PokerStars European Poker Tour Prague 2023-Main Event - 4

La France crève l’écran

Les 47 joueurs ayant poinçonné leur ticket pour le Day 4 sont de retour dans la grande salle du King’s Casino. 8 d’entre eux ont eu le plaisir de découvrir qu’un siège les attendait en table télévisée. Le streaming Pokerstars honore le clan bleu ce matin, puisque ce n’est pas un, ni deux, mais bien trois français qui se retrouvent sous les projecteurs pour ce début de journée.

EPT Main Event 5 300 € (Début de Day 4)

Guyon

Pokerstars a enfin compris ! Voir Ramon Colillas gagner des flips, c’est bien. Mais voir Adrien Guyon mettre des énormes bluffs avec 9-high, c’est mieux. Inconnu du field EPT hier, Adrien se révèle aux yeux du monde au fur et à mesure de ce Main Event. Le jeu fantasque de notre ex-Team Pro serait-ils parvenu jusqu’aux oreilles des décideurs ? Ou est-ce juste la présence de Marle Cordeiro Spragg qui a changé la donne ?

Quoi qu’il en soit, le clan français aura le bonheur d’observer les moves guyonesques sur la première heure et demi de streaming, au moins… Mais aussi les moves chechinesques. Comme hier, le désormais chipleader du clan bleu partage sa table avec Adrien, et même avec un autre Français.

Chechin Retiere

Serge Chechin et Romain Retiere côte à côte sur cette table télévisée, où l'on retrouve également Marle Spragg et le chipleader norvégien Jon Kyte et son compatriote Preben Stokkan.

Pour son tout premier Main Event EPT, le jeune Romain Retiere se retrouve au Day 4, en table TV. L’expérience totale continue et démarre même du bon pied puisque j’ai déjà vu le grinder ramasser quelques pions. Bien entendu, je ne pourrais vous spoiler les coups de notre trio bleu, avant qu’il ne soit retransmis sur le Youtube de Pokerstars France, où vous pourrez vous régaler en compagnie de Benny et Yu !

Meli

Guyon donne le ton

Voilà trois jours qu’on espérait Adrien Guyon en table télévisée. L’attente en valait la chandelle. Première main jouée par le Français et Guyon s’embarque dans un 3-barrel bluff, contre le chipleader norvégien, pour un pot à 1 million de jetons.

EPT Main Event 5 300 € (Day 4) Niveau 21 : Blindes 10 000 - 15 000 Ante 15 000

Guyon

Adrien n’est pas venu pour check-turn. Ni river d’ailleurs. Pour sa toute première main du tournoi, Adrien sort le move de génie d’entrée et abuse du chipleader norvégien Jon Kyte, avec une line pour le moins brave.

Open de Jon Kyte AQ UTG à 35 000. Juste derrière lui, Adrien Guyon trouve la même main, non suitée et décide de 3-bet à 110 000. Derrière encore, Marle Spragg trouve deux Valets. Pas envie de jouer un énorme spot dès les premières minutes, l’Américaine lâche tout de suite sa main et laisse les deux costauds entre eux.

Le Norvégien paie et le flop vient 594. Backdoor flush pour les deux joueurs. C-bet 135 000, c’est payé par le Scandinave. La turn 8 n’aide absolument personne, mais les deux musiciens continuent de jouer de la flute. Second-bar poitevin à 195 000, payé rapidement par Kyte ! Les deux hommes ont-ils bien vu leur main ?

River 7, toujours rien chez Kyte, toujours rien chez Guyon. Check du premier et… Tapis 345 000 pour Adrien ! Jon se doutait de quelque chose mais impossible de payer ici. Le Norvégien abandonne et Guyon claque le bluff avant de prendre cet énorme pot. 1 265 000 pour Adrien Guyon !

Départ de rêve

On pouvait difficilement imaginer meilleur départ sur ce Day 4 côté français. Après le superbe bluff de Guyon, les compatriotes suivent la marche avec une démonstration de justesse, que ce soit pour gagner ou économiser des jetons. Retiere se maintient bien, tandis que Chechin et Meli s’installent dans le Top 10 du chipcount.

EPT Main Event 5 300 € (Day 4) Niveau 21 : Blindes 10 000 - 15 000 Ante 15 000

Serge Chechin n’est pas un joueur comme les autres. Récréatif assumé, l’entrepreneur utilise des ingrédients bien à lui pour choisir ses lines, parfois bien audacieuses. De l’instinct, du flair et de l’expérience, largement accumulée au fur et à mesure de ses années de circuit.

Chechin Groop

La méthode Serge a été appliquée dès la première main, en table télévisée, face au chipleader Jon Kyte. Une défense K8, un lead 25 000 sur KKJ, un check-call 50 000 turn 6 et une reprise de lead à 75 000 turn 9 pour prendre value-max au Norvégien qui tenait QJ. Superbe.

Déplacé en table extérieure, Serge vient encore de nous sortir un drôle de move. Open MP, 3-bet bouton Jose Gonzalez et Serge décide de cold-call en BB.

Le flop vient Q82 et l’Espagnol c-bet à 45 000. Riposte direct de Serge : 120 000 ! Snap-fold de l’Espagnol. Voulez-vous avoir l’analyse de Serge sur cette main ? « J’ai 74 en BB ici. J’ai décide de payer et sur le flop, avec ce montant, je le vois vraiment sur rien ». L’instinct on vous dit.

La méthode Chechin permet de gagner des jetons là ou personne n’en trouve, mais aussi d’économiser dans des situations dangereuses. Open Tobias Garp 30 000, 3-bet 75 000 juste derrière de Serge et le flop vient A910. Check et check-back de Serge.

Turn J, petite mise du Suédois et fold rapide de Chechin, qui montre… QQ. Beau joueur, Garp dira avoir K-Q avec la dame de carreau. Bien senti Serge…

Juste avant, le Français venait d’ailleurs de prendre un gros 300 000 jetons à ce même Garp. J’ai vu un raise river 190 000 sur un board 101099Q. Call rapide et muck tout aussi prompt du Suédois après que Serge ait montré un beau 106 pour un full.

Meli

Sur la table voisine, Vincent Meli vit aussi un beau début de journée. Le Français a pris très gros à Asaf Groofi sur un move plein de puissance. Open MP 30 000, défense de la SB et l’Israélien squeeze à 120 000, payé deux fois. Le flop vient 1084 et Groofi c-bet à 75 000. Pas assez pour Vincent qui clique, pour 150 000 jetons, fold SB, call BB. Turn 9s. Vincent poursuit avec un nouveau barrel à 175 000, payé encore. River 3, Meli envoie la sauce, pour les 380 000 restant à l’Israélien, qui finit par se coucher.

On ne saura pas la main de Vincent mais on connait le montant de son nouveau tapis : 1 445 000. Serge et Vincent sont dans le Top 10 provisoire.

Meli le pinceau

Main Event EPT (Day 4) Niveau 22 : 10 000 - 20 000 Ante 20 000 (36 left)

C’est une toile d’artiste qu’est en train de dessiner Vincent Meli sur ce début de Day 4. Le Français ne cesse de chip-up, enchainant les petits pots, pour devenir le premier français à passer les 2 millions de jetons.

vincent Meli

On joue seulement depuis deux heures, mais on ne saurait compter les pots amassé par Vincent Meli. Le grinder de Londres asseoit son emprise sur la table 4 et personne ne résiste à sa grind diabolique.

Après avoir fait le portrait d’Asaf Groofi sur ce move puissant, Vincent a jouté de la couleur sur un nouveau face à face avec l’Israélien. Open 40 000 Groofi sur la blinde du Français qui défend pour voir le flop 258. Check-check.

Turn doublette du 8, check-check encore. River 2, cette fois, Vincent part à l’attaque : 125 000, léger overbet et c’est payé rapidement par Asaf, qui tire la grimace après que le Français montre son K8.

Quelques mains plus tard, Meli taille son crayon dans le stack de son voisin Ramon Coillas. Un simple 3-bet 105 000 au bouton sur un open de l’Espagnol. Un c-bet sur le flop 9Q2 suffit à faire passer le vainqueur PSPC. A chaque fois, c’est cinq ou six blindes de plus dans le stack du Français, désormais posté sur 2,2 millions de jetons. Seul Padrag O’Neill et Cesar Garcia font mieux au moment où j’écris ces lignes.

En revanche, je me dois de vous signaler la première mauvaise nouvelle de la journée : Romain Rétiere n’est plus de ce tournoi. Le jeune Français s’est vaillamment battu, maintenant son shortstack à flot jusqu’à ce spot imparable. Open Jon Kyte, Romain découvre AK suité avec ses dix blindes.

Tout part au milieu, mais la paire de 8 du Norvégien tiendra sur un board J-high. Superbe run du jeune grinder, récemment venu au MTT Live, qui repart avec une 40e place pour sa première participation en Main Event EPT. 18 260 € pour récompenser ce bel essai.

Guyon, c’était si bon

L’attraction du clan tricolore ne brille plus. Après deux heures en enfer, Adrien Guyon quitte ce tournoi en 29e position. Un nouveau superbe run pour le champion français, qui clôt avec panache son incroyable saison 2023.

EPT Main Event 5 300 € (Day 4) Blindes 15 000 - 30 000 Ante 30 000

Guyon

Comme un symbole du poker atypique auquel il nous a habitué, Adrien Guyon termine son Main Event avec un superbe 72. Le joueur a défendu en grosse blinde après un open 55 000 de Marle Spragg UTG et un flat d’Umberto Ruggeri au CO.

Le flop vient 234 et l’action check jusqu’à l’Italien, qui envoie 60 000 au milieu. La main un peu laide d’Adrien est devenue sexy. Assez même pour envoyer le check-raise à 200 000 jetons.

Marle Spragg se joint à la fête et paie la relance, mais Umberto n’a pas fini ses enchères : re-raise 1 000 000. La main d’Adrien est trop forte, l’argent mort est trop gros : Payé par Adrien, qui avance son tapis de 800 000.

Marle comprend que son AA n’est plus bon et couche ses flèches face-up. Adrien doit trouver un pique… Ou peut être un 6 après la turn 5. Mais la river 7 ne donne qu’une double paire à Guyon, insuffisant pour abattre le 44 de l’Italien.

« C’était l’enfer ces deux dernières heures, souffle Guyon. A chaque fois, je perds avec de vraies mains, c’est pas des bluffs pourris. J’ai top brelan je prends flush river, j’ai deux fois As-Roi je suis obligé de coucher, j’ai full je partage, et là j’ai paire plus flush draw » résume Guyon qui s’est effectivement un peu fait enfler par le run en ce milieu d’après-midi.

La déception est naturelle mais Adrien peut être fier de son tournoi. Durant ces quatre jours de Main Event EPT, qu’il rejouait pour la première fois depuis de longues années, Guyon a fait du Guyon. Il a claqué des bluffs monstrueux, trouvé des folds de classe mondiale, bousculé des grands noms du poker et fait vibrer toute la communauté française, qui le suivait, dans l’enceinte du casino ou sur les réseaux.

Guyon

Comme à son habitude, Adrien Guyon aura donné plus d'un mal de crâne sur ce tournoi.

Le Team Pro Nutsr termine finalement 29e, pour 24 180 €. Une performance qui clôt de fort belle manière une année 2023 tonitruante. « Mon plus beau score datait d’une autre année, mais c’était en ligne. Là, c’est de très loin ma plus belle saison en Live » confirme Adrien. Petit résumé non exhaustif. Une troisième place sur le WSOP-C High Roller Marrakech, deux titres FPO, le presque back-to-back TF WPO Bratislava, un deep run Main Event WSOP. L’addition fait à peu près 200 000 de gains sur l’année civile. « Et ce n’est pas comme si j’avais joué 400 tournois ».

Le joueur promet d’être de retour sur de grands rendez-vous internationaux l’année prochaine… Mais il n’en a pas tout à fait fini avec Prague. « Ca va être difficile de trouver un avion à cette heure là. Donc je vais aller gagner le 2 100 € Hyper-Turbo, tu pourras venir prendre la photo » déclare Guyon, avant de quitter la salle.

Le clan français perd l’une de ses meilleures armes, mais il a encore deux belles cartouches à tirer à 26 left. Serge Chechin a parfaitement maintenu son beau tapis, toujours légèrement au dessus de la moyenne avec 1,7 million. Vincent Meli, lui, s’est offert un petit swing avant de revenir à 2,4 millions de jetons. Ce Main Event est loin d’être terminé pour nos tricolores.

Chechin’s got the swing

Le tempo s’est accéléré en table 1. Le rythme a excité nos danseurs qui ont créé cinq pots consécutifs complètement fous. Le roi de la piste répond au nom de Serge Chechin, qui a enchainé les pirouettes, passant au bord de la glissade pour finalement retomber sur ses pieds.

EPT Main Event (Day 4) Blindes 15 000 - 30 000 Ante 30 000 (24 left)

Chechin

Les joueurs commencent à taper du pied suite à un premier affrontement entre Serge Chechin et Grigorii Rodin. Le Français paie la relance UTG du Russe depuis la SB et paie à deux reprises sur le board 3496. Un 7 complète le board, et Chechin change de pas : lead 450 000, un peu plus de mi-pot. Le Russe se délestera de quelques time-bank, écoutant les paroles de Serge qui chantonne « no flush draw » ou encore « my friend, how do you feel ? ».

Le Russe finira par quitter la scène et Chechin passe les deux millions.

Chechin

Main suivante, Serge se lance dans un nouveau rock avec un 3-bet sur la tête d’Umberto Ruggeri qui avait ouvert UTG… Mais se ravise après le 4-bet de l’Italien. On attend le prochain titre, cette fois jouée par le Norvégien Jon Kyte.

Open du Scandinave, payé en position par Serge et voilà un drôle de flop 555. C-bet 65 000, payé par le Français. 10 sur la turn, Kyte laisse guider Chechin qui envoie 150 000. Une tenue de piste qui ne convient pas à Jon : check-raise 420 000. Après un petit tank, c’est payé.

Chechin Kyte

Le pot est déjà énorme et s’apprête à devenir encore plus gros. 6 river, la parole est sur Kyte et Chechin joue encore le méta-game de livetard. « How much ? » demande tout haut le Français, en attendant le move de Jon. « One point 2 million » répond sèchement le Norvégien. Le Français passe rapidement.

La soirée devient complètement folle et tout le monde se lâche sur la piste : Main suivante, open Kyte UTG 60 000, 3-bet Marle Spragg 200 000, cold-call Chechin juste derrière et la parole arrive sur Alexandru Lupuleac en SB… Tapis 800 000 ! Seraient-ils tous devenus ivres ?

Chechin Lupuleac

Jon Kyte prend une minute avant de passer, Marle prend moins d’une demi-seconde… Voilà qui donne de belles côtes à Chechin : Payé ! Nous voilà avec un nouveau pot à près de 2 millions de jetons. Le Roumain montre… AQ, en flip contre le 1010 de Serge.

Un board 9953…. 2 Ca tient ! Checin prend un pot monstrueux et se retrouve à plus de 2,6 millions de jetons.

Jusqu’ici tout va bien

Nous sommes à 23 left du Main Event EPT Prague, nous comptons encore deux Français, tout deux Français, qui reviendront tout deux avec plus de cinquante blindes après le diner-break. Comme dit le classique de Booba, jusqu’ici tout va bien.

EPT Main Event 5 300 € (Diner Break Day 4) Niveau 25 : Blindes 20 000 - 40 000 Ante 40 000

Meli

« Les grosses bastos, négro, le stack, les all-in, plus rien ne m’étonne jusqu’ici tout va bien » disait B20 dans l’un de ses titres mythiques de "Temps Mort". Les 23 survivants viennent justement de partir en diner-break, et s’habituent effectivement à toute la dureté que suppose un laie-game de Main Event EPT.

La fin de niveau n’a accouché d’aucun changement notoire pour nos deux tricolores. Serge Chechin a bien défendu sa blinde puis check-call deux fois contre Jon Kyte avant de coucher sur la river “flush-in”. Les deux hommes se cherchent depuis le début de journée, il se peut que l’un des deux finissent KO avant la fin. « Les jetons bougent beaucoup avec lui, observe Serge Chechin. Il ne devrait même plus être là d’ailleurs (Jon Kyte a touché un 3 outer pour un pot monstre contre Lulupeac lors du niveau précédent). J’ai perdu ce coup mais tout va bien ».

Kyte

Toujours aussi actif, Jon Kyte a encore envoyé très gros dans un duel face à face à Grigorii Rodin, avec un bet à 1,4 million river. Plutôt que de former le plus gros pot du tournoi, le Russe a préféré folder sur le board 2Q85J

Serge Chechin dispose en effet d’un stack confortable. 2 325 000 pour le Français, qui feront 57 blindes à la reprise sur le niveau 20 000 - 40 000. Tapis quasi similaire chez Vincent Meli, qui n’a pas trop bougé depuis son passage en table télévisée.

Les tables se sont clairement corsées au fur et à mesure de la journée, Vincent héritant notamment de Niall Farrell, Preben Stokkan, et bien sûr Steve O’Dwyer, qui a cependant perdu de sa superbe. « C’est ça qui est bien dans ces tournois. De toute façon, pour aller loin, il faut bien combattre contre ces joueurs-là », commente Vincent, pas effrayé par le casting.

GUYON GUYON GUYON !! the best playeur this year

Poitevin … il va venir au WIPT Poitiers

La demontada

Carnage inattendu en ce retour de diner-break. Nous venons effectivement de perdre cinq joueurs en trente minutes. Un ratio énorme à ce stade du tournoi, d’autant que la moyenne est encore bien deep. Une hécatombe qui a visé particulièrement le clan ibérique, puisque les trois espagnols encore en course viennent de sauter à la suite.

EPT Main Event (Day 4) Niveau 25 : Blindes 20 000 - 40 000 Ante 40 000

Cesar Garcia

"Un, dos, tres ! Un pasito en el rail, Maria" chanterait Ricky Martin s’il était de cet EPT Prague. Le clan espagnol vient de se faire raser en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.

Le premier KO survient dix minutes après le retour de diner. Engagé dans un coup contre le très agressif Jon Kyte, Cesar Garcia n’a eu aucun mal à 4-bet shove sa petite quarantaine de blindes avec AK. Mauvais timing, le Norvégien tenait cette fois une vraie main, deux femmes, qui aspireront les derniers jetons de Cesar sur un board sans suspens.

Quelques minutes plus tard, on entend Marle Spragg gémir joyeusement sur les bords de la table télévisée. Une attitude étrange causée par une main improbable : l’Américaine vient de trouver le set-up ultime.

Colillas Marle Kudzmanas

Trois jeux sont étalés sur le tapis, celui de Marius Kudzmanas, deux Rois, celui de Ramon Colillas, As-Roi et le sien… deux As. Une rencontre de plaques tectoniques faisant inévitablement émerger une montagne de jetons.

Le board J44210 n’apportera pas plus de tension à ce coup surréaliste : Marle Spragg triple et revient au-dessus de la moyenne. Kudzmanas prend un énorme Side-pot à 2,5 millions et termine positif dans cette histoire. Ramon Colillas, lui, se lève sans dire mot et rejoint dignement son compatriote Cesar dans le rail.

Set-up

Entre temps, le clan espagnol avait perdu le shortstack Adri Diaz. Comptant 3 représentants à 22 left de ce Main Event, l’Espagne fait 22e, 21e et 20e. Une enfilade qui causera le tilt de mon confrère Alex Hernando, qui hésite déjà à prendre un billet retour pour Saragosse.

Et puisque Steve O’Dwyer et Ran Llani ont également vu leur shorstack s’évaporer, il ne reste, déjà, plus que 18 joueurs dans ce tournoi. Et toujours nos deux Français, qui ont même grapillé quelques jetons.

Le kiffeur et le grinder

Serge Chechin et Vincent Meli se font sans trembler une place à 16 left du titre EPT et du million d'euros. Deux hommes que tout oppose, mais dont l'aventure et la trajectoire se rejoignent étrangement sur ce run pragois. Ils auront chacun leurs armes, et du stack, pour aller chercher un exploit encore bien plus grand.

Meli Chechin

Après le carnage post-diner break, les deux éliminations nécessaires à la clôture du Day n’ont pas tardé. Toujours aussi “dégen”, Jon Kyte a largement accéléré le processus en envoyant un énorme 5-bet shove avec JJ sur la tête de de Marius Kudzmanas. Le Lituanien avait parfaitement cerné le profil scandinave et accepté la proposition avec AK, pour jouer un flip à 5 million de jetons, le plus gros pot de ce tournoi.

Un choix un peu ambitieux sachant le run du Norvégien depuis le début de journée. Avec ses deux valets, le Scandinave fait full direct sur le flop J1010. Turn 2, c’est déjà terminé. Après avoir pris deux Rois contre deux As et As-Roi, Marius (photo) perd le flip du tournoi et sort en 18e position.

Kudzmanas

Tombé à cinq blindes, Teun Mulder perdra ses derniers jetons dans la foulée sur un 60-40 anecdotique contre Cheng Zhao. Il est seulement 22h00, le dernier niveau programmé aujourd’hui n’a même pas commencé et nous voilà déjà à 16 left. La fin de partie est sifflée.

Chechin

« Quoi, c’est déjà fini ? » s’étonne Chechin, qui a visiblement encore envie de boxer. Son petit check-raise (avec 44) sur un board 237 face à Dejan Jakovlevic sera effectivement le dernier coup de la table. Un petit pot qui lui permet de boucler la journée juste en dessous des 3 millions de jetons, soit le 4e plus gros stack du tournoi.

Il est bientôt rejoint devant le spot télévisé par Vincent Meli, qui comme Serge, n’a pas eu besoin de jouer un gros coup pour terminer la journée à 2 960 000 jetons. Nos deux héros Français auront donc 60 blindes pour le Day 5.

Meli

Vincent et Serge n’ont à priori rien en commun. L’un vit du poker, l’autre est pur amateur. Vincent est joueur de cash, Serge aime les tournois. Meli est un expat’ de Londres, Chechin un entrepreneur du Sud-ouest. Mais en plus de partager cette aventure praguoise, ils se rejoignent par plusieurs aspects.

De manière très pragmatique, on peut commencer par leur stack, les deux joueurs ayant suivi la même trajectoire depuis la fin d’après-midi, montant progressivement des 2 vers les 3 millions.

Mais surtout, ils sont tous les deux en grande confiance, puisqu’ayant tout récemment acquis leur plus grande victoire en Live : Il y très exactement un mois, Vincent Meli remportait l’UKIPT Nottingham, pour 159 325 pounds, un véritable tournant pour lui. Une semaine plus tard, Serge Chechin remportait quant à lui le SPM Main Event, à Rozvadov, devant un field de près de 2 000 joueurs, transformant ainsi 300 € en 85 barres.

Deux victoires qui permettent de recharger la bankroll, mais surtout de faire le plein de confiance, avant de se présenter sur l’un des plus beaux tournois de l’année.

C’est d’ailleurs à la suite de cette victoire que Vincent Meli s’est décidé à jouer son tout premier Main Event EPT. Le dépucelage se prolonge désormais sur un Day 5, à 16 left d’un million d’euros. Vous avez dit “pression” ?

Meli

« Quand je suis arrivé en table télé, j’ai senti un peu de stress, confesse Vincent. Surtout que dès mes premières mains, je me retrouve dans un spot avec As-Dame face à un 3-bet. J’ai senti de la force chez l’Espagnol, j’ai préféré passer directement. Il se trouve qu’il avait As-Roi. De manière générale, j’ai plutôt réussi à écouter mon instinct, poursuit le joueur, qui croit peu en la théorie du “one-time”. Ca fait quand même un moment que je joue au poker. J’ai eu des hauts, des bas, mais je ne vois pas ce tournoi comme “mon opportunité”. Si ça doit arriver, ça arrivera et sinon, il y en aura d’autres ».

L’éviction des monstres sacrées sur cette fin de Day 5 a également rassuré le grinder de Londres. « J’ai vu Teun Mulder partir. Avant ça, j’ai vu Steve O’Dwyer partir. C’est bien de ne pas à avoir à jouer contre eux. Il reste encore Niall Farrell, et j’ai vu que contre lui, j’avais parfois du mal à défendre la range que je devrais. Ces gars-là sont impressionnants.

- Moi, j’en ai rien à foutre du nom du mec, coupe Serge Chechin. Il peut avoir 50 millions ou 0, ça change rien. Je regarde son style de jeu, les cartes qu’il montre et je m’adapte.

Chechin

Récréatif assumé, Serge est venu pour kiffer. Et c’est exactement ce qu’il fait depuis quatre jours maintenant. « Je ne sens aucune pression. Je vais chercher la gagne » lance encore le joueur, loin d’être impressionné par les enjeux. Il faut dire que Serge est déjà passé par là.

Il y a un an et demi, nous suivions déjà Chechin traversant les journées d’un grand tournoi international. Le plus grand de tous même, puisque Serge atteignait le Day 6 du Main Event WSOP. Le revoilà aux portes d’une énorme perf’, sur le plus prestigieux des circuits européens.

Depuis le début de journée, Serge s’est assis aux côtés de tops regs, de grinders affutés, de légendes du jeu, de joueurs dont la connaissance technique est infiniment supérieure à celle de l’entrepreneur sudiste. Et pourtant, il n’y a pas un moment où Serge s’étonne de se retrouver à la table des grands. Il y a toute sa place et la méthode Chechin que nous décrivions dès ce premier coup de la journée face à Jon Kyte montre une nouvelle fois toute son efficience.

Sa capacité à s’adapter, à tronquer les lignes, à changer de rythme, à « zigzaguer » comme il le dit lui même, le rend aussi dangereux qu’imprévisible. Avec ces armes bien à lui, il est en train de frapper un très gros coup, tout en prenant son plaisir. Même dans les duels à haute tension, Serge n’hésite pas à lâcher une petite phrase, à oser une question, un commentaire ou une posture typique de ces joueurs de Live, pour en tirer parfois un petit avantage.

Et quand la tension redescend, il est le premier à faire une petite blague pour détendre l’atmosphère où lâcher un compliment, comme à son nouvel ami Mark Helou, avec qui il a passé toute la fin de journée.

Chechin

Le Libanais ferme la marche d’un chipcount bien resserré. La moitié des joueurs se situent entre les 40 et les soixante blindes. Marle Spragg a profité de ce set-up inouïe pour revenir au 2 millions, Niall Farrell a pris un dernier 60-40 à vingt minutes du termes pour passer les 2,5 millions, Wagner, O’Neill et Jakovlevic sont dans les mêmes eaux.

Kyte

Jon Kyte peut avoir le sourire. Porté par une réussite indécente, le Norvégien a littéralement écrasé ce Day 4.

Dans le ciel du tournoi, le Norvégien Jon Kyte (photo) s’est envolé. Un premier flip à 2,5 millions face à Cesar Garcia. Un autre à 5 millions contre Kudzmanas donc. Clairement, les dieux du poker ont choisi leur client aujourd’hui et le Scandinave reviendra avec un tapis colossal de 6,5 millions de jetons, soit 2,5 millions d’avance sur le deuxième, Grigorii Rodin.

Voilà pour la concurrence. « Bon allez, maintenant on va boire une bière ? » lance Chechin. Décidément, Serge n’est pas fini de kiffer.