[ITW] Régis Léon, créateur de Dans la Tête d'un Pro
Par Benjo DiMeo dans Général
À l'approche du 300ᵉ épisode de la série numéro 1 du poker, son artisan nous en dévoile les coulisses dans un entretien fleuve.
La semaine prochaine, Dans la Tête d'un Pro fêtera son 300ème épisode. Une longévité exceptionnelle pour un programme qui, malgré le succès et une réalisation toujours plus léchée, reste une oeuvre artisanale, créée par des passionnés pour des passionnés. Derrière la série numéro 1 du poker, il y a R2D2, la société de production de Sébastien "Paco" Raban et Régis Léon, deux vidéastes issus des sports de glisse qui ont croisé la route du Team Winamax dès la naissance de l'équipe en 2007. Entourés d'une petite équipe de cadreurs et monteurs fidèles, ils continuent aujourd'hui de diriger la production de leur bébé. C'est avec Régis, initiateur du projet en 2010, que nous nous sommes posés pour revenir sur la riche histoire de "DLTDP". Les petites galères, les gros fous rires, les évolutions technologiques, les attentes toujours croissantes d'un public de plus en plus nombreux : attention, entretien XXL !
Les propos retranscrits ci-dessous sont issus de deux entretiens distincts, menés par TapisVolant durant l’EPT Chypre (octobre 2024) et Benjo durant le WPO Aix-les-Bains (septembre 2025). Ces conversations ont été condensées et reformulées.
Régis, on te retrouve sur le WPO Aix-en-Provence. Sans ta caméra, et sans l’équipe habituelle qui t’entoure… puisque cette fois, c’est toi qui fais le pro. Je me rappelle qu'il y a une époque, tu jouais assez cher online, non ?
Oui, en 2010 je suis monté jusqu'en NL100 et NL200. Par manque de temps, j'ai fini par décrocher. Mais le jeu me passionne toujours. Je me suis remotivé récemment, j'ai redéposé 100 € et je suis revenu par la petite porte, en NL5. J’arrive à multitabler sur huit tables, parfois dix. La bankroll monte un peu, je suis passé en NL10. Ça me rappelle qu'à force de filmer du poker, d’entendre les pros commenter, de caler leurs voix… tu finis par comprendre des choses. Je n’ai pas leur niveau, loin de là, mais je joue correctement.
Et ça te donne envie de jouer en live, donc.
Un week-end entier à jouer au poker comme ici à Aix, je ne l’avais jamais fait. Quand on bosse dans le poker et qu’on y passe déjà des semaines entières, c’est pas évident d’avoir la motivation pour jouer derrière. Mais plein de fois au cours des dernières années, je me suis dis “allez, je m’y remets”. Le seul problème, c’est le temps. Aix-les-Bains, c’était la bonne occasion : plus simple à organiser que Marrakech ou Bratislava.
Tes adversaires n’arrêtent pas de te poser des questions sur DLTDP, je me trompe ?
Je ne suis pas du genre à débarquer et annoncer “Salut c'est Régis, c’est moi qui fais la série”. Mais comme beaucoup de monde vient me dire bonjour pendant la journée - toi, Davidi, d’autres pros - les gens deviennent curieux, ils te demandent si tu bosses dans le poker, ce que tu fais. Un truc qui me fait halluciner : tous les joueurs de moins de trente ans me disent la même chose, à savoir : “Quand j’ai commencé à jouer au poker, mon père m’a dit ‘Ha, mais je regarde DLTDP !’” Quand je ne suis pas en tournage, je bosse chez moi tranquille, je ne suis pas au contact du milieu. C’est quand je viens sur un tournoi comme celui d'Aix que je prends la mesure de ce que le programme est devenu. Quand on a commencé, on n’aurait jamais pu imaginer l’évolution : YouTube, puis la diffusion à la télé, puis les WSOP, puis le Main Event… On essaie de mettre tous les bons ingrédients, mais on ne peut pas prédire le succès. On arrive à 300 épisodes. C’est beaucoup pour un produit qui, au bout du compte, est simplement du poker. Mais à chaque fois qu’on démarre une nouvelle saison, le public est toujours au rendez-vous.
Il y a des questions qui reviennent souvent de la part des fans ?
Il y a énormément de curiosité sur le timing d’enregistrement des voix : est-ce que les pros font ça dès le lendemain du tournoi, la semaine suivante ? Quand j’explique qu'ils viennent en studio longtemps après, plusieurs mois après le tournoi, cela étonne. “Ha, mais du coup, comment ils font pour se souvenir de ce qu’il s’est passé ?” Et je leur explique que d’une part, ils notent leurs mains au fur et à mesure sur une appli dédiée et ils peuvent revoir la vidéo juste avant de passer au studio pour se rafraîchir la mémoire. Et d’autre part, on parle quand même du top mondial des joueurs. Adrian Mateos, peu importe la main, il sait très bien pourquoi il a misé tel montant, même longtemps après. Il n’a pas besoin d’improviser une explication en studio.
Concernant l’enregistrement des voix, le process a dû évoluer au fil des années, non ?
Au tout début, on ne leur montrait pas les images. On voulait que ce soit spontané, qu’ils redécouvrent en direct. Mais comme on enregistre plusieurs mois après, c’était trop compliqué. Les joueurs pouvaient oublier certains détails. Donc maintenant, on leur envoie les montages en amont, et ils peuvent prendre des notes virtuelles. Quand ils arrivent en studio, on fait défiler leurs notes sur un écran. Ils se replongent dedans plus facilement. En général, une journée de tournoi, ça fait environ quatre heures de voix à enregistrer. Ils enregistrent ça d’une traite. Et ce qui est drôle, c’est que la fatigue s’entend : au début, ils sont frais, et au bout de trois heures, tu sens que ça devient plus dur, ils sont un peu “rôtis”. Comme au poker finalement, où la concentration baisse en fin de journée ! On leur fait un peu revivre l’état dans lequel ils étaient pendant qu’ils jouaient. Dans l’ensemble, il y a très peu de ratés. Parfois, c’est juste un détail : "J’ai As-2 au bouton", alors qu’en réalité il est de petite blinde. Dans ce cas-là, on refait. Ou alors, il part dans une explication trop longue et ça ne colle pas avec la durée du coup. Mais globalement, les enregistrements sont assez fluides.
"Ça y est, on va se faire virer, le programme est fini"
Quand vous tournez à Vegas, on vous aborde souvent ?
Avant, c'étaient surtout les Français qui venaient nous voir pour nous dire qu’ils adoraient. Aujourd’hui, même les Américains nous arrêtent. On se fait accoster deux ou trois fois par jour par des joueurs ricains qui adorent le programme. Ça, c’est nouveau, et ça fait plaisir. Même un pro comme Andrew Lichtenberger est venu nous féliciter pour le show. Quand un joueur de ce calibre te dit que c’est pour lui "le meilleur contenu poker actuel", franchement, ça fait quelque chose.
Raconte-nous un peu la toute première saison à Vegas.
C’était en 2014, quatre ans après le début de la série. Pour marquer le coup, on avait pu faire ça avec Patrick ■■■■■. D’ailleurs, anecdote marrante : Patrick devait arriver deux jours avant de commencer à jouer, mais finalement, à cause de son emploi du temps, il n’a atterri que le matin même du tournoi sur lequel on devait le filmer. Nous, on était déjà dans la salle, on attendait. On envoie Junior [aka Vincent, cadreur et monteur de la première heure du programme] et le coach Stéphane Matheu le récupérer à l’aéroport. Dans le taxi, Junior lui explique rapidement le concept : "à la sortie de la voiture au Rio, tu traces, tu ne regardes pas Régis qui sera avec la caméra en train de filmer, tu files direct à ta table, et après, tu commenteras ce qui se passe dans ta tête". Patrick dit : "Oui, oui, j’ai compris, pas de souci". Mais en arrivant au Rio, il me fait coucou dès qu’il me voit, là je me dis : ça commence bien [rires]. Il faut savoir que le règlement WSOP a toujours été très strict avec les équipes vidéo. Je crois qu’on a été la première équipe à obtenir l’autorisation de filmer sur une longue durée. Normalement, c’est limité à cinq minutes par jour. On avait été briefés la veille par Seth Palansky, le coordinateur des médias à cette époque : pas d’interactions avec les joueurs, pas de perturbations, on doit rester discrets. Et nous, à part Greg Chochon [le “Frenchie” qui travaille au plus haut niveau des WSOP], personne ne nous connaissait. Et évidemment, dès la deuxième main, Patrick gagne un coup et me fait signe : "Viens, viens !". Il voulait montrer ses cartes à la caméra. On était morts de trouille, on s'est dit : ça y est, on va se faire virer, le programme est fini. Mais en fait, comme on est aux États-Unis et que les Américains adorent la télé, tout le monde a trouvé ça marrant. Les joueurs à table rigolaient, ils se prenaient au jeu, certains montraient aussi leurs cartes. Ça a détendu l’atmosphère et au lieu de nous fermer des portes, ça nous en a ouvert. Autre anecdote du tournage avec Patrick : le fameux “blocking call”, terme de son invention. On était allés dans le Sud pour enregistrer sa voix off. Il nous avait mis bien, on avait passé tout un week-end chez lui. Quand il a balancé le terme pendant l’enregistrement, avec Junior, on s’est regardés en mode “Mais ça n’existe pas !”. On a hésité à le couper, mais finalement on l’a laissé, et c’est devenu culte. Comme quoi, parfois, ce qui semble être une erreur devient un moment mythique du programme.
Comment vous choisissez le prochain joueur que vous suivez ?
Ça dépend de plusieurs choses. La première règle, c’est d’éviter de refaire les mêmes joueurs trop souvent. Par exemple, on n’allait pas reprendre Adrián sur l’EPT Chypre, parce qu’on l’avait déjà suivi longtemps sur le Main Event des WSO juste avant. Il faut faire tourner les effectifs. Surtout qu'il faut penser à la charge de travail des joueurs, le temps qu’ils nous consacrent. Comme je disais, une journée de tournoi, ça correspond à quatre heures en studio. Donc quand Adrián va jusqu’au Day 5, on arrive facilement à une vingtaine d'heures. C’est énorme. Les pros sont à fond, ils jouent le jeu, mais il faut quand même les ménager. Aussi, il y a l’actualité : autant que possible, on essaie de mettre en avant ceux qui viennent de signer une perf, qui sont dans une bonne dynamique. Ça enrichit l’histoire du personnage. Sinon, on privilégiera volontiers celui qu’on n’a pas trop montré dernièrement. Pendant le tournage, si le premier joueur choisi se fait éliminer, la réflexion est plus simple : on se tourne systématiquement vers celui qui a le plus gros tapis.
"Il n’y a pas que les cartes, il y a aussi la préparation, la fatigue, les discussions"
Le programme est toujours aussi bien reçu ?
Globalement, ça marche toujours super bien. Les gens attendent les sorties avec impatience. Dès les premières 24 heures, on peut faire 35 000 vues sur la version française. Et dans la semaine, ça va monter à 60 000. Donc clairement, l’attente est là. Après, évidemment, il y a des critiques. C’est normal. Certains trouvent que la musique est trop forte, d’autres qu’on ne montre pas assez de mains. Et à l’inverse, il y en a qui disent qu’on montre trop de choses en dehors du poker. Mais ce qui est drôle, c’est que souvent, la communauté se répond à elle-même. Quelqu’un va râler parce qu’on filme la villa à Vegas et que la première main arrive seulement après dix minutes d'épisode, et un autre va répondre : "Mais c’est génial de voir ça, nous on n’est jamais allés à Vegas, c’est mortel de découvrir l’envers du décor". Donc, tu vois, chacun a sa vision. Certains voudraient un programme centré uniquement sur la technique, d’autres adorent voir la vie autour, les discussions, les moments hors table. Tous les publics coexistent. Dans l’ensemble, l’accueil reste hyper positif.
Remets-nous un peu dans le contexte des premiers pas de la série en 2010 : comment l’idée a germé, comment vous vous y êtes pris au début…
On était une toute petite équipe, seulement trois personnes. Comparé à aujourd’hui, c’était vraiment artisanal. À l’époque, on avait déjà cette idée de ne pas montrer que le poker, mais aussi les à-côtés. Pas tout, bien sûr, parce que pendant un tournoi les joueurs ne font pas mille activités non plus. Mais au moins les repas ensemble, les moments de détente, on trouve que ça apportait un plus. Je trouvais intéressant de montrer la vie du joueur de poker au-delà de la table. Parce qu’il n’y a pas que les cartes, il y a aussi la préparation, la fatigue, les discussions. Par exemple, João, lui, avant Vegas, il bosse un mois et demi non-stop. Et pendant Vegas, tous les matins, il est sur son ordinateur à réviser les ranges, à s’entraîner. Ça fait partie de sa vie de joueur : je voulais que ça apparaisse aussi. En fait, l’idée m’est venue simplement en observant. Quand tu joues au poker, tu sais que dans ta tête ça bouillonne : les calculs, les émotions, les doutes. Et tu sais que le gars en face vit la même chose. Mais quand tu passes derrière une table en tant que spectateur, tu ne vois rien de tout ça. Tu ne connais pas leurs cartes, tu ne comprends pas leurs raisonnements. C’est frustrant. Et je me suis dit : pourquoi on ne donnerait pas accès à ce qui se passe dans leur tête ?. Voilà comment est né le concept.
Et techniquement, ça a beaucoup évolué ?
Énormément. Au début, on se disait que ce n'était pas bien grave si on ratait un ou deux coups. Tu pars manger, tu reviens… et tu réalises que le joueur a sauté sur un gros coup ! Impossible de raconter ça correctement si tu n’as pas les images. Donc on a vite compris qu’il fallait absolument tout filmer, du début à la fin. Ça veut dire être dix heures autour de la table, sans rater une seule main. En plus de ça, il fallait penser aux plans de coupe, les montages pour les intros et les fins d’épisodes… Pour faire tout ça proprement, il a fallu agrandir l’équipe. D’abord quatre, puis cinq, jusqu’à aujourd’hui où on est sept. Mais idéalement, on devrait être huit. Parce qu’en vrai, rester debout dix à douze heures par jour à filmer, c’est épuisant. Si on pouvait tourner à quatre autour de la table, avec des rotations, ce serait l’idéal. Sur des tournois classiques, ça va encore. Mais sur le Main Event des WSOP, c’est infernal. Six ou sept jours d’affilée à raison de quatorze heures par jour, c’est intenable. Tu finis par accumuler de la fatigue, tu dors six heures par nuit et tu commences à faire des erreurs. Bref, c’est difficile à gérer. Mais on n’a pas le choix : si tu rates une main clé, le programme perd tout son sens. Et puis à côté, tu veux aussi de belles images pour habiller l’ensemble. Ça demande du monde, du matériel, de l’organisation. Aujourd’hui, on a un vrai dispositif de production.
Récemment, vous avez ajouté les stacks et les positions sur l'écran.
Oui, ça a été un gros débat, né d’une demande de Winamax. Moi, au départ j’étais contre. Parce que notre concept de base, c’est de se mettre vraiment dans la peau du joueur. Et le joueur, lui, il n’a pas une infographie avec les stacks exacts affichés. Il évalue, il fait une estimation du tapis adverse, mais il ne connaît pas toujours le chiffre précis. La preuve : souvent, ils demandent : "Tu joues combien ?". Du coup, pour moi, mettre ça à l’écran, c’était trahir un peu l’expérience véritable du pro. Pareil pour les mains adverses : on ne les montre jamais. Parce que dans la tête du joueur, elles n’existent pas. Il évalue une range, pas deux cartes précises. Mais bon, on a fini par se ranger derrière cette idée d’afficher les stacks, parce que c’est vrai que pour le spectateur, ça aide à suivre. Et finalement, c’est bien reçu. C’est un compromis entre la fidélité à l’expérience du joueur et le confort de celui qui regarde.
"Parfois, le poker ce n’est pas super divertissant"
Sur le plan éditorial, comment vous gérez l’exigence du public ? Les gens attendent forcément toujours plus, toujours mieux. Quand vous filmez quelque chose de très, très qualitiatif, comme Adrian sur le Main Event des WSOP 2024, comment vous gérer le fait que derrière, c’est quasiment mission impossible pour faire aussi bien dès le tournoi suivant ?
On essaie de se rappeler ce que dit le coach à ses joueurs avant chaque partie : il faut se concentrer sur ce qui est de notre ressort, sur ce qu’on peut contrôler, et oublier le reste. Donc pour nous, cela signifie filmer du mieux qu’on peut, tout mettre en place pour avoir le meilleur programme possible. Les cartes, on ne les contrôle pas. On est totalement détachés de ça, de l’aspect “run good” des joueurs. Et Winamax est OK avec ça aussi, ils ne nous ont jamais demandé une obligation de ne montrer que les perfs’. Heureusement ! Ils savent que sur la durée, en termes de résultats, il y aura du bon et du moins bon. Parfois, les cartes ne vont pas dans le sens du joueur, et ça, on ne peut rien y faire. Et quand le public découvre les épisodes, nous, on ne peut pas savoir comment ils vont réagir vis-à-vis du niveau proposé. Tout ce qu’on peut faire, c’est donner le maximum pour proposer un programme attractif, en l’améliorant saison après saison.
Mais tout de même, par rapport aux premières années, il y a un processus de décision qui s’est mis en place. Vous faites des choix. Vous ne diffusez plus l’intégralité des tournois que vous avez filmés.
Ce genre de décisions, on les prend avant tout pour protéger le programme.
Vous n’êtes plus en mode “on l’a tourné, donc on va le montrer”...
Il y a eu ce moment marquant, avec Pierre Calamusa [WSOP 2021], où l’on s’est retrouvé avec des images d’un tournoi qui a duré quinze minutes en tout et pour toi. Ce tournoi-là, on l’a monté, on l’a diffusé. Mais c’était dans un but bien précis. On voulait dire quelque chose.
Oui : montrer que même un pro peut se faire dégager d’un tournoi en un quart d’heure avec deux Rois, que ça arrive et que c’est normal. Mais maintenant, sur la saison EPT Chypre qui est en cours de diffusion, vous aviez filmé et monté des épisodes avec Mustapha Kanit sur le High Roller… avant de décider que finalement, ça ne valait pas le coup de les montrer.
Dans le déroulé de cette saison à Chypre, on a d’abord Julien Sitbon. Je trouve que sa voix-off est bonne, tout est bon, mais… il ne connecte pas avec les flops. Mais ça, c'est le poker. Et nous, on essaie de retranscrire ce qu’est le poker. Et parfois, le poker ce n’est pas super divertissant. Ensuite, on a Alexane, ça se passe mieux pour elle, c’est cool. On se tourne ensuite vers Muss’ dans le High Roller, on a de quoi faire quelques épisodes, mais il n’y a pas de perf’. Et le problème, si on diffusait cette portion, c’est qu’on serait retombé dans des épisodes “galère”, moyens, durant lesquels le joueur ne monte pas de jetons. Je précise que je perds de l’argent en ne diffusant pas ces épisodes, hein ! Mais dans ce cas-là, on a estimé qu’il valait mieux passer directement à la suite. On savait déjà que la saison qui allait suivre [celle des WSOP 2025] allait être très bonne. Mais attention : on en discute toujours en amont avec le joueur concerné. C’est une question de respect. Avant de dire à Wina qu’on projetait de faire sauter des épisodes, on en a donc parlé en premier à Muss’. Il avait déjà enregistré sa voix-off. On lui a dit “écoute, les épisodes sont pas si ouf, t’es pas dans ton meilleur jour.” Pas parce qu’il joue mal, simplement parce que les cartes ne suivent pas. On lui a dit que s’il souhaite quand même qu’on diffuse, on le fera, on respectera son avis. Mais il nous a dit “Pas de souci, vous faites comme vous le sentez.” Vu les résultats de Mustapha ces derniers mois, j’aurais trouvé ça dommage de montrer un tournoi “random” où il ne s’est pas passé grand chose. En plus, à Chypre, le Team W n’était pas du tout au complet, donc il y avait moins l’ambiance de groupe, où tout le monde se retrouve à la pause, pour dîner, etc. Quand on a filmé Muss’, il était en solitaire, on était à la fin du festival, certains étaient déjà rentrés chez eux...
Sauter au bout de deux mains : ça arrive aussi dans DLTDP !
Je poursuis sur la problématique des attentes du public. Cela peut être un poids sur vos épaules, non ? Il n’y a pas un risque d’avoir peur de décevoir, peur de tenter de nouvelles choses ? Comment vous gérez ça ?
J’ai un exemple parfait sur ce sujet, c’est le recours à l’IA pour les voix des joueurs. Avec ça, on a vraiment voulu tenter quelque chose. On a passé tellement de temps dessus, rien qu’à réfléchir s’il fallait le faire ou pas.
Perso, j’étais totalement contre !
Moi aussi ! Mais quand même, on a testé l’outil. C'était pas trop mal. On en parle à Wina. Ils sont chauds. Du coup, on reteste sur les épisodes de Gus Hansen [Main Event des WSOP 2024]. Et là… c’est tout pourri. Vraiment. Et en plus, à table, ça ne se passe pas bien pour Gus, on voyait bien qu’il n’avait pas joué depuis longtemps. Je rappelle Wina, je leur dis que c’est mort : on n’utilisera pas l’IA sur la voix de Gus. Ça aurait fait un bad buzz par-dessus un bad buzz. Mais on décide de retenter avec la voix d'Adrian, car pour le coup, ses épisodes irréprochables. L’outil d’IA est très complexe, et on a passé beaucoup de temps à affiner l’intonation, le rythme, la prononciation des termes de poker, etc. Mais après avoir produit un épisode entier, j’écoute et je me dis : non, c’est toujours pourri. Je retourne voir Wina, ils en discutent entre eux, et finissent par me dire : faisons-le, on y va, on assumera la responsabilité si les gens n’aiment pas, on va se prendre la foudre au début, mais les gens finiront par s’habituer. Et ça s'est passé exactement comme ça. On s’est fait défoncer sur le premier épisode. Je peux comprendre : si tu es habitué à une voix, le changement peut heurter. Le truc qui nous dessert, c’est de ne pas pouvoir proposer les deux pistes, VO et VF, sur un même épisode, alors que d’autres gros comptes YouTube ont cette possibilité. Mais au fil des épisodes, les réactions se sont améliorées petit à petit. Par ailleurs, l’outil ne cesse de donner des meilleurs résultats.
"Il faut parfois faire profil bas"
C’est une chose que de recevoir des critiques sur la qualité du rendu IA. Et d’ailleurs, en vrai je trouve que le résultat est plutôt très bon. Mais j’avais plus envie de parler d’éthique, et des craintes liées à la technologie : celle de se faire remplacer. Un débat qui a lieu partout en ce moment, pour le marché de l’emploi, les métiers de création, etc. Perso, ça me fait bizarre d’entendre quelqu’un prononcer des mots qu’il n’a en vérité jamais prononcés. L’impression qu’il y a une digue morale qui saute...
À une époque, quand Romain Lewis, qui est bilingue à 100 %, venait enregistrer, il se tapait tout le travail en double : français, puis anglais. Imagine quand il y a quatre ou cinq heures d’épisodes à enregistrer. Vu le nombre de vues faibles sur la version anglaise, en tout cas à l’époque, au bout d’un moment Romain a fini par nous demander si ça valait bien la peine de se faire chier. On a fini par arrêter cette façon de faire. Quant au doublage, on ne l’a jamais vraiment envisagé. Parce que si on rentre là-dedans, alors il ne faut pas juste doubler la voix-off, mais aussi tous les passages où le joueur parle dans les couloirs pendant les pauses, au resto, tu rentres direct dans un truc très lourd à gérer. Et puis il faut trouver les bons comédiens, que ce soit fidèle au texte d’origine, etc. Si tu es Netflix, tu peux le faire sans problème, dans toutes les langues que tu veux. Nous, on est sur une production un peu plus modeste, réalisée par une petite boîte ! Avec tous les épisodes qu’on doit sortir chaque année, on doit forcément faire des choix. Et donc, le choix qui a été fait, c’est celui de l’IA.
Tiens, c’est l’occasion de le rappeler : même si Winamax est maintenant une grosse boîte, une multinationale on pourrait presque dire… on n’est pas non plus à Hollywood. On est restés des artisans !
Oui, ça c’est sûr. Faire DLTDP, c’est surtout beaucoup de sueur, pendant le tournage puis le montage. Pas d’IA qui tienne de ce côté-là ! [rires] Et ça permet de redire autre chose : il y aura toujours une limite aux moyens que l’on peut mettre dans le programme. Tu as beau vouloir faire un truc toujours plus gros, plus beau, au bout du compte tu dois toujours te pointer dans une salle, et t’installer au milieu de tables de poker. Notre parti-pris, c’est de faire un docu-fiction, pas du cinéma. Trois personnes autour d’une table qui filment, c’est déjà beaucoup. On ne va pas se mettre à installer une grue juste pour avoir des plus beaux plans, par exemple. La place n’est pas illimitée, et il faut tenir compte des autres joueurs, qui n’ont rien demandé…
Justement, est-ce que vous avez déjà eu des soucis, par exemple des joueurs qui refusent d’être filmés, ou des situations compliquées à gérer ?
C’est rare, mais ça arrive. On va aux WSOP depuis 2014, on a sorti je ne sais pas combien d’épisodes, on a dû avoir des soucis une fois ou deux. Je me rappelle notamment qu’une année, Joe Hachem râlait. Alors qu’on ne filmait même pas sa table, mais la table derrière la sienne. Il s’était plaint et ça avait créé des tensions, on avait dû rester un peu en retrait. Et puis une fois, quand on avait suivi Davidi sur le tournoi où il a fini runner-up [sur les WSOP 2016], un joueur nous clairement dit : "Je ne veux pas être filmé". Le problème, c’est qu’en réalité, ce n’est pas possible de refuser. Quand tu t’inscris à un tournoi, tu acceptes le règlement, et de pouvoir être filmé dans l’enceinte de jeu. La seule exception, ce sont les couloirs : là, tu peux refuser. Mais à la table, tu ne peux pas dire non. Nous, on essaye toujours de rester respectueux. On ne va pas braquer le joueur en lui disant "Tu peux rien y faire, c’est comme ça". On n’est pas là pour emmerder les gens, pas du tout ! Dans ces cas-là, on essaie de se mettre un peu en retrait, éviter les gros plans… mais on ne peut pas arrêter complètement de filmer la table. Parce que sinon, on perd le fil de l’histoire. Dans ce cas précis, on avait contacté Grégory Chochon, et [l’arbitre en chef des WSOP] Jack Eiffel avait directement envoyé un message aux floors pour clarifier la situation. Finalement, ils nous ont soutenus en disant que oui, on avait bien le droit de filmer. Mais ça montre bien qu’il faut parfois faire profil bas, et ne pas insister en allant filmer des gros plans d’un joueur qui n’a pas envie d’apparaître à l’écran.
"Le Main Event des WSOP, c’est le meilleur événement"
Parlons maintenant d’une autre grosse problématique de Dans la Tête d’un Pro : vous ne pouvez pas filmer n’importe quel tournoi, n’importe où, n’importe quand. Déjà, les gros tournois intéressants, il n’y en a pas cinquante dans l’année. Et ceux où on vous autorise à vous installer avec vos grosses caméras, ils sont encore moins nombreux. Bref, ce n’est pas comme si n’importe quel deep-run du Team Winamax pouvait automatiquement faire l’objet d’une série d’épisodes. En plus de ça, récemment, Winamax a été informé par PokerStars que nos équipes média ne seraient plus les bienvenues sur les tournois EPT...
À mon sens, c’est une énorme erreur de leur part de mettre des barrières à certaines organisations, et de se priver de cette exposition. Le poker, il a besoin de contenu et de promotion pour exister. Les gens, moi le premier, ils ont envie de jouer parce qu’ils ont consommé telle ou telle vidéo qui leur a fait kiffer. Le contenu donne envie de jouer. Derrière, peu importe le site qu’on va choisir pour jouer, ça c’est une décision qui appartient à chacun. L’important, c’est que n’importe quel contenu qui fait une bonne promotion du poker est bon pour toute l’industrie.
Heureusement, il reste les WSOP !
DLTDP et les WSOP, ça fait plus de dix ans. Et pour nous, le Main Event, c’est le meilleur événement.
Pas que pour vous. Pour tout le monde !
L’éventail de profils de joueurs est incroyable. Des pros et des amateurs mélangés à toutes les tables. Tu n’as pas ça sur le 6-max à 10 000 dollars par exemple : c’est un beau tournoi aussi, mais il est beaucoup plus pro. Et puis, la structure du Main Event fait que c’est très dur de sauter dès le Day 1. Avec la profondeur et les niveaux de deux heures, tu sais d’avance que tu filmeras le Day 2, et souvent le Day 3. Le “drama” se construit naturellement.
Mais en disant ça, il y a un danger, c’est que le caractère unique du Main Event des WSOP le fasse devenir le seul tournoi vraiment intéressant à montrer dans DLTDP. Que les autres tournois deviennent de l’année deviennent un peu un pis-aller, un truc qu’on filme pour patienter avant LE vrai tournoi de l’année...
Il y a un peu de ça. Mais en vrai, imagine qu’on part filmer le prochain World Poker Tour, peu importe lequel, et que le pro arrive en TF : ça va plaire tout autant.
Soyons réalistes : aujourd’hui en 2025, quels sont les tournois que vous pouvez envisager de filmer ?
On voulait aller aux Bahamas pour le festival WSOP de Noël, qui coche toutes les cases : beaux tournois chers et prestigieux, gros joueurs, et un cadre agréable. Car ça compte aussi, le cadre : quand on monte une belle intro avec les palmiers, l’océan, ben ça marche forcément mieux qu’un décor tout moche sous un ciel gris. L’emballage, c’est important. D’ailleurs, petite anecdote, j’ai déjà eu plusieurs personnes qui m’ont dit, en racontant leur première fois à Vegas : “J’avais l’impression d’être dans DLTDP ! J’ai reconnu la moquette du Paris !” [rires] Ca me fait halluciner !
Ça ne m’étonne pas. Vous participez à entretenir l’imaginaire, le fantasme autour des World Series. Puisque vous recréez la journée typique d’un joueur, forcément, derrière, les gens vont s’y reconnaître. Et ce que vous montrez, on ne le voit pas du tout sur des produits plus classiques comme, disons, le stream de table TV de PokerGO. Mais revenons aux Bahamas, vous y retournez au final ?
Le hic, c’est que cette année, il n’y a quasiment personne du Team qui va y aller, juste Adrian et Mustapha. Joao ne peut pas, car il va bientôt être papa. Et pour nous, c’est difficile de se dire : allez, on envoie une équipe de sept personnes aux Bahamas juste pour filmer deux joueurs. Il y a le risque d’en revenir avec juste un Day 2 fatigué en guise de saison. Avec cinq ou six joueurs qui se déplacent, là c’est tout de suite plus prometteur. Il y avait une autre option : le World Poker Tour du Wynn à Vegas. Mais ça nous ferait revenir à Vegas, et deux Vegas en une année, ça peut faire répétitif.
Et les Tritons ?
On aimerait bien… mais ça bute encore sur les négociations, au niveau de l’utilisation des images du stream. On ne peut vraiment pas s’engager sur un tournoi si on n’a pas d’avance l’assurance de pouvoir récupérer les images de la table TV en cas de besoin. Sinon, tu prends le risque que ton tournage s’arrête en plein milieu, sans pouvoir le terminer.
Aujourd’hui, avec toute votre expérience accumulée, quelles sont les plus grosses difficultés que vous rencontrez sur l’ensemble de la chaîne de production ?
Je dirais que le plus dur maintenant, c’est le bout de la chaîne : les sous-titres, la voix IA… Le tournage, aujourd’hui on maîtrise bien. Le montage, pareil. Alors qu’au début, c’était l’horreur, on n'était que deux à le faire. Sélection des mains, infographie : jusqu’a il n'y a pas si longtemps, on faisait ça au papier et au stylo ! [Il mime un stylo qui grifonne] UTG, raise 200, call de l’autre mec, 3-bet de truc, flop Dame-8-2… Ensuite, on enregistrait les voix, on les posait, on procédait au découpage des épisodes, tout ça à deux. À la fin, on n’en pouvait plus ! De nos jours, on est plus nombreux dessus : par exemple il y a Tapis_Volant qui nous aide sur l’infographie depuis quelques saisons. De nouveaux logiciels sont apparus pour accélérer les process. Et on se répartit mieux les tâches, on travaille par couches successives. Du coup, la grosse différence pour moi, aujourd’hui, c’est que quand je commence à bosser sur les épisodes, je n’ai encore rien vu. Je prends le truc en cours de route, j’ai un œil frais, ça me permet de voir des défauts, de repérer les petits trucs à enlever ou à changer.
"Quand on a commencé, mon fils avait sept ans. Aujourd'hui, il filme et monte les épisodes avec nous !"
Autre conséquence de la popularité croissante de DLTDP : on voit de plus en plus de joueurs pros qui produisent des contenus vidéos dérivés de votre format. Au-delà de la réaction “c’est pas bien de copier”, parce que ça on s’en fout, je pense, est-ce vous prêtez attention à ces contenus “concurrents” ? Est-ce que ça vous pousse à essayer de vous démarquer en permanence, de trouver de nouvelles façons de faire ? Afin que Dans la Tête d’un Pro reste toujours la meilleure version de Dans la tête d’un Pro, si je puis dire.
Par rapport à ça, on a plusieurs avantages. D’abord en termes de droits d’image. Comme j’ai dit, on négocie toujours la permission d’utiliser les images de la table télévisée, dans le cas où le pro s’y retrouve. C’est un avantage que n’auront pas forcément les autres équipes qui essaient de produire des contenus similaires. Après, en termes de production, de visuel, nous on vient d’un monde, les sports de glisse, où les images, la beauté des images, c’est important. Je me suis déjà retrouvé dans la Cordillère des Andes, sous la voie lactée, à faire des ‘time-lapses’. Donc j’aime les belles images. Je me rappelle avoir été subjugué par un film qui s’appelle Baraka, un documentaire composé uniquement de musiques et d’images. Ça m’a appris le pouvoir des images. Il y a des time-lapses de malade, c’est filmé en 70mm. Alors quand on va à Las Vegas, qui est quand même une ville intéressante, folle, on est prêts. On n’est pas en train de se dire “Il faut que ça soit beau”, parce qu’on est déjà câblés comme ça de base. Du coup, on prend le temps de faire des plans, plein. On arrive en avance, on passe du temps à shooter en ville. Cette année, on est arrivé quatre jours avant le Main Event, en se demandant : y’a quoi de nouveau ? OK, il y a la Sphere, il y a tel hôtel qui vient d’ouvrir, etc. On se fait une grosse banque d’images qui va servir sur toute la saison.
Mon rêve perso, pour le futur de Dans la Tête d’un Pro, ce serait des épisodes spéciaux une fois de temps en temps, avec des énormes légendes du poker. Les Negreanu, Ivey, Hellmuth… Ça vous intéresserait de faire ça ?
On a presque réussi à le faire une fois, lorsque Joao s’est retrouvé à la même table qu’Isildur sur un tournoi WSOP. Joao fait un énorme bluff et Isildur paie. Là, on s’est dit : c’est une main sur laquelle on aimerait vraiment avoir aussi le commentaire de l’autre joueur. Ça ferait une petite vidéo bonus qui pourrait sortir en milieu de semaine, par exemple. On en parle à Isildur, il nous dit OK. Et puis au final ça s’est jamais fait… le mec est resté injoignable. Pour filmer un tournoi entier avec une grossestar, en revanche, il y a le problème des contrats, des autres engagements qu’il peut avoir. Car tu veux faire ça avec un mec que tout le monde connaît, mais qui en même temps qui ne soit pas rattaché à une room concurrente. Il n'y en a pas des masses. Et puis, une fois que tu as trouvé le mec, qu’il est d’accord, il faut en plus qu’il ne saute pas au bout de deux heures ! Mais ça serait ouf de le faire, c’est clair.
DLTDP avec Ivey ou Hellmuth, c’est dans la liste des “trucs à faire avant de mourir” !
Clairement. Le chemin parcouru est déjà ouf en l’état. Si en 2010, quand on filme Antony Lellouche sur l’EPT Vienne, tu me dis “dans 15 ans, tu feras la même chose, mais ça sera sur le Main Event des WSOP avec le numéro 1 mondial, et il sautera au Day 5 sur un bad beat”, je t’aurais dit “ouais, c'est ça t’as raison.” Donc ton idée, aujourd’hui, elle paraît compliquée… mais qui sait ? Il ne faut jamais dire jamais. Quand on a commencé la série, mon fils Timo avait sept ans. Aujourd'hui, il filme et monte les épisodes avec nous !
Pour finir, un petit scoop sur la saison WSOP 2025, qui sera diffusée en début d’année prochaine ?
Un chiffre, plutôt : 40 tera-octets. C’est le poids des images de la table TV que PokerGO nous ont fourni. C'est-à-dire qu’ils ne nous ont pas juste envoyé le stream qui a été diffusé... mais tous les angles de toutes leurs caméras ! C’est un merdier pas possible, mais ça va être génial à monter.
On a très hâte. Merci, Régis !
La diffusion de la saison Chypre 2024 de Dans la Tête d’un Pro se poursuit sur notre chaîne YouTube.
