Bahri, c’est magique
Passé à un cheveu de la win, Safwane Bahri prend finalement la 2e place de ce High Roller Eureka pour 292 520 €. Le reg de Rozvadov explose son record de gains et marque un tournant dans sa jeune carrière, démarrée il y a à peine trois ans sur les low stakes Winamax.
Eureka High Roller 2 200 € (Fin)
Le coup était presque parfait. Arrivé ce matin avec 25 blindes, Safwane Bahri savait que la course serait serrée avec Jason Wheeler et Bruno Volkmann, ses deux concurrents directs, tandis que Grzegorz Kozieja avait pris un tour d’avance sur la fin de Day 2.
Après l’élimination rapide de Wheeler par Volkmann, Safwane trouve la plus belle main du poker, et trois grosses streets de "value" contre le Brésilien sur un board K
Q
8
2
5. Volkmann passe bon dernier, Bahri revient sur Kozieja et prend même les rênes du tournoi après le double-up du Brésilien sur un flip contre le Polonais.
Un petit quart d’heure de 3-max et Bahri trouve encore un bon spot. Open Volkmann 1 150 000, 3-bet 3 400 000, tapis 11 000 000, snap-call, et Safwane domine le AJ de Bruno avec son AQ. Le board A8676 est bon pour Bahri, désormais en heads-up de l’Eureka High Roller, avec un avantage de deux contre un contre Grzegorz Kozieja (photo).
Le heads-up est équilibré. Les deux hommes se rendent coup pour coup et personne ne prend l’ascendant, jusqu’à ce premier coup à tapis provoqué par Grzegorz. Limp du Polonais 600 000, iso 2 800 000, tapis 15 000 000 et c’est payé avec K10 par Bahri.
Ca sera un 55-45 contre le A6 adverse, mais le Polonais écarte la balle de match sur le board 74565. Inversion des stacks !
Kozieja enchaine et prend quelques petits pots jusqu’à donner le coup fatal. Limp Safwane, check-back et le flop vient 532. C-bet 600 000, check-raise 2 000 000, payé. Kozieja enchaine avec un bet à 3 000 000 sur la turn 2, payé encore. River Q, Grzegorz demande les huit derniers millions du Français, qui entre dans le tank. Deux minutes plus tard, Bahri décide de payer avec son A7. Malheureusement, Bahri était drawing-dead depuis longtemps face au 64 du Polonais (photo), qui met la main sur le trophée, et les 474 510 €.
Safwane se contentera de la médaille d’argent, pour 292 briques. Quand même.
« Je n’ai pas de mot pour définir ce que je ressens. Ca y’est, c’est la fin. Un peu déçu forcément, concède le joueur, à chaud, deux minutes après sa sortie. J’y croyais, je me sentais confiant, d’autant que le plan s’est super bien passé. J’y croyais jusqu’au bout, jusqu’à la fin ! ». La déception de Safwane est toute relative.
Le grinder sait très bien la chance qui l’a porté jusqu’à cette table, jusqu’au heads-up. Il évoque bien sûr, ce « coup décisif » avec K10 contre A6, mais très vite, la fierté prend le dessus sur les regrets.
« Je réalise le tournant que représente cette perf. Je la prends avec plaisir. La win aurait été mieux encore, mais c’est déjà bien, j’écris ma propre histoire. Quand je regarde mon parcours, je suis content. Ca fait peu d’années ! Il y a trois ans, j’étais encore online, sur Winamax, à jouer des 10-20-50 € » rappelle Bahri.
Depuis, le joueur a grimpé les limites, sur les rooms, mais surtout en Live, dans cette forteresse qu’il assiège depuis trois ans avec son petit bataillon de grinders : Le King’s Casino de Rozvadov.
« On est un groupe assez uni, affirme Safwane. Il y a Clément Cure, Anthony Mahaut, qui ont beaucoup perfé aussi ces derniers temps, Fabien Baldelli, qui était l’un des premiers à jouer là-bas. La majorité reste à Rozvadov. De temps en temps on fait des gros steps comme Vegas, mais on est principalement deux à bouger, Dorian Melchers et moi ».
Tous ces grinders étaient présents dans le rail, applaudissant Safwane à chaque petit pot gratté et appelant fort les cartes à chaque coups à tapis. Les encouragements ont fusé depuis le Hilton, et même dans le monde entier.
« J’ai reçu énormément de soutien, confesse le joueur, touché par la tonne de messages qu’il a reçus depuis hier soir. J’ai pas mal d’affinités avec beaucoup de joueurs, regs ou moi s regs. Et quand il me voient, ils me supportent, ils me demandent des nouvelles. On m’apprécie en général, je ne suis pas quelqu’un qui se fait remarquer, en mal du moins. C’est pour ça que tout le monde me renvoie la pareil, m’envoie beaucoup de force, c’est top ».
Nul besoin d’activer les réseaux ou de faire du bruit pour attirer les regards de la planète poker. Conformément au plan qu’ils s’étaient fixés, Safwane Bahri et son petit groupe rozvadovien se signalent par leurs performances, lentement, mais surement.
La gentillesse et l’humilié du garçon sont aussi évidentes que son talent cartes en mains. A chaque fois que je mentionnais le nom de Safwane, que ce soit à des confrères, des tops regs français ou des habitués du circuit, tous ont mis l’accent sur la compétence et la bonhomie de Bahri.
« Je me suis rapproché de quelques top français , que ce soit pour travailler le jeu ou au cours de mes sorties Lives. Juju (Sitbon), d’autres qui sont aux Bahamas ou à Vegas qui me soutiennent depuis là-bas. J’ai aussi parlé à Simon (Wiciak). Je l’ai bust sur ce HR autour des 50 left. Il m’a écrit et je lui ai dit en rigolant qu’au moment de le buster, je savais que ce tournoi ne serait pas comme les autres ».
Désormais domicilié à Vienne, le grinder envisage déjà la suite, sans pour autant bouleverser la recette actuelle.
« Je ne vais pas changé mes plans, affirme Bahri. Ca ajoute de l’expérienceet ça fait une grosse perf. J’ai exterminé mon meilleur score. C’était un de mes objectifs, que je m’étais réservé pour l’année prochaine, mais du coup, je vais réactualiser. Et puis, ça motive les troupes, ça me motive moi, c’est cool ».
Un tel accomplissement supposerait en temps normal un peu de repos et éventuellement quelques célébrations. Mais nous sommes seulement mardi après-midi, et le Day 1B est lancé depuis quelques heures seulement. « Je vais me détendre un peu, relâcher un peu la pression. Faire une petite méditation peut être avant de revenir dans le Main et puis on va enchainer, l’année n’est pas finie ! ».