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PokerStars European Poker Tour Barcelone 2022-Main Event - 5

Jimmy Guerrero nous régale d’entrée de jeu

Début de Day 5 canon pour l'un des deux derniers Français en course Main Event EPT 5 300 € (Day 5 - il reste 14 joueurs)

Jimmy Guerrero
À midi, la probabilité que Jimmy Guerrero accède à sa deuxième finale European Poker Tour pouvait être catégorisée sous le label "mince". Une heure et demie plus tard, elles sont désormais rangées dans la catégorie "pas du tout négligeable". C'est que le fantasque pro est parvenu à nous sortir de son chapeau une enfilade de coups magiques en table télévisée, et ce d'entrée de jeu.

Il faut d’abord parler de ce double up. Avec ses 14 blindes, Jimmy en avait bien besoin et il l’a obtenu dès la première orbite, après avoir envoyé les jetons avec 87. Avec son As-Valet, le chip-leader Michael Pinto a un call facile depuis la BB, mais le croupier retourne le meilleur flop possible pour le Français : un 6, un 9 et un 10 lui apportant immédiatement la quinte. Après deux cartes anodines, Jimmy peut respirer.

Tigran Harutyunyan
Quelques minutes plus tard, une autre rencontre, de type inévitable : Tigran Harutyunyan (photo) reshove pour 16 blindes au bouton après une relance cutoff, et Jimmy l’imite depuis la petite blinde. Les jeux ? As-10 pour Harutyunyan, As-Dame pour Guerrero. Le flop 5-5-3 laisse entrevoir la possibilité d’un split, mais le turn 6 et la rivière 4 laissent l’avantage du côté de Jimmy. Tandis que l’Arménien part collecter le prix de 68 000 € correspondant à sa 16e place, Jimmy Guerrero peut enfin rejouer au poker qu’il aime, avec un tapis remonté à près que 4 millions.

Ce qu’il ne tardera pas à faire sur une main ô combien représentative de son style de jeu : relance au bouton avec J10, puis call du 3-bet à 650 000 envoyé par Kayhan Mokri en BB. Le flop tombe 9

53 : Mokri c-bet à 460 000 et Guerrero décide de float. Bien vu : le turn est un 8, lui ouvrant un tirage et la possibilité de bluffer. Ce qu’il fait avec une grosse mise de 875 000. Mais, pas né de la dernière pluie, Mokri paie, estimant avec justesse que son As-Roi est bon. Heureusement pour notre héros, la rivière est un J : les deux joueurs checkent et Jimmy remporte l’abattage.

Ce troisième showdown gagnant en moins de 90 minutes lui permet de partir en pause avec 6 millions, ce qui représente 60 belles blindes au niveau 50 000 / 100 000 qui débutera bientôt.

Carence en sel

Jack Salter est éliminé en 15e place (81 450 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Jack Salter
On a perdu le plus gros palmarès du field ! Comme Jimmy Guerrero, Jack Salter entamait les Day 5 avec un besoin urgent de jetons. Au contraire de Jimmy Guerrero, le premier coup à tapis préflop de l'Anglais fut aussi le dernier. Son Q10 joué à fond en SB était bien en peine face aux Rois avec lesquels Patrik Jaros avait relancé au bouton : ils n'ont trouvé aucune aide sur le board 5-2-As-9-10. "La salière" (copyright Benny & Yu) collecte un peu plus de 81 000 balles pour sa 15e place.

Rocha rossé

Lucas Silva Rocha est éliminé en 14e place (81 450 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Lucas Silva Rocha
C'est un Jimmy Guerrero surexcité (enfin, encore plus que d'habitude) qui est parti profiter de sa première pause de la journée, ayant collecté un second scalp juste avant le gond. Celui de Lucas Silva Rocha, mourant avec 8 blindes et dont le A5 n'a pas trouvé d'amélioration face à la pocket paire de 3 de Jimmy, malgré un flop 9-7-7. Le turn 2 et la rivière 8 seront les dernières cartes qu'il verra sur cet EPT barcelonais. Rocha inscrit son nom en 14e place au palmarès du tournoi : les 81 450 euros remportés représentent son high score de carrière.

Machado renversé

Peterson Machado est éliminé en 13e place (97 650 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Peterson Machado
La belle chevauchée de Peterson Machado, chip-leader à 64 joueurs restants, s'est terminée en 13e place. Réduit à moins de dix blindes (il n'en avait pas beaucoup plus à la reprise ce matin), le Brésilien voit un flop 56Q gratuit depuis la grosse blinde, pas si moche pour son 97. Son voisin de droite Paul Fischill check, motivant Machado à opter pour le semi-bluff à tapis. Mais Fischill a lui aussi beaucoup aimé le flop : avec son 52, il a un call évident.

Le turn J et la rivière 10 ne matérialisent pas la ventrale de Machado. Pour son premier résultat hors de son pays, il remporte près de 100 000 euros. Un high score de carrière !

Et Bruno pégua

Bruno Pega est éliminé en 12e place (97 650 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Bruno Pega
Au poker encore plus qu'ailleurs, le bonheur des uns fait immanquablement le bonheur des autres. Dernier exemple en date avec Maher Nouira : en passant l'épreuve fatidique du flip (10-10 contre As-Valet), le Franco-Tunisien a enfin lancé un Day 5 entamé shorts-stack, doublant à 3 millions et laissant Bruno Pega pour mort dans le même temps.

Quelques secondes plus tard, l'Argentin est à tapis pour à peine plus que le montant de la grosse blinde : il est payé deux fois (par Fabiano Kovalski et Paul Fischill). Avec As-9, Pega parvient miraculeusement à tripler face à 7-6 et 8-3 (le board est tombé Dame-Valet-10-Dame, validant sa hauteur As), mais c'était reculer pour mieux sauter : une main plus tard, son Roi-4 ne s'améliore pas contre le As-7 de Patrik Jaros sur un board 3-7-8-6-6.

Un beau score de plus pour l'Amérique du Sud, décidément bien représentée sur la fin du Main Event : si Bruno Pega manque la finale, il se consolera avec un prix de près de 100 000 euros, le record d'une carrière qui totalisait jusque-là 33 000 $ de résultats, collectés principalement sur son continent.

Il ne reste plus que onze joueurs : nous sommes à deux éliminations de la table finale.

(Pour ceux qui n'entravent rien au titre de l'article :

péguer \pe.ɡe\ intransitif 1er groupe (voir la conjugaison)

(Occitanie) Coller ; être poisseux, collant.)

Une promesse pour l’avenir

Maher Nouira est éliminé en 11e place (117 140 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Maher Nouira
Le dernier coup joué par Maher Nouira sur l'EPT Barcelone ? Tout à fait conforme au style de jeu du bonhomme : imprévisible, gonflé, engagé. Recevant une paire de 9 en petite blinde, le Franco-Tunision opte pour le contre-pied : au lieu de relancer, il se contente de compléter le montant de la BB - 100 000. Son voisin Fabiano Kovalski checke son option.

Nouira restera camouflé sur l’intégralité du board : check/call (150 000) sur le flop K86, check/call (375 000) sur le turn J, et un dernier check sur la rivière, une Q. Sauf qu’après l’ultime mise de Kovalski (700 000), Nouira sort de son cosplay de slowplayeur avec un check/raise pour l’intégralité de ses jetons. Sa paire de 9 est ainsi transformée en un pur bluff.

Muni de K10, Kovalski va prendre tout son temps de réflexion, utilisant quantité de « time banks » de 30 secondes pour parvenir à une décision. Finalement, il jette un jeton vers le milieu du tapis. C’est payé. Le bluff osé de Maher Nouira n’a pas fonctionné. Il est éliminé en onzième place.

L’une des pires attitudes pour un joueur de poker est d’être « result oriented ». Une rengaine familière : bouh, il a perdu le coup, donc il a mal joué. Cheh, il n’a pas gagné, donc il est nul. Etc. Au moment d’analyser la sortie de Maher Nouira, résistons à l’envie d’être result oriented. Au poker comme ailleurs, une tentative manquée n’est pas forcément une tentative ratée. Voyons plutôt cette main, et le reste du tournoi de Maher, comme une promesse pour l’avenir : celle d’un joueur arrivé récemment sur le circuit live, il y a trois ans seulement, mais qui semble avoir le potentiel pour y imprimer sa marque au cours des années à venir, prendre de la bouteille face aux grands noms, et signer des coups d’éclats plus beaux encore que cette 11e place bonne pour 117 140 euros. Son troisième ITM sur un Main Event EPT… en seulement trois participations.

Maher Nouira : une affaire à suivre de près.

Sans Valentin

Valentin Cristea est éliminé en 10e place (117 140 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Valentin Cristea
Une journée à la marge. C'est ainsi que l'on pourrait résumer le parcours de Valentin Cristea en demi-finales de l'EPT Barcelone. Installé pile au milieu du classement en début de journée, le Roumain est resté sur le bord du terrain durant la majeure partie de son match. Lorsqu'il a joué son dernier coup, il ne lui restait plus que quatre blindes, qu'il a engagées avec K7 depuis la BB, après une relance de Patrick Jaros UTG. Ce dernier a payé rapidement avec A6.

Le flop KJ4 a laissé entrevoir à Cristera l’espoir d’un double up : l’A l’a tout aussi vite douché. Après un 2 en guise de rivière, son élimination en dixième place était confirmée.

Habitué à de belles places d'honneur à Barcelone (11e de l'Estrellas Main Event en 2014, 16e de l'EPT National en 2018), Valentin Cristea signe son high score de carrière aujourd'hui : il remporte 117 140 euros. Son élimination signifie que… la table finale est prête !

La table finale du plus gros EPT de l’histoire

Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Table Finale EPT Barcelone
Siège 1 : Kayhan Mokri (Norvège) 1 980 000 (17 BB) Siège 2 : Jimmy Guerrero (France) 6 100 000 (51 BB) Siège 3 : Patrik Jaros (Rép. Tchèque) 16 555 000 (138 BB) Siège 4 : Fabiano Kovalski (Brésil) 4 925 000 (41 BB) Siège 5 : Scott Margereson (UK) 12 445 000 (104 BB) Siège 6 : Giuliano Bendinelli (Italie) 4 800 000 (40 BB) Siège 7 : Michael Pinto (Pays-Bas) 8 940 000 (75 BB) Siège 8 : Paul Fischill (Autriche) 5 495 000 (46 BB) Siège 9 : Neville Mateus (Brésil) 7 580 000 (63 BB)

Les organisateurs souhaitent que seulement six joueurs reviennent dimanche pour la dernière journée. Trois éliminations nous séparent donc de la fin officielle du Day 5. Au vu de la profondeur des tapis, très importante (le rythme fut rapide hier, ceci explique cela), il est possible que nous devions attendre de longues heures avant d'assister aux trois éliminations restant au programme…

Les prix

Vainqueur : 1 714 000 €
Runner-up : 1 027 740 €
3e : 734 470 €
4e : 565 280 €
5e : 434 850 €
6e : 334 480 €
7e : 257 330 €
8e : 198 000 €
9e : 152 310 €

C’est dit Fischill

Paul Fischill est éliminé en 9e place (152 310 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Paul Fischill
Une table finale qui démarre au ralenti, avec trois heures sans éliminations (mais tout de même pas mal d'action, voir ci-dessous), et puis, dès le retour de la pause-dîner : un croupier qui donne une bonne main à chaque joueur de la table. Ou presque. Jugez plutôt :

Michael Pinto relance avec JJ.
Paul Fischill (photo) 3-bet avec AK, presque à tapis car il se laisse seulement trois blindes.
Et Patrik Jaros se réveille avec… deux Rois. Logiquement, il 4-bet.

Incroyablement, Pinto arrive à se débarasser rapidement de ses Valets, laissant Fischill foncer dans la gueule du loup - il n'a d'autre choix que de payer, et ne trouve aucune aide sur un board 2-10-5-6-7.

Pour sa première place payée en live (!), Paul Fischill remporte 152 310 euros.

Nous sommes à deux éliminatons de la mise en pause de la partie. Avec ses 19 blindes, Jimmy Guerrero comme un forcené.

Trois ou quatre trucs intéressants observés en finale avant la sortie de Fischill :

Michael Pinto fait folder la top paire top kicker rivière à Scott Margereson en transformant As-Roi en bluff
Kayhan Mokri chatte le double up pour 30 BB contre Jimmy Guerrero avec Roi-5 contre As-2
Kayhan Mokri, encore trouve les Rois et double à nouveau contre un Michael Pinto qui n’arrive pas à fold la top paire J-9 sur 9-6-3
Kayhan Mokri, toujours, qui trouve encore les Rois et défonce les Dames du pauvre Scott Margereson !

Margereson

Scott Margereson éliminé en huitième place (198 000 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Scott Margereson
Un chip-leader qui s'écroule, c'est toujours inattendu... mais si on y regarde de plus près, cela arrive sur chaque tournoi. C'est lorsque la chose ne se produit pas qu'elle est remarquable ! Et le favori déchu de l'EPT Barcelone 2022 se nomme... Scott Margereson.

Dans le Top 10 à l'issue du Day 3, quatrième sur 16 à l'issue du Day 5, en position dominante tout au long de la journée, le Britannique se contentera au final d'une huitième place assortie de 200 000 euros. Sur la dernière ligne droite avant le crash, il s'est fait bluffer par Michael Pinto et est tombé du mauvais côté d'un abominable setup, avec les Dames contre les Rois de Kayhan Mokri.

C’est justement Mokri qui a l’a définitivement réduit hors d’état de nuire, avec un QJ relancé pour 400 000 (2 BB) au hijack. Margereson défend sa BB avec 108.

Le flop tombe 6J9 : Margereson a trouvé un beau tirage, il opte pour un donk-bet shove avec ses 6 BB. Avec une top-paire floppée, la décision de Mokri s’impose d’elle-même.

Le turn est un 3, et la rivière un 8 : cette inutile paire est la dernière que Scott Margereson fera dans ce tournoi.

Désormais plus riche de 198 000 euros, l’Anglais est l’un des seuls joueurs du Day 5 qui n’améliore pas son high-score de carrière puisqu’on l’a déjà vu remporter un gros WPT aux States en 2018 pour 700 000 $, et disputer trois finales WSOP, dont celle du Colossus, en 2018 aussi.

Et après Pinto c’est finito

Michael Pinto est éliminé en septième place (257 330 €) Main Event EPT 5 300 € (Day 5)

Michael Pinto
La fin de la journée nous est tombée dessus sans crier gare. Au lieu de l'attendu coup à tapis préflop, le genre de showdown classique qui laisse le temps à tout le monde de se rapprocher de la table pour ne rien rater du spectacle, le temps que les caméras donnent le signal pour retourner les cartes communes, la dernière élimination de la journée s'est produite sur la rivière, lorsque Michael Pinto a décidé de tenter le bluff de la dernière chance.

Avec son QJ, une maigre hauteur sur un board K63, le Hollandais a longtemps fait gamberger Fabiano Kovalski. Mais le bourreau de Kalidou Sow et de Maher Nouira l’a démontré à maintes reprises ces derniers jours : il n’est pas jouer à se laisser marcher sur les pieds, ni à opter à chaque fois pour la solution la plus facile. Alors il a réfléchi. Il a repensé à la séquence du coup : relance au cut-off de Patrick Jaros, call de lui-même en SB, call de Pinto en BB, tout le monde checke le flop et Pinto sort du bois sur le turn. Il aurait pu jeter sa hauteur As… mais il ne l’a pas fait. Et c’est ainsi que le Day 5 s’est terminé, sur le coup de 23 heures 30, sous les cris et les bravos d’un rail très fourni laissant espérer une dernière journée gaie, bruyante et colorée. D’autant que Jimmy Guerrero sera de la partie : on vous en parle plus en détail dans le prochain article.

Comme la majorité des demi-finalistes que nous avons suivis aujourd’hui, Michael Pinto va ramener à la maison le plus gros gain de sa carrière de joueur de poker : 257 330 euros.

Un guerrier qui n’a cessé de se relever

Après des demi-finales chargées en sensations fortes qui l'ont vu tomber à trois blindes, Jimmy Guerrero disputera dimanche la deuxième table finale EPT de sa carrière Son stack sera réduit mais sa rage de vaincre est sans limites Main Event EPT 5 300 € (Fin du Day 5)

Jimmy Guerrero
Oh, qu'elle fut mouvementée, cette journée ! Qu'il a souffert, Jimmy Guerrero ! Mais comme il a vibré, aussi. Le professionnel n'en est pas à sa première garden party sur les pelouses de la planète high stakes, mais les émotions qu'il a vécues durant les dernières heures des demi-finales de l'EPT Barcelone rempliront des chapitres entiers dans le Livre d'Or de sa carrière. En haut, en bas : les tours de montagnes russes se sont enchainés mais Jimmy a tenu bon la barre sans choper le tournis, ni la nausée, y compris lorsqu'il a brièvement chuté à trois minuscules blindes. Souvent en difficulté, il a dû ronger son frein de longues heures, rester patient en attendant une situation favorable, et mettre en veilleuse son habituel moulin à paroles. À plusieurs reprises, son tapis a été engagé et il a dû survivre à l'épreuve du showdown. Il a été chanceux. Mais il a aussi été malchanceux... avant de chatter de nouveau derrière. Avec, au bout du compte, une qualification en bonne et due forme pour la finale. Jimmy entamera la dernière journée avec le plus petit tapis parmi les six derniers joueurs. Mais son enthousiasme et sa motivation sont intacts.

Ce matin, à l’entame du Day 5, Jimmy était déjà short-stack : il savait qu’il lui faudrait se bouger rapidement, sur le thème « ça passe ou ça casse. » En seulement 90 minutes, le premier objectif était atteint : plutôt que de casser, Jimmy était passé, en ayant successivement doublé son tapis (avec un quinte floppée grâce à 8-7), éliminé un joueur (As-Dame contre As-10), et remporté un abattage face à As-Roi. Ces trois coups enchaînés en peu de temps lui avaient déjà donné largement de quoi vibrer (et à nous aussi !). À l’image de Maher Nouira, l’autre Français des demi-finales, son petit tapis aurait très bien pu se transformer en une place d’honneur et une élimination avant la finale. Au lieu de ça, Jimmy a pu prendre place autour de la dernière table de l’EPT Barcelone sur le coup de 17 heures. Mais c’est seulement après le dîner qu’il allait vivre une suite de coups aussi décisifs qu’invraisemblables.

Jimmy Guerrero
C’est rien de le dire : Jimmy Guerrero a souvent eu l’occasion de jouer avec le triangle « all-in » aujourd’hui

Avec 15 blindes et un AQ reçu de petite blinde, Jimmy n’a pas eu une décision difficile quand il a vu tous les joueurs avant lui jeter leurs cartes : tapis, évidemment. Muni de la plus petite paire possible, son voisin de gauche Patrik Jaros a tenté l’élimination. Flop : Valet-8-3, rien pour Jimmy… Turn… une Dame ! Après un 4 en guise de rivière, le voilà qui respire.

Ce double-up (puis un showdown gagnant quelques minutes plus tard) allait fournir au Français le capital pour jouer le plus gros pot de son tournoi… Un coin-flip, oui : 99 contre As-Roi… mais un coin-flip à 13 millions, qui tombera du côté de Fabiano Kovalski avec l'apparition d'un Roi sur la rivière.

Dans leurs têtes, les adversaires se frottaient probablement les mains : la fin de journée semblait proche. Laissé pour mort avec trois blindes, Jimmy parviendra pourtant à tripler dès la main suivante. Pas véritablement tiré d’affaire - le pot gagné ne représentait que dix blindes - il se mettre vite en danger de nouveau avec A8, se retrouvant loin derrière le AJ. Là encore, la rivière sera déterminante. Mais en sa faveur : un 2 complétant un board 2676 et lui offrant un split pot miraculeux sous les broncas du public.

Jimmy Guerrero
Quelques minutes plus tard, Michael Pinto jouait son dernier coup (voir plus bas). Et Jimmy pouvait réagir à chaud au micro de Winamax. « C’était mouvementé, c’est sûr. J’aurais préféré gagner le 99 contre As-Roi, c’était un pot de 13 millions et on se serait couchés plus tôt ! Mais c’était dingue. La chaleur, la fatigue, tout le monde qui crie… Une ambiance de dingues. » Il s’agit de la deuxième finale EPT de Jimmy. Comment a-t-il évolué en tant que joueur depuis son podium à Monte Carlo en 2016 ? « Monte Carlo, c’était ma première grosse finale. Je ne savais pas comment me préparer, j’étais stressé. J’ai fait des erreurs. Il y a des spots que je ne savais pas jouer, alors je me contentais de les lâcher. Aujourd’hui, je suis plus détendu, plus calme. Avant, je prenais chaque main l’une après l’autre. Désormais, j’arrive à table avec un plan de jeu global. » Il lui a fallu être chanceux aujourd’hui… « Oui, j’ai run good. Il y a eu ce gros coin flip perdu, mais dans l’ensemble j’ai chatté pile au moment où il le fallait vraiment. C’était intense, d’ailleurs. Je n’aime pas trop montrer mes émotions… mais parfois c’était trop ! »

Tous ceux qui ont regardé Jimmy en stream le savent : il est l’un des pros les plus bavards du circuit, toutes nationalités confondues. Stratégie, ou disposition naturelle ? « Quand j’ai peu de jetons, je me tais, je veux rester concentré pour ne pas faire d’erreurs. Mais quand j’ai un tapis, j’aime créer une atmosphère à table. C’est mieux pour les spectateurs qui regardent à la maison. C’est mieux pour moi aussi. C’est mieux pour tout le monde ! Je joue mieux quand je suis à une table fun. Personne n’aime les tables silencieuses ! Et je pense qu’on a l’une des tables finales les plus fun de l’histoire de l’EPT. »

Dimanche, en cas de cinquième place ou mieux, Jimmy Guerrero battra son record de gains sur un seul tournoi live. Mais on le devine : rien d’autre que la première place ne satisfera ce joueur encore en quête, à 40 ans, d’une consécration définitive sur le circuit pro. Un titre majeur lui manque encore mais aucun joueur sérieux n’osera nier que Jimmy est l’un des plus redoutables compétiteurs au sein du clan Français. Un joueur aussi à l’aise en tournoi que sur les cash-games les plus chers (s’il a attendu le Day 2 pour s’inscrire à l’EPT Barcelone, c’est parce qu’il affrontait Neymar Jr en 100/200 € les jours précédents), ayant accumulé 1,7 million de dollars en tournoi depuis ses premières apparitions dans les cercles parisiens au début des années 2010. Petit à petit, nous l’avons observer grandir, grimper les échelons, arriver à maturité. Le trophée qui viendrait valider ses efforts, ce n’est plus qu’une question de temps avant qu’il n’arrive. Pourquoi pas dimanche ?

Thi Nguyen
Elle aussi est une joueuse pro crainte et respectée : Thi Nguyen sera bien entendu dans le rail pour soutenir son mari Jimmy

Les six derniers prétendants

Rail Brésil
Une chose est certaine : la finale du plus gros EPT de l’histoire sera bruyante. Tout du moins tant que Fabiano Kovalski et Neville Mateus seront présents à table : les kops brésiliens sont réputés pour leur enthousiasme et leur excès de décibels. Et les potes de Giulano Bendinelli ne seront pas en reste, si l’on en croit ce qu’on a pu observer lors du Day 5. Pour le reste, nous avons affaire à une configuration très équilibrée : à l’exception de Jimmy Guerrero, que tout le monde surveillera comme le lait sur le feu avec ses 20 BB, tous les prétendants se situent dans une fourchette confortable, entre 40 et 60 BB. En un mot comme un cent : aucun favori évident ne se détache. Ma prédiction ? Je resterai volontairement nébuleux : cette finale sera gagnée par celui qui a le plus envie de la gagner… et j’ai envie de croire qu’il s’agit de Jimmy.

Siège 1 : Kayhan Mokri (Norvège) 14 575 000 (58 BB)
Siège 2 : Jimmy Guerrero (France) 5 100 000 (20 BB)
Siège 3 : Patrik Jaros (Rep. Tchèque) 14 975 000 (60 BB)
Siège 4 : Fabiano Kovalski (Brésil) 12 925 000 (52 BB)
Siège 5 : Giuliano Bendinelli (Italie) 10 700 000 (43 BB)
Siège 6 : Neville Mateus (Brésil) 10 550 000 (42 BB)

Les prix

Vainqueur : 1 714 000 €
Runner-up : 1 027 740 €
3e : 734 470 €
4e : 565 280 €
5e : 434 850 €
6e : 334 480 €

La finale débutera dimanche à 12 heurs 30. Suivant la règle habituelle, le streaming EPT Live produit par PokerStars débutera avec 30 mon de décalage, afin de pouvoir afficher à l'écran les cartes des joueurs. Avant le coup d'envoi, je publierai les fiches biographiques de chacun des finalistes, préparées par les équipes de l'EPT. Elles seront fort utiles : si on met de côté Guerrero et Bendinelli, cette table finale ne rassemble que des talents inconnus de nos services avant cette semaine.

Benjo

Jaros à sec

Patrik Jaros est éliminé en 5e place (434 850 €) Jimmy Guerrero passe chip-leader ! Main Event EPT 5 300 € (Finale)

Patrik Jaros
"Where is Jaros ?" "Jaros, you're a pro, where are you ?"

Incroyable : le chip-leader à l'entame du Day 6 a tellement peu joué de mains aujourd'hui que ses adversaires se sont mis à le charrier en direct, devant les caméras. Tous se sont marrés de la pique, y compris Patrik Jaros. Et nous aussi, bien sûr : des ambiances bonne enfant comme celle-ci, on n'a pas souvent l'occasion d'en observer sur des tables finales où il y a 1,7 million d'euros à aller chercher.

Traversant un aride désert de cartes, Jaros a ainsi vu fondre son tapis de 20 millions de moitié en une poignée d'orbites assassines - à ce stade du tournoi, jeter ses cartes cinq fois de suite coûte 1,25 million. Pour étancher sa soif, le Tchèque va se retrousser les manches et payer un bluff rivière de Neville Costa.

Une bonne décision qui le fera remonter à 15 millions… mais c'était reculer pour mieux sauter. Recevant enfin une main potable - une paire de 6 - Jaros envoie tout depuis le bouton. Il va foncer droit dans le mur où l'attendait Jimmy Guerrero, qui avait relancé au cut-off avec une paire de 9.

Joué préflop, le plus gros pot du tournoi - 32 millions ! - va confirmer l'avantage de la meilleure main de départ détenue par Jimmy, après un board As-Roi-Dame-Roi-8.

Les tapis des joueurs sont proches : il faut compter et recompter. Après une minute, le verdict tombe : alors que Jimmy Guerrero s'installe dans un très beau fauteuil de leader (66 blindes !), Patrik Jaros est éliminé en cinquième place. Le professionnel pourra peut-être regretter un plan de jeu un poil trop conservateur pour sa première finale majeure. Pour l'aider à digérer, les 434 850 euros qu'il collectera à la caisse ne seront pas de trop.