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Interview de Julien Brun

Journaliste-commentateur beIN SPORTS, Julien Brun intervient sur la Ligue 1, l’UEFA Champions League, la FA Cup et sera dans quelques mois en Russie pour commenter la Coupe du Monde de la FIFA 2018.

Tu as grandi dans un petit endroit en Picardie. Qui était le Julien Brun enfant ?

J’ai toujours joué au foot. J’ai grandi avec ma mère qui n’était pas forcément fan, alors je m’échappais régulièrement chez les voisins pour en regarder à la télé. Dès l’âge de six ans jusqu’à la fin de mes études, j’ai pratiqué ce sport, d’abord à l’AS Fitz James et au RC Clermont ensuite, en me disant que je pourrais peut-être devenir professionnel. Le souci, c’est que je n’avais qu’un seul bon pied (le droit). Forcément, comme beaucoup d’autres, le foot a fait partie de mes récrés et a rythmé mon enfance, surtout ma période au collège.

Quels sont tes premiers souvenirs football ?

Le début pour moi, c’est vraiment l’Euro 84. Je me rappelle que l’on regardait les matchs avec ma famille. C’est le souvenir que j’en garde, une ambiance de fête avec la victoire au bout. C’est surtout une histoire d’atmosphère positive autour de la compétition. La dramaturgie de l’événement était belle. Je me souviens également que mes grands-parents m’emmenaient parfois à Grimonprez-Jooris pour les matchs du LOSC.

As-tu rapidement ressenti l’envie de t’orienter vers le journalisme sportif ?

J’achetais souvent France Football, j’aimais bien remplir les livres Panini. Je me faisais des équipes types, je recopiais même les classements des anciens championnats journée après journée. J’ai toujours aimé le jeu en tant que tel. Concernant le journalisme sportif, j’hésitais au début parce que je voulais bosser dans la diplomatie. C’est plus tard, quand je suis rentré en école de journalisme, que mon projet s’est affiné. Je crois que j’ai eu un peu peur de poursuivre en journalisme politique parce que je craignais de ne pas tout maîtriser. En sport, je ne prétends pas tout connaître bien sûr, mais je me dis au moins « Je sais de quoi je parle ». Je ne voulais pas me sentir totalement escroc.

Question du baccalauréat : est-ce que l'obligation de neutralité finit, avec le temps, par tuer la passion que l'on a pour certains clubs ?

Pour être honnête, je pense que je n’ai jamais été un supporter avec les œillères. Je ne me suis jamais rendu malade par rapport aux résultats d’un club. J’ai toujours perçu le football comme un truc très positif. Même les émotions négatives peuvent, au fil du temps, se transformer en une forme de légende. Cela ne m’a jamais donc coûté de devoir être neutre. Sincèrement, je pense que quand tu es plus proche du monde du football, tout ce qui le compose t’éloigne de ce côté « supporter ». En tout cas, c’est comme cela que je le vois. Bien évidemment, je suis content quand il y a des petites histoires, des parcours en Coupe comme celui de Chambly, etc… J’étais également heureux de commenter Lille en Ligue des champions. Mais même dans ce cas, je me voyais plus comme le gamin émerveillé de 10 ans que le mec de 35 piges qui se dit « Ah, c’est génial, c’est mon club ! ». Aujourd’hui, je ne suis plus du tout supporter.

Comment fait-on pour éviter les redondances de langage lorsque l'on commente régulièrement des matchs de football ?

J’avoue que c’est un aspect du métier qui me fait un peu peur. Parfois, je m’entends commenter en direct et je me dis « Ah merde, je viens de répéter la même chose ». Dans ce cas, je fais confiance à mes amis et à ma famille pour me faire des retours réguliers sur ma façon de commenter. L’idée du métier que je fais, c’est d’être un intermédiaire qui est là pour amener un plus au match sans être désagréable. Je prépare toujours une petite info chiffrée sur chaque joueur.

Et quand le but arrive, comment gère-t-on l’émotion du moment et le commentaire ?

Quand il y a un but exceptionnel, l’idée est de faire un point rapide dans sa tête. Je me dis « Il ne faut pas que je balance une phrase bidon ». Le commentaire doit être audible à terme parce qu’il peut être réutilisé tout au long de l’année si le but repasse régulièrement. Je ne prépare rien mais j’essaye, dans la mesure du possible, d’éviter de sortir des expressions automatiques du type « Ah, ça fait 3-0 ! ». La punchline arrive au moment de l’action et l’objectif est d’être raccord avec la beauté du football. Quand tu fais plusieurs matchs par semaine, c’est compliqué de se renouveler mais je tente au maximum d’être original.

Tu es dans une chaîne où les commentateurs enflammés ont une grande place avec Da Fonseca et Sabattier notamment. Ta façon de commenter est différente...

J’ai une admiration pour les commentateurs anglais. Le commentaire suit le rythme du match sans en faire trop, tout en gardant une certaine emphase au moment important. Il y a toujours la formule choc qui te fait dire « Ouais, ça marche ». Chez beIN Sports, ce qui est positif, c’est qu’il y a des styles différents, une richesse dans la façon de faire vivre les matchs. Je considère que je suis là parce que les gens ont décidé de regarder du foot, pas d’écouter Julien Brun. J’accompagne le rythme de la rencontre et je m’adapte en fonction de ce qu’il se passe. S’il y a des moments exceptionnels, je peux hurler mais je ne vais pas inventer un « faux match ». Nous sommes des intermédiaires chanceux et il faut savoir rester humbles. Le spectacle est sur la pelouse.

Peux-tu nous parler du binôme que tu formes avec Bruno Cheyrou ?

Nous n’avons rien inventé ! Le job entre nous est très clair : je suis plus dans la description et Bruno est plutôt dans l’analyse, la vision du jeu. Nous n’avons pas du tout la même préparation et on ne fait pas le même job. C’est ce qui rend le duo complémentaire. D’ailleurs, tu ne cites que Bruno mais j’ai pour habitude de préciser que nous sommes quatre en réalité : le journaliste, le consultant, le journaliste bord de terrain qui peut nous donner des informations complémentaires et le son du stade. On est là pour accompagner le match mais il faut parfois savoir se taire. Quand je sens que le spectacle est aussi dans la tribune, j’aime bien laisser des longs moments de silence. Bon, parfois je tombe sur des insultes et j’ai l’air un peu con… Mais généralement, ce sont des moments magnifiques. Je me souviens du Angleterre – Slovaquie à l’Euro 2016. J’ai très peu parlé sur ce match. J’ai même enlevé mon casque pour écouter le son des tribunes, j’en avais la chair de poule. Si ce qui s’entend dans le stade est plus intéressant que moi, je le laisse vivre. C’est important de savoir s’effacer. Quand les coachs parlent sur le banc, je mets un petit coup dans la cuisse de Bruno pour lui dire « Attends, on va les écouter ». Je pense que cela apporte quelque chose.

As-tu repéré des joueurs de Ligue 1 qui feraient d'excellents consultants ?

Bien sûr. Tiens, dans mon téléphone, j’ai une note avec les « Consultants potentiels ». Je remplis le document régulièrement à chaque fois que je me dis « Ah ouais, il connaît le ballon et il a un bon ton ». Ta carrière peut parler pour toi mais il y a aussi ta manière de parler de football. Le physique est aussi important, il y a des joueurs qui suscitent naturellement l’empathie. Franck Béria par exemple, Rod Fanni, Julien Féret, Souleymane Camara… Obraniak, je l’ai déjà vu dans des émissions et je l’avais trouvé bon. Je ne vais pas tous te les donner, je les garde pour moi ! Un mec comme Nivet aussi. S’il joue si tard, c’est surtout qu’il aime le foot et c’est intéressant pour la suite. Il a déjà fait la moitié du chemin pour être consultant. C’est la même chose avec Jérôme Rothen : il a prolongé sa carrière parce qu’il aimait ça. On sentait qu’il était passionné. Et Bruno Cheyrou, c’est évidemment le cas. À chaque fois qu’on se retrouve, je sais qu’il a regardé les mêmes matchs que moi durant la semaine.

Après l'Euro 2016 que tu as commenté, la Coupe du Monde en Russie sera également diffusée en intégralité sur beIN Sports. Comment vis-tu ces grands événements ?

L’Euro 2016, c’était vraiment particulier. Je ne dis pas que c’était moins bien qu’un événement à l’étranger mais il manquait ce petit truc. Tu repasses régulièrement chez toi, tu vas dans les mêmes stades de Ligue 1, tu es toujours dans ton quotidien au final. C’était excitant mais en même temps très bizarre. J’ai fait la Coupe du Monde 2014 au Brésil, tu es complètement immergé dans la compétition. C’est dur parce que tes proches te manquent mais tu es dans une vraie bulle au quotidien. Je suis resté un mois, j’ai dû faire 18 vols intérieurs. C’est du 100% à chaque instant ! J’ai grandi dans un petit coin de France, c’était inimaginable pour moi de commenter un jour des matchs au Brésil. Je ne dis pas que je vis un rêve éveillé parce que j’ai bossé pour en arriver là mais j’ai conscience d’avoir de la chance de faire ce que j’aime.

D'ailleurs, peux-tu aider nos parieurs à remplir le tableau de la Coupe du Monde ?

Session one-shot

Le match dans lequel tu as pris le plus de plaisir cette saison ?

Arsenal – Chelsea, le 2-2 avec Morata qui rate une occasion de fou à la fin.

Si on t’imposait de ne commenter qu’une seule équipe toute l’année ?

Cette année, ce serait Manchester City.

Le stade de Ligue 1 qui te fout des frissons ?

Il y en a plusieurs… Quand c’est rempli, je dirais Geoffroy-Guichard. Il y a une unité dans l’ambiance qui est exceptionnelle.

Le joueur de football que tu aurais aimé être ?

Arjen Robben ou Ronaldo le Brésilien. Quand Robben prend la balle, il me fout des frissons. Tout le monde sait ce qu’il va faire et il le réussit à chaque fois. Et pour Ronaldo, je précise que c’est le Ronaldo hors blessures parce que je suis un peu douillet…

Les pages à suivre

@WinamaxSport

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Un commentateur intègre, pas là pour casser les oreilles des téléspectateurs et qui se contente de décrire ce qu’il se passe, en traitant les 2 équipes d’égal à égal. On ne peut pas en dire autant de son compère, dommage.
D’autres chaînes devraient en prendre de la graine, et revenir aux sources du commentaire.