner le plus gros tournoi de poker du monde si l’on n’est pas persuadé qu’on va le gagner, la confiance en soi est indispensable pour y arriver. Mais les déclarations du genre “Oh, je suis le meilleur, je vais gagner, c’est certain, il n’y a aucun autre scénario possible”, ça va une fois, mais pas dix, et Riess n’a pas arrêté ces trois derniers mois. Allez, on mettra ça sur le compte de l’enthousiasme plutôt que l’arrogance de la jeunesse : on ne va quand même pas reprocher à Riess d’être content de ce qui lui arrive ! Le gamin est conscient que sa place en finale des WSOP représente un alignement d’étoiles exceptionnel, et compte bien profiter de ce qui représente la chance d’une vie entière. Je ne goûte que très peu son Tweeting incessant et vain, mais c’est un défaut qu’il partage avec toute sa génération : que voulez-vous, pour les jeunes d’aujourd’hui ont en permanence n’arrivent semble t-il pas à profiter de la vie, passer de bons moments ou simplement manger un hamburger s’ils n’ont pas à portée de main un téléphone leur permettant de l’annoncer à la Terre entière…

Bref, vous l’avez compris, Riess n’est pas mon November Niner préféré, il me fait même un peu peur : les évènements qui l’ont mené à la finale des WSOP tiennent d’un enchaînement d’effets papillon tenant du miracle, et il ne faudrait pas que ses mauvaises habitudes et ses excès reprennent le dessus après novembre, car après être monté si haut, plus dure serait la chute…

Sources
-CardPlayer - “WSOP Finalist Ryan Riess : ‘I just blow money like it grows on the three in my backyard’”
-Bluff Magazine - “Catching up with November Niner Ryan Riess in Europe
-Detroit News - “Michigan’s Ryan Riess ‘the Beast’ places no limits on his poker fortunes
-ESPN - “From Circuit to stardom”
-Profil sur Hendon Mob
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo, Harper & Kinshu

Siège 3 : Mark Newhouse

Tapis : 7,350,000 (huitième position, 18BB)
Origine : Chapel Hill (Caroline du Nord, Etats-Unis) Réside désormais à Los Angeles (Californie).
Âge : 28 ans
Profession : Joueur de poker, ancien étudiant à l’université d’Appalachian State (Caroline du Nord)
Statut : Professionnel depuis 2005/2006
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 2,004,276$

Twitter : @mark_hizzle

Profil

Avoir du succès au poker… Quelque chose d’à la fois extrêmement difficile et hasardeux, dans un univers où chaque belle histoire est l’arbre qui cache une forêt de déceptions. Beaucoup d’appelés, très peu d’élus, et même pour ces élus, le succès ne signifie pas pour autant le bonheur. Demandez à Mark Newhouse qui, à 28 ans à peine, fait figure de survivant dans ce milieu carnassier où le bord de la falaise n’est jamais bien loin. Loin d’un JC Tran ayant gagné de manière régulière tout au long de sa carrière, loin d’un Amir Lehavot, arrivé au poker sur le tard après une belle carrière d’ingénieur, et surtout loin d’un Ryan Riess, lancé comme un boulet de canon sur le devant de la scène alors que sa vie d’adulte vient à peine de commencer; Mark Newhouse est le seul des finalistes ayant goûté non seulement au succès dans le poker, mais aussi à son amère gueule de bois.

L’histoire de Mark Newhouse commence de manière classique il y a une dizaine d’années : en plein boom post-Moneymaker, toute l’Amérique chope la fièvre du poker en ligne et Mark, alors tout juste entré à l’université, se crée un compte sur PartyPoker, leader mondial de l’époque. C’est une période rêvée pour prendre au sérieux les subtilités du Texas Hold’em : les tables sont remplies jour et nuit, il y a de l’argent à se faire pour qui est prêt à y mettre les heures et le travail. “J’ai tenu deux semestres à la fac”, explique Mark à ESPN. “Le second, je n’ai quasiment fait que jouer. Sur une période de deux mois, j’ai gagné plus de 100,000 dollars.” Un rush qui convaincra Mark de plier bagages, quittant son dortoir de Caroline du Nord pour Los Angeles, ses plages, ses palmiers, et surtout son Commerce Casino, la plus grande salle de poker du monde.

A cette époque, le terrain de jeu préféré de Newhouse est le cash-game en Limit Hold’em. En ce sens, cela fait de lui un joueur résolument old-school malgré son jeune âge : il faut savoir qu’aux Etats-Unis, les tournois ne constituent qu’une mode récente, et le cash-game en Limit a été jusqu’il y a une dizaine d’années LE format de poker le plus répandu de New York à LA, fabriquant des générations entières de pros, depuis les “fonctionnaires” des petites tables à 5$/10$, jusqu’aux superstars du Big Game du Bellagio, où les enchères sont parfois montées aussi haut que 50,000$/100,000$.

C’est un fait historique : la popularité du poker a culminé aux Etats-Unis entre 2005 et 2006. Une période dorée où les sites de poker en ligne ouvraient toujours plus de tables, où tous les casinos de Vegas ouvraient ou agrandissaient leurs salles de poker, où les tournois live aux cagnottes se chiffrant en millions poussaient comme des champignons. Tous les joueurs de cash-game se mettaient aux tournois, alléchés par la taille inédite que prenaient les prize-pools, tandis que les gagnants des dits tournois ne manquaient jamais d’aller se délester d’une partie de leurs profits en cash-game, à des tables où ils étaient loin d’être au niveau. Bref, tout le monde voulait jouer, et tout le temps : Mark Newhouse était au bon endroit au bon moment.

A Los Angeles, les choses se passent bien pour lui : Newhouse grimpe les échelons à toute vitesse, gagne beaucoup d’argent, et s’installe durablement aux tables de Limit du Commerce, jouant parfois aussi cher que 800$/1,600$ (cela correspond à des blindes 400$/800$). Les WSOP 2006 arrivent : personne ne le sait encore, mais ce seront les plus gros de l’histoire avec plus de 8,700 inscrits au Main Event. Newhouse reste cependant à l’écart du cirque du Rio : c’est pour tables de cash-games du Bellagio, rendues juteuses par le voisinage des WSOP, qu’il a fait le voyage. Cela ne l’empêchera pas d’atteindre la finale du tout premier tournoi de sa vie (5e dans un Limit à 3,000$) et de participer au Main Event.

En octobre de cette année, Newhouse prend l’avion jusque Atlantic City. La Mecque du poker de la côte Est accueille une grosse étape du World Poker Tour à 10,000 dollars l’entrée. Comme d’habitude, Newhouse est fixé sur le cash-game, mais s’inscrit tout de même au tournoi parmi 544 autres joueurs. Il traitera l’épreuve par dessus la jambe, songeant à “balancer” ses jetons à plusieurs reprises, pour finalement… la remporter ! Sur la photo souvenir, Newhouse affiche un sourire incrédule, liasses de billets en main. Ce sera son dernier sourire en public avant de longues années.

Car la lune de miel sera brève, trop brève : Newhouse dégringolera la montagne aussi vite qu’il l’avait gravie. Revenant à Los Angeles enrichi de 1,5 millions de dollars, Newhouse plonge la tête la première dans des parties de plus en plus chères. Il perd de l’argent, prête de l’argent qu’il ne reverra jamais, monte de limite pour “se refaire”, perd encore, joue mal, fait la fête trop souvent, pour finir par sombrer complètement. “J’ai vraiment commis toutes les erreurs qu’il était possible de commettre”, dira t-il avec le recul.

C’est ainsi que trois mois après son sacre au World Poker Tour, la rumeur chuchote sur Internet que Mark Newhouse serait déjà ruiné. Dur retour à la réalité pour Newhouse qui, une fois les impôts payés sur sa victoire, se rend compte qu’il vient d’engloutir près de 2 millions de dollars en trois mois. Pire : bientôt, il sera endetté jusqu’au cou, après avoir commencé à cramer l’argent des autres une fois qu’il en avait eu fini avec le sien.

21è siècle oblige, les tourments de Mark Newhouse ont été étalés au grand jour en quasi direct sur Internet, la communauté poker Américaine commentant jour après jour sa descente aux enfers avec une goguenardise macabre. Fouillez un peu les tréfonds de l’Internet, et vous trouverez des traces de cette déchéance 2.0, où l’on devine entre les lignes un Mark Newhouse insouciant comme le sont tous les gens de son âge, un peu paumé, très naif et prêt à croire les yeux fermés des discours de fréquentations dont l’intérêt était surtout pour son porte-monnaie.

Sept ans plus tard, Mark Newhouse commence à peine à sortir du trou qu’il s’était lui-même creusé, mettant derrière lui le cadeau empoisonné que fut son triomphe prématuré à 21 ans. Désormais plus calme, plus posé, et aidé par des amis joueurs comme Huck Seed et Joe Cassidy, Newhouse s’est patiemment reconstruit au cours de ses dernières années, apprenant à mieux gérer sa bankroll, remboursant petit à petit ses dettes, et continuant de grinder les tables du Commerce Casino. Encore aujourd’hui, la rumeur lui prêt des dettes de stacking affolantes, certains n’hésitant pas à affirmer que seule une victoire au Main Event lui permettrait de rembourser tous ses créanciers. Interrogé sur le sujet par votre serviteur lors d’une rencontre fortuite, Newhouse a balayé ses allégations d’un revers de la main : “Je ne vois pas comment je pourrais avoir accumulé des dettes en stacking puisque je n’ai joué que trois ou quatre tournois par an ces dernières années. Et mes stackeurs pour le cash-game sont très contents jusqu’à présent.” Newhouse nous a aussi révélé qu’il possédait 50% de son action dans ce Main Event.

Parcours dans le Main Event

Avant-dernier au classement au départ de la table finale, Mark Newhouse a effectué un parcours tumultueux, connaissant des hauts et des bas durant les sept journées de compétition. Il faut dire que l’Américain est particulièrement « chaud d’action », comme l’atteste la première main rapportée par PokerNews à propos l’Américain, où il a envoyé un 4-bet avant le flop avec Dame-Valet avant de payer le 5-bet à tapis de son adversaire qui possédait deux Rois. Mark perd alors un quart de son tapis, tombant sous le million de jetons, puis double plus tard à la faveur du plus classique des coin flip : As-Roi contre paire de Dames.

La suite ? Un pot énorme remporté avec Valet-Sept contre Valet-Dix sur un tableau J-3-9-7, lui permettant de grimper à 4,5 millions de jetons en début de Day 6. Mark perd ensuite une succession de pots, dont cette main où il relance avec deux As et que le flop vient [8s][9s][2d]. La petite blinde mise, la grosse relance, et Mark sur-relance à son tour. Ses deux adversaires font alors tapis et il passe sa main après avoir investi presque un tiers de son tapis ! Bonne décision : Mark faisait face à [Qs][2s] et un brelan de 2. Au début du Day 7, Mark figure parmi les plus petits tapis et est sauvé par la rivière lorsqu’il part à tapis avec As-Deux, est payé par les Neufs de Jay Farber, et trouve une quinte à l’issue d’un tableau K-J-10-6-Q.

C’est le début du rush : il va ensuite prendre la quasi-totalité du tapis du chipleader Anton Morgenstern en remportant coup sur coup deux flips avec As-Dame contre 88, puis avec une paire de 2 contre As-Valet. Il devient alors chipleader avec 21 joueurs restants ! Une place qu’il ne va pas conserver longtemps, laissant filer d’innombrables pots de taille moyenne. Durant les trois heures suivantes, il perdra les trois quarts de son tapis et retrouvera le wagon des shortstacks alors que débutent les demi-finales ! Mark prend dès lors la décision de jouer le tournoi “comme un satellite pour la table finale” et s’accroche à son maigre tapis. Il atteint ainsi l’ultime table à dix joueurs avec cinq blindes et demie qu’il parvient à doubler avec As-Six contre le Dame-Quatre de Sylvain Loosli. Quelques vols supplémentaires lui permettent d’être November Nine avec un tapis de 18 blindes. C’est pas beaucoup, mais c’est déjà ça.

Évolution du tapis de Mark durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 77,075
Day 3 : 110,500
Day 4 : 441,500
Day 5 : 1,611,000
Day 6 : 2,035,000
Day 7 : 5,785,000
Finale : 7,350,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Barcelone, Ibiza, Nice, Monte Carlo, Florence, Regensburg, Munich, Kiev, Chypre, Marbella, Gibraltar, Casablanca, Marrakech, Londres, Manchester, Paris : Mark Newhouse remporte de très loin la course au frequent flier miles durant les trois mois qui ont précédé la table finale, enchaînant les grandes villes touristiques Européennes avec une frénésie de gagnant du Loto. Certes, l’Américain a profité de son long séjour loin de la maison pour jouer quelques uns des tournois programmés à la rentrée de notre côté de l’Atlantique, comme l’EPT Barcelone, le WPT Marrakech, l’EPT Londres (où il se classe en 54e position) et bien sur les WSOP Europe (avec une 12e place dans le Mixed Max Hold’em), mais c’est avant tout des vacances qu’il s’est autorisé après avoir accompli l’exploit d’une vie. Peut-être parce que sa situation actuelle ne lui avait pas permis d’en prendre des vraies depuis longtemps ?

Toujours est-il qu’après une longue période de morosité, Newhouse comptait bien profiter d’une certaine liberté retrouvée, sans laisser la perspective de la finale des WSOP le tourmenter trois mois durant. Peut-être parce qu’il estime en avoir vu d’autres au cours de toutes ces années passées à jouer professionnellement, peut-être que la faiblesse relative de son tapis (18BB blindes) ne l’autorise pas à se voir comme un favori et donc à le mettre sous pression, mais toujours est-il que, de tous les finalistes de cette édition 2013, Mark Newhouse est le joueur ayant consacré le moins de temps à se préparer pour la dernière table. Pas de coach, pas de simulations de la partie avec des potes joueurs, pas de calculs mathématiques savants, et encore moins de tableaux Excel récapitulant tous les scénarios possibles : c’est les mains dans les poches, ou presque, que Mark Newhouse se pointera au casino Rio le 4 novembre prochain.

L’avis de Ludovic Lacay

<< On a pu le voir jouer de manière super agressive avec un stack de taille moyenne durant les phases finales du Main Event, et on l’a vu commettre pas mal d’erreurs mathématiques lors des retransmissions ESPN, ou sur le reportage écrit de PokerNews, ce qui est surprenant pour un ancien spécialiste en SNG et MTT online. Comme par exemple un « cold 4-bet » puis call à tapis avec As-2 et seulement 25 blindes, ce genre de trucs. J’ai pu jouer avec lui lors des WSOP Europe et je ne pense pas qu’il soit un excellent joueur deepstack. Il joue très vite, surement l’héritage des heures passées à jouer en Limit Hold’em en cash-game. >>

L’avis de Benjo

J’avoue avoir un faible pour Mark Newhouse, l’âme tourmentée de cette finale. Un mec qui a connu l’enfer, un enfer qu’il a en grande partie crée de toutes pièces, un mec qui a déjà connu tant de désillusions à 28 ans à peine, et à qui la vie est en train d’offrir une chance de repartir de zéro : l’histoire est belle, on dirait du Rocky, les Américains vont adorer. Je suis intrigué par son approche décontractée de la finale : alors que la plupart de ses huit adversaires ont cravaché dur ces trois derniers mois, lui a pris des vacances, essayant d’oublier le plus possible l’échéance. J’espère en tout cas que ses erreurs de jeunesse sont bel et bien derrière lui et que Newhouse ne sera plus jamais broke. Car en regardant de près, on se rend compte que même une victoire ne le tirerait pas d’affaire, financièrement parler. Déjà, il faudrait retirer d’emblée 30% des 8,3 millions (pour les impôts de l’Oncle Sam), et ensuite amputer la moitié de ce qu’il restera (pour ses stackers. Ainsi, il ne restera plus à Mark Newhouse “que” trois millions de dollars, à peine plus que ce qu’il a réussi à dilapider en quelques mois la dernière fois qu’il a gagné un tournoi ! Et encore, je n’évoque ici que le scénario le plus rose, celui de la victoire, sachant que Newhouse entame la finale avec moins de vingt blindes et des adversaires aussi, voire plus affutés que lui.

Sources
-newsobserver - “Chapel Hill’s Mark Newhouse heads to World Series of Poker”
-ESPN - “Newhouse’s road to redemption”
-Palmarès sur Hendon Mob
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo, Harper & Kinshu

Siège 2 : Michiel Brummelhuis

Tapis : 11,275,000 (septième position, 28BB)
Origine : Amsterdam (Pays-Bas). Né un peu plus au sud, à Nieuwkoop.
Âge : 32 ans
Profession : Joueur de poker. A étudié l’économie à Utrecht.
Statut : Professionnel depuis 2007
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 671,706$

Twitter : @brummel2

Profil

Michiel Brummelhuis est le premier joueur Néérlandais à atteindre la table finale des Championnats du Monde, venant d’un pays où le poker professionnel tourne quelque peu en rond depuis un bon moment, entre ses vieilles gloires dépassées (Marcel Luske), ses grands espoirs ayant surtout déçu (Lex Veldhuis), ses étoiles filantes (Peter De Korver), et ceux dont on se demande s’ils ont jamais été gagnants au poker un jour (Noah Boeken).

Deuxième rejeton d’une famille de trois enfants, Michiel découvre le poker lors de ses études d’économie à Utrecht, ville dont il tirera son pseudo, ‘Utreg’. A l’époque, Michiel cultivait une passion coupable et couteuse pour les jeux de casino, la roulette et le black-jack en particulier. Lorsque des amis lui ont dit qu’il était tout à fait possible de gagner plusieurs centaines d’euros en une soirée de poker en ligne, il ne lui en fallait pas plus pour s’y jeter la tête la première. Nous étions alors en plein milieu du “boom Moneymaker” : les tables de poker virtuelles d’Internet se multipliaient chaque jour, remplies de joueurs voulant imiter le comptable Américain, premier Champion du Monde issu d’un tournoi de qualification en ligne. “Nous n’avions pas Internet à la maison, alors je jouais dans les cybercafés, je lisais les forums, je commandais des livres pour apprendre”, explique Michiel, dont le nouveau hobby n’était au début pas tout à fait du goût de ses parents : “Ils savaient que j’avais un tempérament de joueur, ils n’étaient pas très contents d’apprendre que je m’étais mis au poker.” En prenant le poker au sérieux, Michiel parviendra néanmoins à laisser derrière lui les jeux de casino EV-, tout en conservant une approche stratégique favorisant les prises de risque.

Comme nombre de joueurs de sa génération ayant beaucoup gagné sur Internet en un laps de temps relativement court, Brummelhuis décidera sans état d’âmes de lacher ses études à 26 ans, pour consacrer tout son temps au poker. Alternant entre le cash-game et les tournois, il ne tardera pas à récolter ses premiers succès en live, atteignant les demi-finales du défunt EPT de Dublin en 2007, avant d’atteindre la finale d’une épreuve à 1,500$ des WSOP l’année suivante. Brummelhuis retournera ensuite à la maison pour disputer les Summer Classics d’Utrecht, où sa bankroll prendra un sérieux coup de boss avec une deuxième place dans une épreuve à 200 euros l’entrée (pour 17,100€ de prix) et surtout une victoire dans le tournoi principal du festival pour un chèque de 63,810 euros. Pendant ce temps, les choses se corsent en ligne. L’effet de mode s’estompe, les joueurs progressent et les parties deviennent de plus en plus difficiles : Michiel doit affronter le downswing, période redoutée par tous les joueurs pros. Il tirera les enseignements nécessaires de ces moments de doute, améliorant la gestion de sa bankroll et redoublant d’efforts pour renforcer son jeu.

Après une autre table finale aux WSOP durant l’été 2009 dans l’épreuve de Limit Hold’em à 10,000 dollars l’entrée, Brummelhuis récoltera le plus gros gain de sa carrière live pre-November Nine en atteignant la quatrième place du très relevé tournoi High-Roller de la PCA 2010 (Bahamas), pour un prix de 154,350 dollars. Durant les mois qui ont précédé le Main Event 2013, on a pu le voir briller à nouveau sur le sol Hollandais, avec des finales et victoires lors de tournois organisés à Amsterdam, Venlo et Utrecht.

Très apprécié au sein de la communauté des joueurs Hollandais, Brummelhuis n’était même pas certain de se rendre à Vegas pour disputer les WSOP 2013 jusqu’aux derniers jours de juin, avant de finalement décider qu’il ne pouvait faire l’impasse sur le Main Event. Le Hollandais n’a pas fait appel à des sponsors privés (stackers) pour le disputer, n’ayant vendu ou échangé que 10% de son action à une poignée d’amis. Il repartira donc de Vegas en homme riche, peu importe son résultat final.
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Parcours dans le Main Event

Un départ canon avec un Day 1 durant lequel il multiplie par trois sa cave de départ, suivi d’un Day 2 et d’un Day 3 du même acabit : Michiel Brummelhuis connait un début de tournoi prometteur qui lui permet de rentrer dans l’argent sans trop de difficulté. Mais il est alors freiné en fin de Day 4, notamment à la suite d’un 4-bet fold onéreux face à Bradley Myers.

Avec 20 blindes à l’entame du Day 5, Michiel remonte petit à petit la pente puis remporte un flip ô combien décisif face à Rep Porter, As-Roi contre deux Dames pour un pot de 100 blindes. Une petite revanche pour le Néerlandais qui avait été éliminé par l’Américain en 2008 lors de la finale de l’épreuve Short-Handed à 1,500 dollars. C’est d’ailleurs Porter qui avait remporté le bracelet à l’époque. Avec plus de 2 millions de jetons, Michiel revient au-dessus de la moyenne. Mais il rechute très vite, en cédant la moitié de son capital à Jonathan Jaffe, la faute à une paire d’As sous-jouée qui se heurte à une couleur chez l’Américain. Heureusement, un drôle de main disputée contre Annette Obrestad le remet immédiatement en selle : un pot 3-bet avant le flop avec 7-6 dans lequel il attrape une quinte sur le tableau 5-10-4-3-8 alors que la Norvégienne a elle trouvé deux paires avec 10-8 !

De retour à 2 millions, Michiel repart de l’avant et ne manque pas d’achever au passage Annette Obrestad (paire de Rois contre paire de 5) : il conclut finalement la journée avec près de 3,5 millions. Dès le début du Day 6, une rencontre entre ses deux Dames contre les deux Valets de Tyler Cornell lui permet d’éliminer un adversaire supplémentaire, mais surtout de se rapprocher des 5 millions de jetons. Seulement, un coup du sort vient pénaliser le Hollandais qui perd brusquement 40% de son tapis : un nouveau coup à tapis avant le flop où sa paire de Dames se fait dominer par la paire de 10 de Rep Porter (encore lui !) qui trouve l’un de ses deux outs sur le flop. Le Day 6 se termine et tout est à refaire pour le Néerlandais.

Michiel n’abdique pas et se retape en remontant à plus de 3 millions grâce à un squeeze à tapis non payé après une relance de Sylvain Loosli et deux calls derrière. En imprimant une dynamique très agressive, notamment préflop, le Néerlandais parvient à grimper, grimper, grimper, jusqu’à atteindre les 12 millions de jetons. Le problème est qu’il rechute à moins de 6 millions tout aussi rapidement, abandonnant une partie de son tapis au fantasque Carlos Mortensen.

Arrive alors la main clé de ce Day 7 : un coup où il est mis à tapis par Sylvain Loosli sur un flop Valet-6-10 avec deux trèfles, et décide de payer avec Valet-9 alors que le Français est loin devant avec As-Valet. Mais un 8 sur le turn et un 7 sur la river offre une quinte à Michiel qui double son capital. Un petit miracle à 12 joueurs restants qui lui permet trois heures plus tard d’accéder en finale du tournoi avec un peu plus de 11 millions de jetons, soit moins de trente blindes.

De son propre aveu, Brummelhuis a beaucoup bluffé tout au long de ce Main Event, et, heureusement pour lui, “ils ont tout fonctionné”.

Évolution du tapis de Michiel durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 95,225
Day 3 : 309,500
Day 4 : 666,000
Day 5 : 327,000
Day 6 : 3,485,000
Day 7 : 2,245,000
Finale : 11,275,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Après la finale, Michiel Brummelhuis s’est vite empressé de rejoindre sa femme Anne Marijn, enceinte jusqu’aux yeux, avant de refaire surface deux semaines plus tard en annonçant sa signature avec 888poker, le site sur lequel il a fait ses armes en ligne, c’était en 2004 (à l’époque, le site s’appelait Pacific Poker, cela rappelera des souvenirs aux anciens). Ne délaissant pas l’aspect “communication” de l’opération, le Néerlandais a lancé dans la foulée son site internet, une vitrine complète de son parcours durant les WSOP, avec son lot de photos et d’interviews. Et puis forcément, en attendant la naissance de son fils, Michiel a fini par remettre le pied à l’étrier, en ligne tout d’abord, sur les tournois de son nouveau sponsor, avant de regoûter aux joies du live début septembre en prenant part à une épreuve à 1,000€ l’entrée dans le quartier balnéaire de La Haye. Sans trop de conviction. Et pour cause, le même jour - un vendredi 13 - Michiel devient père du petit Gerrit Thijmen, son premier enfant ! Une naissance heureuse qui ne l’empêchera pas de passer les soirées qui suivent à jouer en ligne. Obligation contractuelle ou échappatoire aux contraintes parentales ? Quoi qu’il en soit, Michiel ne met pas de côté son gagne-pain et abandonne sa petite famille début octobre pour aller disputer l’EPT Londres. Il retourne ensuite aux Pays-Bas jouer à Breda un tournoi mineur où il atteint la finale (5e), puis fait un passage éclair en France, à Enghien-les-Bains, pour prendre part au tournoi principal de l’édition européenne des WSOP, où il revoit la plupart de ses futurs adversaires qu’il avait quittés le 15 juillet dernier. Éliminé dès le premier jour de compétition, il ne fait pas de vieux os et rentre vite chez lui. Le temps de se ressourcer quelques jours avec les deux amours de sa vie et Michiel sera fin prêt pour la partie de poker la plus importante de sa carrière.

L’avis de Ludovic Lacay

<< En ligne, on le connaît depuis longtemps sous le pseudonyme d’ « utreg ». Il jouait en 10$/20$ à la grande époque d’H@LLINGHOL et compagnie, en 2006/2007. Par la force des choses, il s’est ensuite reconverti en partie dans les tournois online. Ce n’est clairement pas le joueur le plus aguerri de la table au jeu moderne de tournoi, mais il possède en revanche plein de réflexes des bons joueurs de cash-game : il 3-bet énormément, pour des montants différents de ceux des joueurs de tournoi, il défend énormément ses blindes, il recherche les flops, et ne va donc pas souvent 4-bet. S’il fait grossir son tapis, il va prendre confiance et pourra se révéler être très chiant à jouer. A noter qu’il est devenu père durant l’été : est-ce que cela va influencer son mental pour la finale ? Je ne pense pas, mais toujours est-il qu’il « kiffe la life » en ce moment. C’est un mec bien que je connais depuis longtemps par l’entremise d’un ami commun, Lex Veldhuis. En 2007, on avait tous les deux été loin dans l’EPT de Dublin, il avait terminé 18ème et moi 11ème. C’est contre Brummelhuis que Sylvain va potentiellement jouer des batailles de blindes hors position. C’est quelque chose dont on a beaucoup parlé avec Sylvain, je ne peux pas révéler avant la finale tout ce dont nous avons discuté, mais énormément de scénarios ont été abordés ! >>

L’avis de Benjo

Pour ceux qui n’en étaient pas encore convaincus, j’espère que la lecture quotidienne de ces présentations détaillées ne laissera plus de place au doute : nous avons affaire à la finale du Main Event la plus relevée depuis très, très longtemps, avec un casting croulant sous le talent. Chacun aura la chance de pouvoir tirer son épingle du jeu, y compris l’unique amateur de la table, Jay Farber, qui dispose d’un très gros tapis. Dans cette situation, bien malin celui qui pourra prédire l’issue de la partie !

Avec ses trente blindes, Brummelhuis est dans une position difficile en ce début de finale : il ne voudra pas prendre le risque de sauter le premier puisque deux joueurs possèdent moins de jetons que lui, mais ne voudra pas non plus se laisser neutraliser par ses adversaires durant les premiers tours de jeu. J’ai hâte de voir comment le Néerlandais abordera ce moment crucial qu’est l’entame du match : peut-être que ses instincts naturels de gambler prendront le dessus et le pousseront à tenter le tout pour le tout rapidement.

Sources
-Un immense merci à Frank Op de Woerd (PokerNews Pays-Bas) pour sa précieuse aide à la préparation de cet article.
-WSOP - “Getting to know the November Nine : Michiel Brumellhuis”
-ESPN - “Playing for family and country”
-Palmarès sur Hendon Mob
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo & Kinshu

Siège 1 : Sylvain Loosli

Tapis : 19,600,000 (sixème position; 49BB)
Origine : Toulon, France. Réside à Londres depuis 2011.
ge : 26 ans
Profession : Joueur de poker. Diplômé en 2009 à l’Institut National des Télécommunications d’Evry (filière management), titulaire d’un Master en Marketing & Stratégie obtenu en 2010 à Paris Dauphine. Après un séjour Erasmus en Slovénie, a fait plusieurs stages, chez Nokia notamment. A investi une partie de ses gains au poker dans deux start-ups lancées par des amis.
Statut : Professionnel depuis 2010 et l’ouverture du marché de jeux en ligne en France.
Gains en tournoi live (avant le Main Event) : 2,350 petits euros pour une 24e place lors d’un tournoi annexe à 2,000€ l’entrée dans le cadre de l’EPT Deauville 2011.

Twitter : @SylvainLoosli

Profil

Les joueurs Français se doivent-ils de sortir de nulle part pour espérer atteindre la finale du plus gros tournoi de poker du monde ? Tout comme Antoine Saout en 2009, c’est avec un palmarès (quasi) vierge en tournois live et un statut d’outsider inconnu des fans et médias que Sylvain Loosli avait débarqué à Vegas pour disputer son tout premier Main Event des World Series of Poker. (Longtemps avant eux, un autre Français du nom de Marc Brochard avait ouvert la voie en atteignant la 8ème place du Big One l’année de la victoire de Scotty N’Guyen - 1998 - à une époque où le poker n’était de toute façon guère médiatisé, même aux Etats-Unis).

Mais employer l’expression “sorti de nulle part” à propos du Toulonnais, ou d’ailleurs à propos de n’importe qui arrivant en table finale d’un tournoi à 10,000 dollars l’entrée ayant rassemblé plus de 6,300 joueurs, est un raccourci facile, voire même une contre-verité. “Seuls les vrais savent” dit le proverbe de rue, et avant d’accomplir l’exploit d’une vie, Sylvain était loin d’être un inconnu au sein de la communauté des gros pros online Français, notamment ceux de Londres où il réside depuis 2011 et auprès desquels il a poursuivi sa progression : Cyril “Don Limit” André, Alex Luneau, Rui Cao… Demandez à Guillaume de la Gorce, ancien pro du Team Winamax reconverti dans l’immobilier et actuel colocataire du Français : il vous parlera d’un solide joueur de cash-game en ligne (pseudos : Patrick8383 puis T.Fabius), ayant gravi les échelons depuis sa découverte du jeu en 2006 au sein de son association étudiante, parti d’un dépôt de 50€ en ligne pour devenir à force de travail l’un des plus gros gagnants des tables short-handed et heads-up du Net, de la 5$/10$ à 25$/50$. Mais il vous parlera aussi d’un “mec en or, très carré, très fort mentalement et qui sait exactement ce qu’il veut dans la vie”. Quelqu’un qui “ne passe pas sa vie à jouer aux cartes, [qui] sait faire des breaks quand il faut.

Ainsi, celui qu’un porte-parole mal informé des WSOP décrivait au Las Vegas Review Journal durant les phases finales du tournoi comme étant un “amateur n’ayant pas encore fait ses preuves” ne doit définitivement pas son statut de November Nine au hasard, avec son profil de matheux-à-la-tête-froide. Et si les spécialistes en tournoi font rarement des compétiteurs dangereux dans les grosses parties de cash-game, l’inverse se vérifie souvent : Sylvain en est la dernière preuve en date. Saura t-il poursuivre la démonstration jusqu’au bout ? Jetons un oeil en arrière histoire d’obtenir un premier élément de réponse.

Parcours dans le Main Event

On l’a dit, Sylvain Loosli n’est pas un joueur de tournoi, lui qui préfère depuis ses débuts le cash-game. Ces parties dites “libres” que l’on peut rejoindre et quitter à tout moment, et où les possibilités de gains à court terme sont bien plus élevées pour les bons joueurs que dans un tournoi, discipline hautement volatile et si frustrante, où l’on se retrouve souvent à devoir jouer des heures, voir des jours pour finalement repartir les mains vides. Mais tout de même, participer au gros tournoi du monde reste un rêve, peut-être même une fin en soi pour tout bon joueur de poker qui se respecte, depuis le pur amateur jusqu’au professionnel aguerri.

Alors Sylvain a succombé cet été aux sirènes de Las Vegas et son Main Event, après un premier voyage entre amis en 2011 où il n’avait que très peu joué aux cartes, et une qualification en ligne manquée d’un cheveu en 2012. “Je sortais d’une bonne saison et j’ai eu envie de me faire plaisir en cassant ma tirelire pour m’offrir quand même le ticket d’entrée [à 10,000$]”, explique Sylvain au magazine LivePoker. Il n’avait joué qu’une poignée de tournois live jusque là : deux épreuves de l’European Poker tour, un tournoi à l’Aviation Club de France à Paris, et le Partouche Poker Tour à Cannes. Pour, en fin de compte, n’inscrire qu’une seule petite ligne à son palmarès : une modeste 24ème place dans un petit tournoi organisé en marge de l’EPT de Deauville.

Sylvain entame le plus gros tournoi du monde et très vite, c’est le choc, comme il confiera à LivePoker : “le niveau moyen est à peu près celui d’un tournoi à 50 dollars sur Internet. C’est vraiment la fête du poker.” Une fête qui attire des joueurs de tous horizons, nombre de pros bien sur, mais aussi et surtout une majorité d’amateurs Américains : des joueurs qualifiés pour pas chers lors de satellites, des retraités aux poches pleines, des professions libérales de New York ou Los Angeles, avocats, dentistes et requins de la finance… Bref, un joyeux melting pot dont Sylvain ne profitera pas immédiatement lors du premier jour : “J’ai eu une première table magnifique mais […] j’ai perdu pas mal de jetons”, dit-il à LivePoker. Puis les choses empirent : Sylvain est déplacé à la table d’un des meilleurs joueurs de tournoi du monde, Michael Mizrachi. “Je suis rapidement tombé à 12,000, soit le tiers du tapis de départ.” Sylvain prend des jetons à Mizrachi, double son tapis, puis trouve une paire d’As pour prendre un nouveau gros pot. Il terminera la première journée du Main Event avec 46,000 jetons. Sa progression sera ensuite régulière jusqu’à l’arrivée en table finale : il terminera chacune des journées suivantes avec plus de jetons que la veille.

C’est lors de la troisième journée du tournoi que les reporters Winamax vont rencontrer Sylvain Loosli pour la première fois autour des tables du Main Event. Un sérieux écrémage a été effectué durant les deux premières journées de l’épreuve : de 6,352 joueurs inscrits, ils ne sont plus que 1,743, dont 59 Français, menés par Sylvain. (Nous ne connaissons pas le chiffre exact de la participation Française au tournoi, mais nous l’estimons à 170 joueurs). Nous découvrons alors un joueur jovial mais à la stratégie guerrière, s’impliquant dans beaucoup de mains : il aura ainsi réussi à multiplier son tapis par neuf durant les vingt premières heures du tournoi. “Il sera assurément l’un des joueurs à suivre de près dans ce Day 3”, prophétisons-nous alors. Le lendemain, fort de son gros tapis, Sylvain entre sans problèmes dans les places payées, non sans avoir éliminé un adversaire à la faveur d’une quinte flush trouvée sur le flop. Il ne reste plus que 648 joueurs dans le tournoi, et le Français est assuré de remporter au moins 19,106 dollars. Quelques bluffs manqués freineront sa progression, mais Sylvain terminera la journée avec un tapis au dessus de la moyenne.

C’est au terme d’une cinquième journée cruciale pour Sylvain qu’il commencera à croire pour de bon en ses chances. Intouchable dix heures durant, nous le verrons multiplier son tapis par sept grâce à moult gros pots gagnés, et faire preuve d’une maitrîse impressionnante chez quelqu’un censé être novice en tournois. Sylvain attirera d’ailleurs l’attention d’ESPN pour la première fois lors de cette journée. Il ne reste plus alors que 68 joueurs dans le tournoi : la finale n’est plus très loin. “Il y a un moment dans ce tournoi où tu réalises la démesure de l’enjeu, dira t-il à Live Poker, et c’est le moment le plus dangereux. C’est le premier soir où j’ai mal dormi à Vegas.

A partir de ce moment, Sylvain ne quittera plus jamais le Top 10 du classement. Il disputera lors de la sixième journée ce qui est sans doute le coup le plus important de son tournoi : un semi-bluff téméraire en forme de coup du destin où, muni d’une paire et d’un tirage ventrale, notre Français envoie son tapis sur le tournant. Pas intimidé, son adversaire paie avec les As mais Sylvain trouve la quinte sur la rivière ! Avec ce pot de 14 millions, Sylvain terminera la journée en seconde position au classement. Il lui restera alors une dernière journée marathon, aboutissement d’un parcours fait de courage et de patience, et quelques coups fumants et éliminations supplémentaires pour réaliser l’exploit, et devenir le 16 juillet 2013 le troisième Français de l’histoire à atteindre la finale des Championnats du Monde.

Évolution du tapis de Sylvain durant le tournoi

Au départ du Day 1 : 30,000
Day 2 : 46,675
Day 3 : 271,500
Day 4 : 500,500
Day 5 : 877,000
Day 6 : 5,690,000
Day 7 : 14,125,000
Finale : 19,600,000

Ce qu’il a fait ces trois derniers mois

Sylvain Loosli aurait pu rester un joueur professionnel de l’ombre, l’un de ces nombreux grinders disséminés un peu partout dans le monde, bossant dans l’anonymat des tables de poker virtuelles d’Internet, accumulant tranquillement expérience et capital sans attirer l’attention sur eux. Sa décision de se rendre à Las Vegas pour prendre part au plus gros tournoi de poker de la planète est venue chambouler à tout jamais cette tranquille routine qui était la sienne. Ainsi, depuis juillet, Sylvain est l’un des neuf joueurs de poker les plus scrutés par les médias spécialisés et fans du jeu du monde entier, attirant aussi l’attention des médias grand public dans nos contrées.

Scruté par les sites de jeux en ligne Français, Sylvain le fut aussi, et ce dès son retour en Europe après la conclusion provisoire du Main Event. Approché par plusieurs des leaders du marché prêts à mettre sur la table une belle somme pour le voir porter leurs couleurs en table finale de la partie de poker la plus regardée de l’année, c’est finalement vers Winamax que Sylvain s’est tourné, signant un contrat à la fin de l’été l’équipe de joueurs professionnels sponsorisés par Winamax. Un choix somme toute logique à plusieurs titres : c’est sur Winamax que Sylvain a fait ses débuts en ligne en 2006, et c’est sur Winamax qu’il a progressé et (beaucoup) gagné au cours des dernières années. Sans compter les liens amicaux qui l’unissent à des personalités liées au site depuis années, que ce soit des membres du staff, où des membres actuels ou passés du Team Winamax, comme Anthony “Tall” Roux ou Guillaume de la Gorce, son colocataire à Londres.

Et puis, quoi que de mieux que la compagnie de l’équipe la plus titrée d’Europe pour se préparer au mieux en vue de la partie la plus importante de sa vie. En compagnie de ses nouveaux coéquipiers Davidi Kitai (double vainqueur WSOP, champion European Poker Tour, champion World Poker Tour) et Ludovic Lacay (champion EPT), ainsi que Nicolas Cardyn, autre joueur pro installé à Londres, Sylvain a travaillé d’arrache-pied deux mois durant sur tous les aspects du jeu, ne négligeant aucun domaine : mathématiques, psychologie, tells, comportement des adversaires, metagame… Afin de ne rien laisser au hasard et d’arriver autour de l’ultime table avec tous les atouts de son côté. Nous avons pu discuter de la préparation de Sylvain avec ses coachs, et la profondeur jusqu’auboutiste de l’opération mérite un article à elle toute seule. Un article que nous publierons qu’au dernier moment : on ne vous pas tout de même pas mâcher le travail des adversaires de Sylvain rendant publiques les clés de sa préparation !

Un bon travail théorique n’est rien sans pratique : Sylvain aura donc rarement lâché ses valises depuis la rentrée, voyageant à Barcelone, Dublin, Enghien-les-Bains (et jouant aussi à la maison l’étape Londonienne de l’EPT), disputant de grosses compétitions durant lesquelles il aura croisé à de nombreuses reprises ses collègues November Nine. Mais au final, c’est lors du gros tournoi annuel de son sponsor qu’il brillera, manquant de peu la victoire lors du Winamax Poker Open de Dublin, avec une très belle seconde place parmi plus de joueurs, pour un gain de 60,000 euros.

Photo : Ludovic Boulnois

Autre bouleversement radical dans les habitudes du discret Sylvain : l’exposition médiatique plutôt intense qui lui est tombée dessus du jour au lendemain. Outre les multiples interview chez les supports spécialisés d’Europe et d’Amérique (Poker52, Bluff Magazine, PokerNews, la couv’ de LivePoker en France, ClubPoker Radio…), Sylvain a aussi attiré l’attention des médias généralistes. Ainsi, Le JDD, l’Express, le Point, le Magazine du Monde, Ouest-France, Le Parisien, Rue89, ou encore Var-Matin (liste non exhaustive) lui auront consacré quelques colonnes au cours des derniers mois. Point culminant : ces quelques minutes en prime-time sur le plateau du Grand Journal de Canal+ où Sylvain ne sera pas laissé démonter malgré les piques amusées d’Antoine de Caunes et ces quelques vers “poker” chantés en compagnie de Patrick Bruel… A voir ou revoir à cette adresse.

L’avis de Ludovic Lacay

“Sylain est presque exclusivement un joueur de cash-game. En ce sens, il possède une compréhension complète du jeu. Il a appris le poker par la voie de la logique plutôt que celle du mimétisme, sans prendre les raccourcis inhérents au jeu de tournoi. Il est donc un joueur capable d’adaptation, une qualité essentielle au poker. Que lui manque t-il en finale ? L’expérience du jeu short-stack d’une part, et l’expérience du jeu en live, puisque c’est principalement sur Internet qu’il a joué. Le jeu short-stack, c’est l’un des nombreux sujets que nous avons travaillé intensivement avec lui ces trois derniers mois en compagnie de Nicolas Cardyn et Davidi Kitai. Et pour les tournois live, Sylvain en a joué toute une série depuis son entrée dans le Team Winamax, avec en récompense très belle deuxième place à Dublin pour le WPO. Pour briller en finale, Sylvain devra jouer sur ses points forts : sa connaissance pointue des mathématiques du jeu, ses capacités d’analyse, sa lecture après le flop… C’est quelqu’un d’intelligent et qui a confiance en lui. Il s’apprête à disputer la partie de poker la plus importante de toute sa vie. Mais c’est le cas de tous les finalistes ! Le vainqueur sera celui qui aura, plus que les autres, le courage de ses convictions.”

L’avis de Benjo

Inutile de prétendre une seconde à l’impartialité : Sylvain est Français, Sylvain portera en finale les couleurs de Winamax, c’est donc bien entendu Sylvain que nous voulons voir gagner le titre suprême du poker le 5 novembre. Ce type qui nous a impressionnés par sa maîtrise cet été à Las Vegas, il est devenu un pote depuis son arrivée chez Winamax, à travers quelques soirées à Paris et Dublin en compagnie du Team et du Staff, des moments où nous avons découvert le personnage derrière le joueur de poker : charmant, léger, humain. Et je ne crois pas me tromper en écrivant que Sylvain a lui aussi apprécié l’accueil que nous lui avons réservé.

Patrio-corporatisme mis à part, force est d’admettre que le jeune Toulonnais dispose de nombre d’atouts dans sa manche. Une solide expérience à une école considérée par beaucoup comme l’une des plus dures : celle des grosses tables de cash-game en ligne. Une tête froide et l’esprit mathématique de celui qui a été au bout de ses études. La décontraction de quelqu’un ayant déjà beaucoup gagné en peu de temps. Le coaching intensif de trois des meilleurs joueurs Francophones. Le soutien de toute une communauté de fans. Et encore plus important à mes yeux : c’est masqué que Sylvain Loosli va arriver à Las Vegas. Contrairement à des finalistes comme JC Tran, Mark Newhouse ou Ryan Riess, qui ont déjà disputé des tables finales sous les feux des projecteurs, et ont donc, contraints et forcés, livré au public une partie de leur stratégie, la stratégie et le style de jeu de Sylvain restent relativement obscurs, puisqu’il n’avait jamais fait une apparition télévisée avant le Main Event. Rappelez-vous en 2009 : un certain Antoine Saout était lui aussi sorti de nulle part pour atteindre la table finale. Sous-estimé par beaucoup d’observateurs Américains, le jeune Français avait en fin de compte livré la prestation d’une vie, et remporté haut la main les suffrages pour le titre de meilleur joueur de la table. C’est tout ce qu’on souhaite à Sylvain le 4 novembre prochain avec, on l’espère très fort, la dose de réussite supplémentaire qui lui permettra de ramener le titre injustement volé à Antoine il y a quatre ans.

Sources
-Live Poker - N°70 (Septembre 2013) - “Sylvain Loosli : celui qu’on attendait pas”
-Flesceller Poker Blog - “Qui est Sylvain Loosli ?”
-Winamax.fr - Profil Team Pro de Sylvain Loosli
-Le JDD Poker - “Loosli : ‘Ma mère m’a demandé si j’étais fou’”
-digiSchool média : “De math sup/math spé au poker : Sylvain Loosli en table finale du Main Event
-Reportage de PokerNews.com
-ESPN - Diffusions télé du Main Event des WSOP

Benjo

RDV A 2H DU MAT (HEURE FRANCAISE) POUR SUIVRE LA FINALE EN DIRECT !

Voyage au bout de la nuit
Main Event des WSOP : le grand soir

Casino Rio, Las Vegas. Il est 15 heures et je viens de m’installer dans le théâtre Penn & Teller, qui sera durant les prochaines 48 heures l’hôtel de la partie de poker la plus chaude et la plus attendue de l’année. Pour la majorité d’entre vous, il est minuit passé, mais au niveau de l’excitation, pas de décalage : nous sommes TOUS au taquet derrière Sylvain Loosli, jeune Toulonnais encore inconnu du public il y a quelques mois, et désormais en position pour devenir le premier Champion du Monde Français de l’histoire.

A moins de deux heures du départ, que vous dire qui n’ait pas encore été dit ? La lecture des présentations détaillées des neuf finalistes publiées tout au long des derniers jours vous en aurez certainement convaincu : nous avons là affaire à l’une des tables finales les plus relevées de l’histoire, si ce n’est LA plus chargée en talent jamais observée en 44 ans d’histoire des World Series of Poker. Un cocktail explosif de skill, avec huit joueurs professionnels aguerris, plus un joueur amateur pas farouche qui ne manquera pas d’apporter un peu plus de piment à l’action.

Comment va notre champion ? Bien, j’ai envie de dire. Hier soir, à l’occasion d’un pot réunissant le clan Français sur le toit du Rio, c’est un Sylvain Loosli détendu avec qui nous avons pu bavarder. Le plus dur reste à faire, mais Sylvain était serein, après trois mois en forme de tourbillon qui l’on vu propulsé sur le devant de la scène, répondant incessamment aux nombreuses demandes des médias Français, tout en se préparant intensément pour la partie de sa vie avec l’aide de quelques uns des meilleurs joueurs de tournois de son entourage, à savoir Davidi Kitai, Ludovic Lacay et Nicolas Cardyn. Tous les trois ont bien entendu accompagné Sylvain à Vegas, et seront à ses côtés pour l’encourager dans les gradins, en compagnie du Team Winamax quasiment au complet, d’une bonne douzaine de fans ayant décroché leur séjour sur Winamax, et de quelques amis du circuit, comme Emile Petit, Nicolas “chawips” Chappuis, Cyril “Don Limit” André ou Sébastien Sabic.

A ce stade, il ne reste plus qu’à souhaiter la meilleure partie possible à Sylvain, et à vous souhaiter à tous de profiter un maximum de ces quelques moments rares et magiques qui nous attendent ce soir. Les tournois se suivent et se ressemblent, mais la finale des World Series of Poker reste une partie à part, qui marque quiconque à la chance de pouvoir y assister. Pour tous ceux d’entre vous qui vont rester debout toute la nuit, suivant la finale depuis la France, je vous souhaite donc une soirée mémorable. La finale sera retransmise en intégralité et avec cartes visibles (avec un décalage de 15 minutes) sur le site officiel des WSOP. De notre côté, nous sommes sur place, aux premières loges au coeur du chaudron, et ferons de notre mieux pour retranscrire au mieux l’ambiance incomparable qui règne autour de la partie la plus scrutée de l’année.

A très bientôt pour le coup d’envoi, programmé à 17h, heure de Vegas, soit 2 heures du matin en France. On envoie les bonnes ondes à Sylvain. ALLEZ LA !!!

Benjo & Kinshu, prêts à vibrer toute la nuit !

Ultimes préparatifs

16h15 : La salle, ouverte depuis quinze heures, est maintenant presque tout à fait remplie. Moi et Kinshu sommes installés sur le banc de presse situé grosso modo au milieu du théâtre, avec la moitié des spectateurs devant nous, l’autre moitié derrière. Devant nous, les nombreux supporters de Ryan Riess (T shirt : “Riess the beast”), les amis d’Amir Lehavot (le drapeau Israëlien est fièrement déployé), les potes strip-teaseuses de Jay Farber… Derrière nous, il y a la bande sur-excitée (comme on s’y attendait) de Marc-Etienne McLaughlin, couleur dominante : le vert; beaucoup de fans de JC Tran (portant des T-shirt détournant le logo “Obey” de Shepard Fairey), et le clan Français, tout habillé de bleu.

16h22 : Chaque finaliste dispose d’une quinzaine de sièges dans les gradins les plus proches de la table, sur la scène, qu’il a pu répartir à sa guise entre ses proches. Sylvain Tripodi a choisi d’avoir près de lui ses coachs : Stéphane Matheu, Pier Gauthier, Davidi Kitai (qui porte des clochettes sur la tête), Ludovic Lacay, Nicolas Cardyn, ainsi que Clément Tripodi.

16h25 : Putain, il y a des mecs déguisés en panda pour soutenir Jay Farber. Des PANDAS.

16h29 : L’arbitre en chef des WSOP Jack Effel porte le noeud pap’ pour l’occasion. Il entame son speec d’introduction en faisant la pub’ du site de jeu en ligne des WSOP, récemment lancé dans l’état du Nevada.

16h31 : Une vidéo de présentation s’affiche sur les écrans géants, montrant les meilleurs moments des phases préliminaires du Main Event. OK, j’ai des frissons. Les gens crient à l’apparition de leur favori.

16h33 : Les joueurs sont appelés un par un sur le podium. Musique à fond. Cris de partout. Gagnant à l’applaudimètre : Marc-Etienne McLaughlin. Peu de cris pour David Benefield et Marc Newhouse. Le clan Français est réduit par rapport aux autres sections, mais fait beaucoup de bruit.

16h40 : Chaque joueur se rapproche de sa section de supporters respective… Conseils de dernière minute, accolades.

16h42 : Le clan Français s’époumonne. De loin, Sylvain sourit et fait un signe en leur direction.

16h45 : Chris Moneymaker apparaît sur les écrans. On fête encore le dixième anniversaire de la première victoire d’un joueur Internet au Main Event !

16h46 : Le générique des WSOP retentit sur les écrans. Les joueurs prennent place.

16h50 : Moment de flottement. J’imagine que l’équipe télé est en train de régler en vitesse les derniers détails. Les Français en profitent pour lancer une ola.

16h51 : Jack Effel appelle le champion en titre Greg Merson, qui donne le coup d’envoi officiel.

16h52 : Shuffle up and deal ! Il reste 42 minutes à jouer au Level 200,000/400,000, ante 50,000.

ATTENTION : nous n’avons pas l’autorisation de vous donner l’action avant que celle-ci ne soit diffusée sur ESPN et sur WSOP.com, avec un décalage de 15 minutes. Nous vous donnerons le maximum d’information ici et sur Twitter (@TeamWinamax), mais sans jamais anticiper la diffusion en direct.

Tout est le monde est chaud d’action

Derniers préparatifs pour les équipes d’ESPN avant le coup d’envoi de la finale*

Dès l’ouverture des portes du théâtre Penn & Teller, les spectateurs se ruent pour avoir les meilleures places

Les français qui se sont qualifiés pour venir supporter Sylvain sont prêts à donner de la voix

Le Team Winamax va également encourager très fort leur coéquipier

Le Lyonnais Sylvain répond aux questions de notre confrère de PokerNews

Sacré champion du monde en 2010, Jonathan Duhamel est revenu sur les terres de son exploit pour soutenir son compatriote Marc-Etienne McLaughlin

Nos amis québecois sont d’ailleurs très nombreux à avoir fait le déplacement pour encourager leur favori

Le théâtre est presque rempli à ras bord pour cette finale 2013 du plus beau tournoi du monde*

Dans la foule, on a retrouvé l’un des rares supporters du discret Amir Lehavot

Le clan de JC Tran a choisi d’investir les premiers rangs*

Un bon supporter est un supporter qui boit de la bière*

Et en France, on a les meilleurs supporters !*

Les dix premières mains de la finale
Déjà un tapis payé !

Main #1 : Amir Lehavot est au cutoff et relance à 800,000. Les blindes passent. Lehavot remporte la première main de cette finale !

Main #2 : Marc-Etienne MacLaughlin est au cutoff et relance. Au bouton, JC Tran 3-bet à 2,15 millions. La parole revient au Québécois qui se tâte un peu avant d’annoncer un 4-bet pour 5 millions, soit 20% de son tapis !! Le clan des Verts se déchaîne. Au tour de JC Tran de réfléchir. L’Américain finit par abandonner. McLaughlin donne le ton : lui et ses supporters ne sont pas venus pour rempoter les bambous.

Main #3 : David Benefield est au bouton et annonce “all-in” pour 5,7 millions. Il empoche les blindes et antes.

Main #4 : JC Tran est au hi-jack (deux places avant le bouton) et remporte les blindes et antes avec une relance. Et… Déjà un break dans l’action. Problème technique du côté d’ESPN ? Comme chaque année, on peut s’attendre à de NOMBREUSES interruptions de la partie causées par le géant TV Américain.

Marc-Etienne est dépité en voyant une dame apparaitre sur le flop

Main #5 : Marc-Etienne relance à 800,000 UTG+2. Tout le monde passe jusque Marc Newhouse de grosse blinde, qui annonce “all-in”. C’est payé !!! La salle entière se lève pour voir les jeux :

[Qs][Qc] pour Newhouse, derrière les

[Ks][Kc] de Marc-Etienne.

Le flop tombe [7h][2h][Qd]. Newhouse a trouvé le brelan miracle !

Turn [Tc]
Rivière [5c]

Marc Newhouse tape dans les mains de ses potes, le voilà sauvé et relancé dans la course. Il passe à presque 15 millions. Marc-Laughlin tombe à 22,4 millions, ce qui reste très important.

Main #6 : JC Tran relance en milieu de parole et Ryan Riess défend sa grosse blinde.

Flop [Qc][Jh][9s]

Ryan checke et JC c-bet pour 1 million. C’est payé.

Turn [Qh]. Check/check.

Rivière : [9d] pour une seconde doublette. Check/check. Ryan Riess montre As-Valet, c’est la main gagnante.

Main #7 : David Benefield relance en milieu de parole. La parole arrive à Mark Newhouse au bouton. Il 3-bet à 1,8 millions. De grosse blinde, Amir Lehavot se tâte, tripote ses jetons, et envoie un 4-bet à hauteur de 4,4 millions. Hé ben dis donc. Retour sur Benefield qui passe rapidement. Newhouse fait de même. Lehavot empoche un joli pot preflop. Puis, un autre break dans l’action. Je commence à craindre que la dizaine d’heures de poker qui sera jouée aujourd’hui va s’étaler sur quinze, TV oblige.

Le clan québecois fait du bruit, et pour cause, leur champion a pris sa revanche sur Mark Newhouse

Main #8 : Tout le monde passe jusque Mark Newhouse au cut-off : il relance à 800,000. Marc-Etienne défend sa BB.

Flop [Jc][7h][Ts]. Check/check.

Turn [9s]. Marc-Etienne mise 1,2 million. C’est payé par Mark.

Rivière [5d]. Marc-Etienne mise encore, pour un total de 2 millions. Mark paie après un long moment de réfléxion. Le Québécois lui montre un brelan de 5 joliment chatté sur la rivière. Newhouse perd des plumes sur cette main.

Main #9 : Jay Farber relance UTG+1. JC Tran défend sa grosse blinde face à l’amateur.

Flop [2h][7s][4s]. JC checke et Jay c-bet 1,1 million. JC jette ses cartes.

Main #10 : Ryan Riess relance au hi-jack. Payé par Marc-Etienne au bouton. David Benefield défend sa grosse blinde.

Flop : [5d][4s][5c].

Ryan c-bet 1,2 million. Payé par Marc-Etienne, mais pas par David.

Turn : [5h]. Carré en vue ?

Ryan mise encore : 2 millions. Marc-Etienne abandonne.

Vainqueurs des dix premières mains, dans l’ordre : Lehavot, Benefield, McLaughlin, Tran, Newhouse (double-up), Riess, Lehavot, McLaughlin, Farber, et enfin Riess.

Les deux Européens de cette finale sont les seuls à ne pas encore avoir gagné un seul pot !

Revers couteux pour Sylvain

Coup dur pour Sylvain Loosli qui a perdu une partie non négligeable de son tapis lors du premier coup qu’il a joué…

Douzième main de la finale : tout le monde passe jusqu’à David Benefield au bouton qui en profite pour faire tapis (4,425 millions). Jay Farber passe en petite blinde mais Sylvain décide de payer en grosse blinde !

David : [Ks][9s]

Sylvain : [Kd][Jh]

Flop [Js][7s][3h]. Un Valet pour Sylvain mais David a nettement amélioré sa main en trouvant un tirage couleur !

Turn [2s] ! l’Américain touche sa couleur et est désormais sûr d’empocher le pot. Il passe à plus de 8 millions tandis que Sylvain chute à 14 millions. Aïe aïe aïe.

Les Français se tiennent la tête entre les mains : Sylvain vient de perdre beaucoup de jetons sur un coup du sort

Sylvain remporte enfin son premier pot

17h39 : Marc-Etienne relance en milieu de parole. Au cut-off, Benefield 3-bet à 2 millions. Michiel Brumellhuis, qui n’a pas encore mis volontairement un jeton dans le pot jusqu’a présent, envoie son tapis, pour un peu plus de 10 millions. Marc-Etienne abandonne et Benefield semble très peiné. Il demande le compte et il s’avère que les deux joueurs sont quasiment à égalité. De longues minutes passent avant que Benefield ne finisse par se résoudre à faire de même. Premier pot pour Michiel, ce qui laisse Sylvain seul dans le clan des mecs-n’ayant-pas-encore-gagné-un-pot.

17h45 : Les blindes passent à 250,000/500,000, ante 50,000 pour une durée de deux heures. Cela représente moins de trente blindes pour Sylvain, qui, bien malgré lui, réalise le plus mauvais départ parmi les neuf finalistes.

17h46 : Ryan Riess ouvre UTG à 1 million. Au hi-jack, David Benefield fait tapis pour 7,35 millions. La parole revient à Ryan qui va nous faire patienter un long moment avant d’abandonner.

17h48 : Entre les coups, Mark Newhouse crapote une cigarette électronique de taille imposante. Les pauses sont nombreuses, et aucun des finalistes ne restent assis lors de ces breaks, fonçant vers leurs clans respectifs.

17h51 : Michiel Brummelhuis relance au cut-off. De grosse blinde, Lehavot 3-bet à 2,9 millions. Cette nouvelle démonstration de l’Israélien fonctionne encore une fois : Brummelhuis abandonne.

17h58 : Sylvain relance UTG+2. Tout le monde passe jusque JC Tran en grosse blinde. L’Américain décide de défendre.

Flop [As][Kd][5d]. JC checke et Sylvain décide de ne pas c-bet.

Turn [6c]. JC checke encore. Cette fois, Sylvain mise et obtient un fold immédiat de JC. Notre Français remporte enfin un pot ! Ca fait du bien au moral, et le clan Français laisse éclater son approbation.

Sylvain joue, mais Sylvain perd

18h01 : Marc-Etienne relance au bouton. De petite blinde, JC Tran 3-bet. La parole revient au Québécois qui abandonne.

18h04 : Sylvain ouvre UTG et voit ses huit adversaires jeter leurs cartes chacun à leur tour. Avec ces deux pots, Sylvain récupère les jetons perdus contre Benefield.

18h06 : Sylvain défend sa grosse blinde face à une relance de Marc-Etienne en milieu de parole.

Le flop est [Kc][Jc][6s]. Sylvain check/call le c-bet de Marc-Etienne.

Turn [Qc]. Sylvain checke encore. Marc-Etienne augmente le tarif : 2,7 millions. Sylvain fixe son adversaire sans bouger un muscle… Puis vérifie ses cartes avant de… passer.

18h10 : En bon joueur de cash-game, Sylvain n’a pas l’habitude de n’avoir que 30 blindes de tapis. C’est là que le coaching du trio Lacay/Kitai/Cardyn pourra potentiellement se réveler être crucial.

18h12 : Sylvain défend sa petite blinde face à une relance en MP d’Amir Lehavot. Le Français check/call un c-bet sur [4c][Qd][5c]. Le turn est un [9d]. Sylvain checke encore et Lehavot revient à la charge avec une mise de 2,5 millions. Sylvain abandonne une nouvelle fois et tombe à 12,22 millions (24BB).

18h14 : Au fait, ce reportage ne relate pas TOUS les coups joués durant cette finale. Histoire de conserver nos doigts en vie, nous passons sous silence les vols de blindes et autres coups sans intérêt particulier.

18h16 : Cela fait un moment qu’on n’a pas vu JC Tran bouger une oreille. Pour le moment, Marc-Etienne McLaughlin et Amir Lehavot sont les deux grands animateurs de cette finale.

L’inquiètude se lit sur les visages de Clément Tripodi et Stéphane Matheu - tous deux postés derrière la table finale